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REPAS


concernait ces prières. Elles variaient d’ailleurs selon l’importance des repas. Brèves dans les repas ordinaires, elles s’étendaient davantage pour les repas du sabbat et de la veille des fêtes, et se compliquaient de chants et de Psaumes pour le festin pascal. Voir CÈNE, t. ii, col. 413-415. On disait pour le pain : « Sois loué, ô Seigneur notre Dieu, roi de l’univers, qui fais sortir le pain de la terre ; » pour le vin : « Sois loué, ô Seigneur notre Dieu, roi de l’univers, qui as créé le fruit de la vigne. » D’autres fois : « Sois loué, o Éternel, roi de l’univers, qui nourris le monde entier par ta bonté, en toute grâce et miséricorde. Il donne le pain à toute chair — car sa miséricorde est éternelle. » Ou encore : « Nous te remercions, à Éternel, notre Dieu, de ce que tu as donné à nos pères un pays spacieux, exquis et magnifique (cf. Deut., vni, 10) ; de ce que, ô Eternel, notre Dieu, tu nous a conduits hors de l’Egypte et délivrés de la maison d’esclavage ; pour ton alliance que tu as marquée dans notre chair, pour ta Loi que tu nous as enseignée, pour tes commandements que tu nous a intimés, pour la vie que tu nous as donnée par ta grâce et ta miséricorde. » Les docteurs prescrivaient même des prières spéciales pour chaque espèce d’aliments. La prière était obligatoire, même si l’on ne mangeait que la valeur d’un œuf ou d’une olive. Celui qui l’avait oubliée, avait à la reprendre ensuite, au moins tant que les aliments demeuraient dans son estomac. Berachoth, vi, 5, 7, 8 ; vii, 2 ; viii, 7. Une allusion faite par Notre-Seigneur, Marc, xii, 40 ; Luc, xx, 47, donne à penser que certains docteurs allongeaient démesurément les prières, quand ils prenaient place à la table des veuves aux dépens desquelles ils entendaient vivre. — Dans les anciens temps on s’asseyait pour prendre le repas. Gen., xxvii, 19 ; Jud., xix, 6 ; I Reg., xx, 5, 24. Voir un repas égyptien, Festin, t. ii, fîg. 649, col. 2213 ; assyrien, fig. 650, col. 2215. Plus tard, on suivit la mode Introduite en Palestine de manger étendus sur des divans. Am., VI, 4. Voir Couronne, t. ii, fig. 393, col. 1083 ; Architriclinus, t. i, ûg. 248, col. 935 ; Lit, t. iv, fig. 97 et 99, col. 290, 291. Il va de soi que cet usage n’était suivi que dans les maisons où l’on jouissait d’une certaine aisance. — Les mets élaient ordinairement servis sur une table. I Reg., xx, 29 ; II Reg., ix, 7, 11 ; III Reg., x, 5 ; Luc, xxii, 21. Voir Table. — Sur la nature des mets habituels, voir Nourriture, t. iv, col. 1700. La viande, coupée en morceaux, était apportée sur un plal. Marc, xiv, 20 ; Luc, xi, 39. Voir Plat, col. 460. Chaque convive en recevait un morceau du chef de la famille, IReg., i, 4 ; le pain, très plat et flexible, voir Pain, t. iv, col. 1951, lui servait d’assiette, et au besoin de cuiller pour puiser de la sauce contenue dans un unique plat creux, au service de tous les assistants. Les fourchettes, couteaux et autres ustensiles élaient totalement inconnus et d’ailleurs considérés comme inutiles ; les doigts suffisaient à tout.. Ainsi s’explique la rigueur de la loi qui obligeait à les laver avant le repas. Ces coutumes sont encore en vigueur chez les Arabes de Palestine. Cf. de la Roque, Voyage dans la Palestine, Amsterdam, 1718, p. 202-206 ; Plerotti, La Palestine actuelle dans ses rapports avec Vancienne, Paris, 1865, p. 224-227 ; Julien, L’Egypte, p. 273, 274. L’eau et le vin étaient les boissons ordinaires. Voir Coupe, t. ii, col. 1074 ; Vih. — La prière terminait le repas comme elle l’avait commencé.

