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Page:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome V.djvu/1210

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URIM ET THUMMIM


de l’éphod et de la ceinture. » L’Urim etleThummim ne sont pas nommés expressément. Ils peuvent être compris dans l’éphod, comme le supposent plusieurs anciens textes. I Reg., xxiii, 9 ; xxx, 7.

4° Fonctionnement. — Les textes ci-dessus rappelés permettent de conclure à l’objectivité et au caractère surnaturel des réponses adressées au grand-prêtre par l’Urim et le Thummim. Mais ils n’expliquent pas le fonctionnement de l’oracle, soit qu’il fût bien connu à l’époque où vivait l’historien sacré, soit plutôt qu’il dût rester mystérieux et que le grand-prêtre et quelques autres fussent seuls à connaître le secret. Ce secret n’a pas été transmis ; aussi s’est-on livré aux conjectures les plus diverses pour expliquer de quelle manière l’Urim et le Thummim rendaient des oracles divins. — 1. Josèphe, Ant. jud., III, viii, 9, confond l’Urim et le Thummim avec le pectoral lui-même, et il dit qu’avant la bataille les pierres du pectoral rayonnaient avec un éclat qui annonçait le secours divin et la victoire. Il semble ainsi borner l’emploi de l’oracle aux cas de guerre, ce qui ne se justifie pas au moins en deux circonstances. I Reg., x, 22 ; II Reg., ii, 1. Abarbanel et d’autres Juifs ont adopté la donnée de Josèphe en la spécialisant. D’après eux, le grand-prêtre obtenait la réponse en lisant les lettres qui brillaient successivement à ses yeux parmi celles qui composaient les noms des douzes tribus inscrits sur les pierres du pectoral. « Les mots Urim et Thummim désigneraient les lumières et les obscurités qui passaient sur la face du pectoral, lorsque, placé vis-à-vis du chandelier à sept branches, quelques-unes des lettres gravées sur les pierres précieuses s’illuminaient, tandis que les autres restaient baignées d’obscurité. Peut-êlre alors, d’après des règles qui restaient un des secrets du sanctuaire, le grandprêtre groupait les caractères lumineux pour former la réponse de l’oracle. » Ancessi, Atlas géogr. et archéol., Paris, 1874, Index archéol., p. 19. Mais à l’ensemble des lettres qui formaient les noms des douze fils de Jacob, il en manquait quatre pour faire un alphabet complet : ii, ts, s, ]3, de sorte qu’on n’aurait pu, par exemple, lire le nom de la ville d’Hébron, qui commence par un ii, Hébrôn. Cf. II Reg., il, 1. Quelques rabbins supposent qu’à ces noms étaient joints ceux des patriarches, Abraham, Isaac et Jacob, ce qui ajoutait au total les trois lettres ii, i, p. D’autres compliquaient encore la lecture en faisant intervenir le nom de Jéhovah. Il est difficile de prendre en considération ces différentes hypothèses, parce qu’elles ne maintiennent pas la distinction qu’imposent les textes entre le pectoral et l’Urim et Thummim. — 2. Philon, Vit. Mos., 3 ; De monarch., 2, édit.Mangey, t. ii, p. 152, 226, imagine que deux images, ÔYc<>(<.aTa, appelées 8° j-Xomtic et àMjŒia, étaient jointes au pectoral. D’autre part, on sait par Diodore de Sicile, i, 48, 75, et Élien, Var. Hist., xiv, 34, que’le grand-juge égyptien portait sur la poitrine une image appelée : Vérité. Voir plus haut, col. 2360. Mais cet insigne n’ajoute rien à la valeur personnelle du juge, tandis que l’Urim et Thummim est l’organe essentiel des consultations obtenues de Jéhovah, si bien que, s’il fait défaut, le grand-prêtre ne peut plus rien. Dans les grandes circonstances, les prêtres babyloniens suspendaient aussi à leur cou une étoffe rouge garnie de plusieurs sortes de pierres précieuses. Cf. Lagrange, Étud. sur les relig. sémit., Paris, 1905, p. 236. Il ne faut donc pas se hâter de tirer des conclusions de ressemblances extérieures qui ne suffisent pas à justifier la parité entre les institutions hébraïques et celles des autres peuples. — 3. D’après d’autres, l’Urim et Thummim serait une espèce de Théraphim, voir col. 2174 ; cf. Ose., III, 4 ; Spencer, De leg. Hebr.ritual., La Haye ; 1686, III, 7, ou des sortes de dés de diamant, l’un brillant, l’autre rouge, sur lesquels était gravé le nom de

