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THESSALONICIENS (DEUXIÈME ËPITRE AUX)


seront allés jusqu’à appuyer leur opinion par de prétendues lettres venues de l’Apôtre. De pareils procédés n’ont rien pour surprendre, quand on connaît la psychologie des foules mises en fièvre par l’exaltation. La précaution de iii, 17, justifiée par ce qui était arrivé (il, 2, ]yriz 8t* ÈTttffToXïic, ’jjç St’ritiwv) n’est donc pas un artifice d’auteur apocryphe, mais un fait qui cadre avec la situation générale reflétée par l’Épttre. En résumé, la partie adverse n’apporte ni dans l’ensemble, ni dans le détail, aucun poids de raisons assez solides et assez cohérentes pour mettre en doute l’opinion traditionnelle. Spitta, dans un travail qui ne manque ni de perspicacité ni de profonde analyse, Zur Gesch. und Lilt. des Urchristenthums, t. i, p. 111-154, a voulu prendre entre les deux camps une position intermédiaire. Il suppose que Paul, au lieu de dicter cette lettre comme il en avait l’habitude, en aura laissé la rédaction à Timothée. Celui-ci rappellerait même expressément, dans un certain endroit de l’Épître, ii, 5, l’enseignement eschatologique qu’il avait donné à Thessalonique, lors de sa dernière visite. La note de m, 17, serait la signature de l’Apôtre, faisant sienne la lettre de son disciple. Ainsi disparaîtraient les divergences de doctrine et de style que l’opposition met en avant contre l’attribution de cet écrit à l’apôtre saint Paul. Mais il ne semble pas nécessaire de recourir à une hypothèse qui n’est, après tout, qu’un expédient, surtout quand, après un examen attentif, on voit s’évanouir ces prétendues différences d’idées et de mots. Au reste, conçoit-on l’apôtre ratifiant une doctrine étrangère à la sienne et peut-on admettre que Timothée ait eu, même en eschatologie, une autre théologie que celle de son maître ? Ne vaut-il pas mieux, rejetant toutes ces suppositions plus ou moins gratuites, s’en tenir à ce qu’a pensé, sur ce sujet, la tradition primitive ?

VI. Intégrité. — Quelques auteurs, Schmidt, Davidson, Hase, frappés de la façon dont le passage eschatologique, u, 1-12, tranche sur le reste de la lettre, ont cru à une interpolation. La partie authentique, ne comprendrait que i, 1-4 + ii, 1, 2 + ii, 13 à iii, 18. Cette insertion daterait de l’an 69. Elle aurait été provoquée par les événements tragiques de cette période si troublée. Hausrath, au contraire, pense que le passage en question, ii, 1-12, est le seul noyau paulinien de cette composition apocryphe, le reste ayant été emprunté à la première Epître aux Thessaloniciens. Il est bon de dire qu’aucun manuscrit n’appuie ces conjectures et que les preuves d’authenticité de l’Épître suffisent à les contredire. Cf. Clémen, Die Einheitlichkeit der Paul. Briefe, p. 17-18.

VII. Analyse. — I. Le prologue, i, 1-12, remplit tout le chapitre I er. Sous l’adresse, i, 1-2, figurent encore les noms de Paul, Silas et Timothée. L’action de grâces, i, 3-12, renfermée dans une seule phrase, longue et embarrassée, contient trois idées principales, un éloge flatteur pour les progrès en foi et en charité de la vaillante communauté, une mention spéciale de leur patience, de leur fidélité aumilieu de persécutions sans fin, de leur courage qui remplit d’admiration les fcglises voisines, sans doute celles de Philippes, deBé rée et de Corinthe ; enfin, les vœux et les prières que l’Apôtre offre à Dieu pour qu’il achève leur œuvre en eux, les amènent à ce point de perfection et de foi qui leur fasse mériter les honneurs de la glorification suprême, le jour de la venue du Seigneur.

il. corps de l’Épître. ii, I-iii, 15. — Il renferme deux parties : l’une dogmatique, l’autre morale.

