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ROBOAM — ROCHER


rent sous la main du Seigneur qui pesait sur eus. Le prophète Séméï annonça alors que le châtiment serait passager. En effet, Sésac prit Jérusalem, qui sans doute ne résista guère, et il s’empara des trésors du Temple, ainsi que des cinq cents boucliers d’or que Salomon avait fait exécuter. II Par., iii, 2-9 ; III Reg., xiv, 25, 26. Le désastre n’était pas irrémédiable ; mais il était fort humiliant, surtout au lendemain d’un règne comme celui de Salomon, et il dépouillait le royaume de grandes richesses. Le prophète Séméï avait annoncé en outre que le pays resterait assujetti au roi d’Egypte et apprendrait ainsi la différence qu’il y avait entre le service de Jéhovah et celui des princes de la terre. II Par., xii, 8.

Sésac a laissé un monument de sa campagne en Palestine. Sur la muraille sud du temple d’Amon à Karnak, il a fait graver la liste de ses conquêtes sur des cartouches dont chacun figure une ville prise. Le vingtneuvième cartouche porte la mention Yud hamâlek ou Yudah malek. Champollion y vit, mais à tort, le portrait de Roboam. Le sens des mots est encore douteux, mais le type représenté est bien le type juif (fîg. 1 et 2). Voir Sésac. Cf. Champollion, Lettres écrites d’Egypte, 2 M édit., p. 99, 100 ; Rosellini, Monumenti Storici, t. ii, p. 79, 80 ; t. iv, p. 158, 159 ; de Rougé, Mémoire sur l’origine égyptienne de l’alphabet phénicien, Paris, 1874, p, 53 ; F. Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, 6e édit., t, iii, p. 407-427. Le monument de Karnak nomme beaucoup d’autres localités de l’Idumée, de Juda et d’Israël ; il mentionne même la Phénicie, ce qui suppose, non une action militaire directe, mais le paiement plus ou moins volontaire d’un tribut par ceux qui avaient quelque chose à craindre ou à espérer du monarque égyptien. Quoique les égyptologues ne s’entendent pas sur le sens qu’on doit donner aux mots Yud hamélek (cf. Maspero, Histoire ancienne des peuples de l’Orient, t, ii, p. 774), il n’en est pas moins certain que l’inscription de Karnak confirme le récit biblique dé la campagne de Sésac en Palestine.

Roboam répara comme il put les pertes qu’il avait subies. Il remplaça les boucliers d’or par d’autres en airain. Ses gardes les portaient quand ils l’accompagnaient à la maison de Jéhovah. Par la suite, « il y eut encore quelque chose de bon en Juda, » que le Seigneur n’avait châtié qu’avec mesure. II Par., xii, 10-12 ; III Reg., xiv, 27, 28. Roboam régna en tout dix-sept ans, par conséquent douze ans rncore après l’invasion égyptienne. Il ne paraît pas qu’il soit revenu sérieusement à résipiscence. Le Chroniqueur, en effet, termine le récit de sa vie par cette remarque : t II fit le mal, parce qu’il n’appliqua pas son cœur à chercher Jéhovah. » II Par., xll, 14. Victime des conditions dans lesquelles s’était passée sa jeunesse, il eut le tort de croire que le prestige qui avait entouré la royauté de son père suffirait à garantir la sienne. Il ne sut pas comprendre qu’un grave changement s’était produit dans l’état des esprits et n’eut pas l’idée de chercher du eôté de Dieu l’inspiration et le secours dont il avait besoin. Sur sa mémoire pèse le souvenirdu schisme auquel son imprudence donna l’occasion de se produire.

H. Lesêtre.
    1. ROCHER##

ROCHER (hébreu : sûr, sôr, ’ébén, kêf, miSgâb, séla’; Septante : ïrkpa ; Vulgate : petra, saxwm, rupes, lapis), masse minérale compacte, s’élevant au-dessus du sol à des hauteurs variées et avec des formes souvent abruptes.

1° Au sens propre. — La Palestine est un pays accidenté dans lequel les altitudes varient de 392 mètresau-dessous du niveau de la mer, à la mer Morte, jusqu’à 2800 mètres au-dessus, au sommet de l’Hermon. Voir la carte, t. iv, col, 1980. Le roc affleure donc souvent dans les accidents de terrain, y forme des ravins profonds et