Jéhovah, et dont le grand-prêtre interprétait les combinaisons, de préférence devant l’Arche. Zûllig, Comm. invpoc, Stuttgart, 1834, Excurs., ii.Pour Braun, Vest. sacerdot. Hebr., Amsterdam, 1701, t. ii, p. 614, l’Urim et le Thummim n’aurait été qu’un symbole et les communications divines au grand-prêtre auraient eu un caractère exclusivement interne. Cf. Bâhr, Symbolik des mosaisch. Cuit., Heidelberg, 1835, p. 136-141. Il serait difficile de justifier par les faits ces différents systèmes. — 4. Plus commune est l’explication de l’Urim et Thummim par un tirage au sort. Cette explication est suggérée par un épisode de l’histoire de Saûl. Quand Dieu refusa de lui répondre pour la seconde fois, le roi attribua son silence à une faute commise soit par lui-même, soit par son fils Jonathas, soit par le peuple. 4 Le texte hébreu paraît avoir souffert en cet endroit. On y lit seulement : « Dieu d’Israël, fais paraître la perfection, hàbâh famîn. » I Reg., xiv, 41. Le texte des Septante est beaucoup plus complet : « Si l’iniquité est en moi ou en Jonathas, mon fils, Seigneur, donne la clarté, Sôç ôrjî.ouç, et si telle est la réponse, donne à ton peuple d’Israël, donne la sainteté, 8bç ô<ri(kï)Ta. » Le sort désigne alors Saül et Jonathas, et, à une seconde épreuve, Jonathas seul. La Vulgate reproduit à peu près les Septante : da ostensionem, … da sanctitatem. Il est possible qu’ici les mots SrjXoi, ostensio, traduisent ûrîm, disparu du texte hébreu, et que ôctiott) ?, sanctitas, soit mis pour {ûmniîm, que les massorètes ont lu fânitm. Cf. Dhorme, Les livres de Samuel, Paris, 1910, p. 123. On aurait alors ici, pris sur le vif, le fonctionnement de l’Urim et Thummim. C’était un sort plus solennel, tiré à l’aide de deux pierres que le grand-prêtre conservait dans le pectoral, et qui était officiellement garanti par Jéhovah. On n’y avait recours que dans les circonstances d’intérêt public ou en faveur des chefs de la nation. Des consultations de ce genre étaient coutumières chez les Babyloniens. « Aux consultations précises adressées par le roi sur l’opportunité ou le succès de ses entreprises, Shamash ou Adad devaient répondre par oui, annu, ou par non, ullu, par une réponse proprement dite, supiltu, par un oracle, tamit, tertu, piristu, parsu, par un jugement, dîna dînu, une sentence, purussu, par une illumination, napalm, ou encore par une vision ou une parole… Le dieu dictait ou inspirait son oracle, abîtu, à ses prêtres. » F. Martin, Textes religieux assyriens et babyloniens, Paris, 1903, p. xxvi. Voir le texte de plusieurs consultations, p. 28, 108, 300. Il y a donc analogie entre la pratique babylonienne et celle des Israélites ; de plus, l’illumination, napafyu, se retrouve dans l’idée exprimée par’ûrim, et l’oracle, tamit, dans tûmmim. Il n’est pas anormal qu’une coutume babylonienne ait été en vigueur chez les Hébreux ; mais Jéhovah a voulu faire pour son peuple ce que les divinités assyriennes ne pouvaient faire pour le leur. — Néanmoins, quelques difficultés subsistent avec cette explication de l’Urim et Thummim. Si l’on admet deux pierres différentes qui, tirées au sort, pouvaient signifier « oui » ou « non », à quoi reconnaissait-on le refus de répondre ? I Reg., xiv, 36 ; xxviii, 6. Michælis, Mosaisch. Recht, Francfort-s.-M., 1775, t. i, p. 293 ; t. vi, p. 162 ; Iahn, Archseol. biblic, iii, 4, 358, dans le S. Scripturae curs. compl. de Migne, t. ii, col, 1040, etc., imaginent qu’aux deux premières pierres en était jointe une troisième qui marquait l’absence de réponse. Mais les textes ne mentionnent que deux objets ; ils auraient fait allusion à un troisième, s’il avait réellement existé pour remplir le rôle important qu’on lui attribue. Il faut penser que le refus de réponse résultait d’une combinaison que nous ignorons. Une autre difficulté provient du genre de réponses fournies par l’Urim et Thummim. Il est malaisé de les réduire toutes à des