a) Partie dogmatique. — Le thème essentiel se concentre sur l’apparition de l’Antéchrist, qui doit être le signe précuseur le plus marquant de l’inauguration du royaume messianique. Jusque-là, il faut se tenir tranquille. Quand l’Antéchrist apparaîtra, il sera encore

temps de prévoir le retour du Seigneur. L’Apôtre avait dit ces choses de vive voix, mais les Thessaloniciens l’avaient mal compris. Dans leur impatience de voir arriver la catastrophe finale qui, pour eux, serait le commencement de la récompense, ces bons fidèles croyaient l’époque de la Parousie très rapprochée. Il y avait, dans leurs assemblées liturgiques, des discours prophétiques où l’on annonçait la proximité imminente de ces événements. On interprétait dans ce sens certaines paroles qu’on disait tenir de l’apôtre lui-même. Il circulait des lettres censées écrites par Paul pour appuyer ces interprétations individuelles, IV, 2. L’Apôtre rappelle brièvement ce qu’il avait prêché touchant ce sujet délicat. L’avènement du Christ n’est pas aussi proche qu’on le prétend : il doit être précédé d’un fait très important qui ne saurait passer inaperçu, t la grande apostasie ii, c’est-à-dire un débordement inouï d’impiété et de corruption. Le personnage qui concentre en lui ce flot d’iniquités est comme l’incarnation du péché, une sorte de Messie de Satan, qui essaie d’anéantir l’œuvre du Christ. Il a toutes les audaces. Il s’élève au-dessus de tout ce qui se nomme Dieu, se donnant lui-même pour Dieu et osant se faire adorer jusque dans le Temple. Il paraît déjà exister au moment où saint Paul écrit, puisque, si une force mystérieuse ne le retenait, il ferait irruption dans le monde, ꝟ. 7. Déjà se fait jour la recrudescence de mal et d’abominations qui, avec l’Antéchrist — c’est le nom que l’Apocalypse donnera à cet être étrange — arrivera à son maximum d’intensité. À cette heure seulement, cet ennemi de Dieu fera son entrée dans le monde. Il sera l’agent de Satan, son organe, accomplissant toutes sortes de miracles et de prodiges pour séduire les hommes, ꝟ. 9. Mais soudain éclatera la Parousie du Seigneur Jésus. Le Sauveur n’aura qu’à paraître pour anéantir son adversaire par le souffle de sa bouche, ꝟ. 8. Ainsi l’inauguration du royaume messianique aura pour prélude la ruine définitive du royaume de Satan par la défaite de l’Antéchrist, qui était son fondé de pouvoir. L’Apôtre achève son apocalypse, en bénissant Dieu de ce que ses lecteurs ont été mis, par la foi à l’Evangile et par le Saint-Esprit, à l’abri de la défection universelle et des séductions de l’Antéchrist. Il les engage, en conséquence, à tenir ferme cet Évangile qui doit être la cause de leur salut, et à garder intacte la doctrine qu’ils ont reçue de lui, soit de vive voix, soit par lettre, J. 13. En finissant, il souhaite que Notre-Seigneur Jésus-Christ et Dieu le Père achèvent de les affermir dans le bien, jp. 15.

b) Partie morale, iii, 1-15. — C’est une suite d’avis très courts, donnés au courant de la plume. L’apôtre commence par demander les prières des Thessaloniciens pour que le succès de sa parole, à Corinthe, égale celui qu’elle a eu parmi eux, et afin que Dieu le protège contre les embûches de ses adversaires, ꝟ. 1-2. Il exprime ensuite la confiance qu’il a en leur fidélité, sur d’avance qu’ils suivront la voie qu’il leur a tracée, t. 3-5. Arrivant maintenant à l’abus qui s’était glissé dans l’Église de Thessalonique, il prescrit aux frères de faire rentrer dans l’ordre ceux qui, sous prétexte d’une Parousie imminente, avaient abandonné le travail et se faisaient nourrir aux frais de la communauté, jl. 6-11. Saint Paul rappelle, à ce propos, l’exemple qu’il leur a donné lui-même, en travaillant de ses propres mains, afin de n’être à charge à personne. Les « spirituels » s’efforceront de ramener au devoir les égarés, dussent-ils, pour cela, les priver, pour un temps, de la vie commune et les amener, par ce moyen, à résipiscence, ji. 12-15.

m. épilogcb. iii, 16-18. — La lettre s’achève par un vœu, 1. 16, et la salutation autographe de l’Apôtre, t. 17.

VIII. Bibliographie. — 1° Pour la question de l’au-