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Page:Dictionnaire de la conversation et de la lecture - Ed 2 - Tome 08.djvu/107

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DUBOIS DE GRANGE — DUBOS

mille bourgeoise. DcsBné à la profession des armes, il entra dans les mousquetaires. On attribue son élimination de ce corps à l’emploi de lettres des noblesse supposées, ce qui ne l’empêcha pas d’être nommé lieutenant des maréchaux de France. Ce reproche, bien ou mal fondé, qui avait signalé par un affront ses premiers pas dans la carrière militaire, l’avait profondément irrité contre cette noblesse qui l’avait repoussé de ses rangs ; il s’en montra depuis l’un des plus implacables adversaires. Elu député du tiers aux états généraui de 1789, par l’assemblée du bailliage de Vitry-le-Français, il défendit de tous ses vœux et de tous ses moyens la cause de la révolution. Son opposition n’était pas l’effet d’une exaltation haineuse, irréfléchie ; il croyait, avec la majorité du côté gauche, que la forme monarchique n’était point incompatible avec le principe de la souveraineté nationale. Il soutint à la tribune le plan proposé par le ministre de la guerre pour la réorganisation de l’armée et l’établissement réguUer des gardes nationales. Il avait été nommé secrétaire de r.issemblée constituante, à la fin de 1789 : il prit une part active aux travaux du comité militaire ainsi qu’à toutes les discussions relatives à l’armée et aux mesures d’ordre pour la sûreté intérieure. Le 28 février 1790, il demanda que le roi fût déclaré chef suprême de l’armée. Il se prononça contre la nouvelle qualification de roi des Français, contribua, dans la séance du 4 mai 1790, à faire décréter la réunion du comtat Venaissin à la France , prit l’initiative pour l’affranchissement des noirs, et demanda que tout noir fût libre de plein droit en entrant sur le territoire français. Nommé maréchal-de-camp après la session, il refusa d’être employé dans l’armée commandée par Lafayette, et préféra entrer comme simple grenadier dans la garde nationale. Élu député à la Convention nationale par le département des Ardennes, il fut nommé commissaire pour aller destituer le général Montesquiou, contre lequel il provoqua ensuite un décret d’accusation , puis envoyé, au mois de nô-Tembre 1792, auprès de Dumouriez, pour vérifier les plaintes de ce général contre le ministre de la guerre Pache. Cette mission fut sans résultat. Dans le procès de Louis XYI , il vota la mort , et le 25 janvier 1793 il proposa le plan de la nouvelle organisation de l’armée. La différence de solde , de régime , d’uniforme , avait déjà excité quelque opposition entre les régiments de ligne et les bataillons de Tolontaires nationaux ; ces distinctions pouvaient avoir les plus funestes conséquences : Dubois de Crancé fit adopter la division en demi-brigades , composées chacune d’un régiment de hgne et de deux bataillons de volontaires. Cette fusion s’opéra sans la plus légère opposition , et cette organisation, sanctionnée par la victoire, se maintint jusqu’à l’empire. Dubois de Crancé fut nommé président de la Convention, le 25 février : il entra le 25 mars suivant au comité d e s a 1 u t p u b I i c , et fut envoyé en mission à Lyon avec son collègue Gauthier. De graves reproches lui ont été faits sur sa conduite pendant le siège de cette malheureuse cité : ils étaient sans doute er.agérés , puisque Co u t h o n l’accusa àsmodérantisme, elle fit rappeler. Il publia sa justification, dans laquelle on ne peut reconnaître cette modération dont on lui avait fait un crime, n Moi-même , écrit-il , j’ai proposé, si l’on entrait de vive force, de n’entrer que l’épée d’une main et la torche de l’autre. » Dans le même mémoire il se plaint de Couthon. De retour à Paris, Dubois de Crancé entreprit aussi de se justifier à la tribune des Jacobins ; mais la faction Robespierre et Couthon le fit rayer du tableau des membres de cette société. Il y rentra après le 9 thermidor, dénonça Malouet, et proposa la liberté de la presse et la mise en liberté de tous les détenus politiques. Accusé par Duhem d’être de connivence avec Tallien et Fréron contre les patriotes, il n’en persista pas moins à réclamer l’épuration des jacobins, et sa proposition fut décrétée par la Convention. A la tribune des Jacobins, il voulait que l’on demandât à chaque membre épuré ce qu’il avait DICT. DE IX CONVERS. — T. VIII,

