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3° Produits de la culture. — Les diverses céréales, l’orge, les lentilles, les fèves, les pois chiches, le doura, le kersenné et plusieurs autres espèces, sont cultivées avec succès dans la terre de Moab ou pourraient l’être comme dans les pays voisins de Galaad et de la Palestine ; toutefois la culture principale et spéciale de cette contrée paraît toujours avoir été le blé. Le blé de Moab, selon plusieurs commentateurs, est cité par le prophète Ézéchiel, xxvii, 17 (hébreu), comme le blé de choix vendu sur les marchés de Tyr, sous le nom de « blé de Mennith ». Voir Mennith, col. 970. Les blés de la Belqâ, la région où se trouvait Mennith, et ceux du pays de Kérak sont les plus recherchés aujourd’hui sur les marchés de Jérusalem, que ces pays semblent avoir toujours approvisionnés. « La terre de Moab, appelée maintenant pays de Kérak, disait en 1840 le rabbin Schwarz exprimant le sentiment populaire, est jusqu’à présent une contrée comblée des plus abondantes bénédictions : ses blés sont excellents entre tous les blés du monde et c’est de là que s’approvisionne la Ville sainte. » Tebuoth ha-Arez, Jérusalem, 1900, p. 254. — La culture de la vigne se partageait avec celle du blé le territoire de Moab, dès l’époque la plus reculée. « Nous n’irons ni par les champs ai par les vignes, » disait Moïse à Séhon en lui demandant d’autoriser les Israélites à passer à travers le pays. Num., xxi, 22.Balaam allant rejoindre Balac, passaitpar des vignes entourées de murs en pierres sèches. Num., xxii, 24. Le nom de la vigne (kérém), porté par divers endroits et les innombrables pressoirs antiques taillés dans le roc, épars sur toutes les hauteurs de Moab, témoignent de la généralité de cette culture. Les diverses essences fruitières, le figuier, l’amandier, le grenadier, le cognassier et le poirier, le pommier, l’abricotier et le pêcher, dont la culture est toujours nnie à celle de la vigne en Galaad, ne devaient pas être négligées dans le pays voisin de Moab. Quand Joram et Josaphat envahirent le territoire de Moab, le pays était couvert d’arbres fruitiers qui furent coupés par l’ennemi. IV Reg., iii, 19-25. Le géographe arabe el-Muqadassi, Géographie, édit. Goeje, Leyde, 1874, p. 180, mentionne parmi les produits des pays de l’islam vantés et recherchés, les amandes de Moab. L’on rencontre aujourd’hui entre Mekaîir elle tleidàn, deux . vallées entièrement plantées d’amandiers abandonnés et devenus sauvages, restes sans doute de la culture à laquelle fait allusion l’auteur arabe du Xe siècle. De nombreuses localités sont désignées par les noms à’Vnim er-Rummdnéh, er-Remeniên, comme des jardins de grenadiers, où l’on ne voit plus un seul pied de cette espèce. Quelques oliviers abandonnés au djebel l Atâr’ûs, près de NaSir, et en quelques autres endroits de la région du sud, sont également l’indice de la culture antique de cette espèce si estimée dans toutes les contrées du même climat. L’auteur cité nomme encore l’indigo, jadis cultivé sur une large échelle dans les parties inférieures du Ghôr. — La culture principale de cette dernière zone était celle du palmier et de la datte. À Sârah et dans divers autres endroits du Ghôr, on voit encore un certain nombre de palmiers, débris des anciennes plantations. Il n’en est pas parlé formellement dans la Bible, mais la situation de cette région identique de nature en face de Jéricho et d’Engaddi, où le palmier, au temps de l’empire romain, produisait, au dire de Pline, H. N., v, 14 ; xiii, 4, la datte la plus estimée de l’univers, ne permet pas de douter qu’elle n’ait de tout temps partagé la même gloire. La carte-mosaïque de Médaba figure des plantations de palmiers dans les plaines de Liviade, de Callirhoé et de Zoara. En ce dernier endroit cette culture donna lieu à une industrie qui, en se perfectionnant, devait devenir l’une des principales du monde civilisé. Depuis l’occupation musulmane les habitants du haut plateau de Moab transformaient par la cuisson le jus de leurs raisins en dïbs, ou en un sirop