escarpés et des montagnes plus ou moins dénudées. Aussi est-il assez souvent question des rochers dans la Sainte Écriture. Les rochers ne peuvent être changés de place. Job, xviii, 4. Les aigles y établissent leur aire, Job, xxxix, 28, et les animaux sauvages y ont leur repaire. Ps. civ(ciii), 18. Les malheureux y trouvent un abri pour habiter, Job, xxviii, 4 ; xxx, 6, et un refuge contre les ennemis. I Reg., xui, 6 ; Jer., iv, 29. La demeure du Cinéen était dans le roc. Num., xxiy, 21. Dans la poursuite de Saùl contre David, comme dans les guerres d’Israël contre les Philistins, l’action se passe souvent au milieu des rochers. I Reg., xiv, 4 ; xxiv, 4. Voir Caverne, t. ii, col. 355. À la mort du Sauveur, les rochers se fendirent. Matth., xxvii, 51. Voir Calvaire, t. ii, col. 82. — Le miel du rocher est celui que les abeilles y déposent. Deut., xxxii, 13 ; Ps. lxxxi (lxxx), 17. L’huile du rocher est celle que produisent les oliviers plantés au milieu des roches. Job, xxix, 6.

2° Au sens figuré. — Par sa solidité, son évélation, la facilité de sa défense, le rocher figure le refuge inexpugnable dans lequel on est sûrement hors d’atteinte, irkpa, petra. Ps. xxvii (xxvi), 5. Jéhovah est par excellence le rocher d’Israël, ’ébén, xaTtff^j<ra{ pour xoctiï-- /Tjaac, « tu as rendu fort i>, loj.is.Gen., xlix, 24. Isaïe, xxx, 29, appelle aussi Jéhovah le rocher d’Israël, sûr. Très fréquemment, les auteurs sacrés invoquent Dieu comme leur rocher, c’est-à-dire leur ferme et invin, " sible appui. Ps ix, 10 ; xviii (xvii), 3 ; xxxi (xxx), 4 xlii (xli), 10 ; xlvi (xlv), 8, 12 ; xlviii (xlvii), 4 ; lix (lviii), 10, 18 ; xcxiv (xcxm), 22 ; I Reg., ii, 2 ; II Reg., xxii, 2 ; Is., xvii, 10. Dans ces passages, l’hébreu emploie les mots misgâb, séla’et sûr. Les Septante et, à leur suite, la Vulgate rendent toujours cette expession figurée par des équivalents moins imagés : xaïaçuY’n, refugiunt, cnEçii<oi.a, firmamentum, avTiWJTtrap, susceptor, poT160s, adjuior. Là où l’hébreu dit : « le Rocher, son œuvre est parfaite », Deut., xxxii, 4, ils remplacent le mot hébreu par le mot « Dieu ». « Notre Rocher n’est pas comme leurs rochers » devient « notre Dieu n’est pas comme leurs dieux ». Deut., xxxii, 31. « Où sont leurs dieux, le rocher en qui ils mettaient leur confiance ? » est traduit : « Où sont leurs dieux, en qui ils avaient confiance ? » Deut., xxxii, 37. En atténuant ainsi la métaphore du « rocher », les Septante ont obéi à leur souci constant de remplacer par des euphémismes’es termes qui leur paraissaient inintelligibles pour des étrangers ou capables de leur inspirer une idée fausse de Jéhovah. Cf. Cornely, Introductio in U. T. libros, Paris, 1885, t. i, p. 329. Or, il est certain que la représentation de Jéhovah sous la figure de rocher pouvait avoir des inconvénients en un temps où les divinités idolâtriques revêtaient habituellement la forme de statues de pierre ou même de stèles informes. — Au désert, Moïse avait frappé le rocher pour en faire jaillir l’eau dont les Hébreux avaient besoin. Exod., xvii, 6 ; Num., xx, 11 ; Ps. cxiv (cxui), 8. Saint Paul dit à ce sujet : « Ils buvaient à un rocher spirituel qui les accompagnait, et ce rocher était le Christ. » I Cor., x, 4. Les anciens auteurs juifs prétendaient que le rocher qui avait fourni l’eau une première fois accompagnait les Hébreux dans leur voyage. Le miracle aurait été dû aux mérites de Marie, sœur de Moïse. Voilà pourquoi il fallut qu’il fût renouvelé à la mort de celle-ci. Le rocher, que quelque-uns réduisent à l’état de petite pierre que Marie pouvait porter dans son sein, franchissait les montagnes et les vallées. À lui se rapporteraient les paroles du cantique : « Monte, puUsl » Num., xxl, 17. Cf. Bammidbar, i, fol. 182b ; lalkut Rubeni, fol. 144 ; Raschi, sur Taanith, fol. 19a ; Schoellgen, Horse hebr. et thalmud. K Dresde, 1733, p. 623 ; ûrach, De l’harmonie entre l’Eglise et la Synagogue, Paris, 1844, t. ii, p. 423. Tertullien, De baptismo, 9, t. i, col. 1210, a admis la tradition juive de comité petra, du rocher qui