3° Remarques diverses. — On cessait toute occupation quand venait l’heure du repas. Dan., xiii, 13. Tobie, ii, 3 ; xii, 12, ne craignait pas cependant d’interrompre son repas pour aller ensevelir les morts. Parfois Notre-Seigneur et ses Apôtres, accablés par la foule qui envahissait leur maison, ne pouvaient même pas prendre leur repas. Marc, iii, 20. — Certaines règles de convenance devaient être observées pendant

les repas. L’Ecclésiastique, xxxi, 12-22, les formule ainsi :

As-tu pris plæe à une table bien servie,

N’ouvre pas la bouche devant elle,

Et ne dis pas : Voici bien des mets !

N’oublie pas que l’œil cupide est chose mauvaise…

Où il regarde, n’étends pas la main,

Et ne te heurte pas avec lui dans le plat.

Juge des désirs du prochain d’après les tiens,

Et, en tout, agis avee réflexion.

Comme il sied à un homme, mange de ce qui est devant toi.

Ne mâche pas avec bruit, pour ne pas causer de dégoût,

Gesse le premier, par bonne éducation,

Ne te montre pas insatiable, de peur de scandaliser.

Si tu es assis en nombreuse compagnie,

N’étends pas la main avant les autres…

Les insomnies, les vomissements pénibles

Et la colique sont pour l’homme intempérant.

Si l’excès du manger t’incommode,

Lève-toi, promène-toi au large, et tu seras soulagé.

A la place de ce dernier conseil, la Vulgate en donne unautre, evonie, qui pourrait faire allusion à uneprécaution hygiénique, mais nullement à l’excès auquel se livraient les Romains, par un raffinement de gourmandise. En grec, il y a le mot (leo-omopcôv, qui devrait venir régulièrement de uiaov, « milieu », et ÔTnipa, « arrière-saison », mais alors n’aurait aucun sens. On lui assigne une signification plus acceptable en le rattachant au verbe rcopeiSw, « marcher ». D’ailleurs ce composé n’est pas classique. La recommandation de manger de ce qui est devant soi, comme il sied à un homme, est encore obéie. En Orient, « chacun se sert avec les doigts et prend directement dans le plat commun le morceau qu’il porte à sa bouche. Pourtant tout se fait avec une certaine convenance. On ne prend que devant soi sans jamais attaquer la région du plat qui fait face au voisin. » Jullien, L’Egypte, p. 273.

4° Différentes sortes dé repas. — 1. Un repas de famille terminait ordinairement la cérémonie de la circoncision. Voir Circoncision, t. ii, col. 777. — 2. Celui qui faisait offrir un sacrifice pacifique devait abandonner aux prêtres la cuisse droite, la poitrine et une épaule de la victime. Lev., vii, 32-35. Le reste lui servait à faire un repas, le jour même après un sacrifice pacifique, le jour même et le lendemain, après un sacrifice votif ou volontaire. Il était absolument défendu de retarder ce repas jusqu’au troisième jour, ou d’y prendre part sans être en état de pureté. Lev., vii, 1520. — 3. D’autres repas suivaient la présentation des dîmes. Comme les précédents, ils devaient avoir lieu prés du sanctuaire, par conséquent à Jérusalem après la construction du Temple. Deut., xii, 6, 7. Ceux qui demeuraient trop loin pour apporter leurs dîmes en nature les vendaient sur place, apportaient le prix à Jérusalem et y faisaient des repas sacrés auxquels ils invitaient les lévites de leur voisinage. Deut., xiv, 2427. — 4. Chaque troisième année, avec le produit d’une autre dime, on offrait des repas aux lévites, à l’étranger, à l’orphelin et à la veuve, mais dans la localité même. Deut., xiv, 28, 29. Voir DIme, t. ii, col. 1434, 1435. — 5. Sur le repas de la Pâque, voirPÂQUE, t. iv, col. 2096. — 6. Jérémie parle de repas funèbres en souvenir des morts. Il dit de ses compatriotes voués au châtiment.

On ne leur rompra point le pain du deuil

Pour les consoler au sujet.des morts,

Et on ne leur offrira pas la coupe de consolation

Pour un père et pour une mère. Jer., xvi, 7,

Ézéchiel, xxiv, 17, et Osée, ix, 4, font aussi allusion au pain de deuil. Te vieux Tobie recommande à son fils de faire servir son pain et son vin à la sépulture des justes, Tob., iv, 18, c’est-à-dire à des repas funèbres dans lesquels on célébrait la mémoire des justes après