épais et condensé, pour le vendre au loin. Les habitants de Sughâr (Ségor ou Zoara) traitèrent de même les dattes de leurs palmiers. La substance ferme et compacte ainsi obtenue s’exportait jusqu’aux extrémités de l’Occident, où elle était très recherchée pour l’édulcoration des liqueurs et des mets. Cf. El Muqadassi, loc. cit. Elle était appelée, du nom du lieu de provenance, Sughâr ou Suqqâr. Le suc de la canne déjà cultivée dans le pays à cette époque, cf. ld., ibid., p. 161, 162, 181, devait supplanter, le dibs de Sughâr et lui prendre son nom, conservé sous la forme suggar ou sukkar, le « sucre ». Saint Jérôme cite le baume avec la datte, comme produit de Ségor. Onomasticon, édit. Larsow et Parthey, Berlin, 1862, p. 97. — Le prophète Jérémie, faisant allusion à la splendeur de ces cultures, appelle le pays de Moab un carmel, « un jardin divin, » où ne cessaient de retentir les cris de joie et de fête. La récolte cependant et la vendange cesseront de s’y faire ; les pressoirs seront abandonnés et le vin cessera de couler. La désolation et la tristesse vont se répandre partout, et le prophète pleure sur les vignobles de Sabama dévastés et détruits. Jer., xlviii, 32-33. — La plupart de ces cultures sont encore mentionnées au XIIIe siècle par le géographe arabe Edrisi, Dikr es-Sdm, édit. Rosenmûller, Leipzig, 1823, p. 4, elles devaient cesser totalement un peu plus tard. La culture du blé et de l’orge a repris sur les hauts plateaux et au Ghôr Çeisbdn, près A’er-Râméh, Kefrein et Tell-.Nimrîn. Quelques arbres fruitiers ont été replantés dans la vallée de Kérak. Près des fontaines, les terrains étroits qui s’y trouvent sont encore semés de concombres, de poireaux, d’oignons et parfois de tabac.

4° Faune. — 1. Animaux sauvages. — Le nom des deux Ariel ( « lion de Dieu » ) de Moab tués par Banaias, un des vaillants guerriers de David, II Reg., xxui, 20, et I Par., xi, 22, s’il ne désigne pas des lions, suppose du moins la présence de cet animal en Moab, comme les noms de Bethnemra, « la maison des léopards, » et Nimrîn, « les léopards, » supposent l’existence de ces derniers dans le voisinage des localités de ces noms. Le lion a depuis longtemps disparu, mais le léopard s’y retrouve encore assez fréquemment ainsi que les espèces similaires, la panthère et le guépard. La montagne au sud de Nemeirâ appelée ras el-Khanâzii’a été également désignée ainsi des nombreux sangliers qui la hantent ; de même’Ayùn ed-Dîb, « les fontaines du loup, » schaunet ed-Diâb, « la retraite des loups, » Vmni el-Qenâfid, « la mère des hérissons ou des porcs-épics, » attestent la présence des animaux de ces noms. La gazelle se montre sur les plateaux avec d’autres antilopes semblables au cerf. Le beden ou bouquetin vit en troupes à Sârah et circule sur toutes les montagnes rocheuses du rivage de la mer Morte. Le lièvre se rencontre au mont Nébo et en quelques autres lieux. L’autruche et l’onagre du désert apparaissent quelquefois sur les frontières de Moab, mais sans y fixer leur demeure. La plupart des oiseaux, des reptiles, serpents et lézards et des insectes communs à la Syrie se trouvent en Moab en plus grand nombre. Les sauterelles y font aussi de plus fréquentes apparitions. Les eaux du Môdjeb et de la vallée de Kérak sont remplies de poissons divers et estimés.

2. Troupeaux et animaux domestiques. — Soit à cause de la nature du sol et de sa disposition, soit surtout à cause de l’abondance de ses sources et de ses rivières, dans le pays de Moab l’herbe croit plus abondante et est plus permanente ; pour cette raison, il était considéré dans les temps anciens comme « une terre de troupeaux », un pays essentiellement propice à leur élevage et à leur entretien : c’est à ce titre que les Rubénites et les Gadites, dont les troupeaux étaient innombrables, demandaient à Moïse de leur laisser la possession de la partie de Moab au nord de l’Arnon, conquise parles Israélites sur les Amorrhéens.Num., xXXii, l-5. —