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fait pour être pendu en cas de contre-révolution... A cette tribune, à celle de la convention, au comité de salut public, où il rentra quelques mois après le 9 thermidor, Dubois de Crancé semblait se multiplier par une infatigable activité. Une seule pensée domine dans ses discours et ses rapports, la fusion de toutes les nuances de l’opinion républicaine, l’isolement de tous les hommes dont les précédents ne rappelaient que des souvenirs irritants. Il demandait en même temps et la suspension des procédures contre les anciens membres du comité de salut public, et l’annulation de toute confiscation prononcée depuis le 14 juillet 17S9. Il contribua puissamment à la défaite des insurgés de prairial. La veille du combat du 13 vendémiaire, il détermina la Convention à accepter les services offerts par les clubistes du Panthéon, qu’on appelait aussi terroristes ; il fut, après cette orageuse et sanglante journée, nommé membre du comité extraordinaire , chargé de présenter les mesures de salut public qu’exigeaient les circonstances , et appuya de tous ses moyens la loi d’amnistie du 3 brumaire an iv , en faveur des condamnés pour opmion politique, excepté ceux qui se trouvaient compromis dans l’attaque du 13 vendémiaire. Réélu au Conseil des Cinq-Cents l’année suivante, il appuya l’impôt en nature, et renouvela ses dénonciations contre les journaux royalistes. Appelé pour la seconde fois à ce conseil par l’assemblée scissionnaire des Landes, il n’y fut pas admis. Son élection fut déclarée illégale ; il fut ensuite nommé par le Directoire inspecteur général d’infanterie, et l’année suivante ministre de la guerre, en remplacement de Bernadote. Rendu à la vie privée après l’événement du 18 brumaire an vin, il se retira à la campagne, et mourut à Rethel, le 29 juin 1S14. Dufey (de l’Yonne). DUBOS (Jean-Baitiste), naqnit à Beauvais, en 1670. Il renonça de bonne heure à l’étude de la théologie, pour se livrer exclusheraent à celle du droit public. Le régent et le cardinal Dubois l’employèrent avec succès dans plusieurs négociations secrètes. Retiré de la carrière politique , il se jeta dans celle de l’histoire et de la littérature. Nommé membre de l’Académie Française en 1720, il en devint secrétaire perpétuel, à la place d’André Dacier, en 1722. Sou premier ouvrage fut V Histoire des quatre Gordiens, prouvée et illustrée par des médailles. L’opinion qui n’admet que trois empereurs de ce nom n’en a pas moins prévalu’en dépit de l’honorable académicien. Chargé en 1701 de plusieurs négociations en Hollande et en Angleterre, pour décider ces deux nations à la paix , il publia dans ce but un ouvrage intitulé : Les intérêts de l’Angleterre mal entendus dans la guerre présente. Il fit paraître plus tard V Histoire de la Ligue de Cambrai. « Cette histoire, dit Voltaire, est profonde, politique, intéressante ; elle fait connaître les usages et les mœurs du temps, et est un modèle en ce genre, u VHistoire critique de l’Établissement de la Monarchie française dans les Gaules (3 vol. ^-4") tend à prouver que les Francs furent appelés par les Gaulois pour les gouverner. Ce système , exposé avec beaucoup d’art par l’abbé Dubos, a été réfuté par Montesquieu, dans l’Esprit des Lois. En 1719 Dubo fit paraître deux vol. in- 12 de Réflexions critiques sur la Poésie et sur la Peinture. Tous les artistes peuvent lire encore cet ouvrage avec fruit. " Ce n’est pas un livre méthodique, dit Voltaire, mais l’auteur pense et fait penser. Il ne savait pourtant pas la musique ; il n’avait jamais pu faire de vers et n’avait pas un tableau , mais il avait beaucoup lu, beaucoup vu et beaucoup réfléchi. » L’abbé Dubos fit aussi paraître un manifeste de Maximilien, électeur de Bavière, contre Léopold, empereur d’Allemagne, relativement à la .succession d’Espagne. Il mourut à Paris, le 23 mars 1742, âgé de soixante-douze ans. Il répétait en mourant ce mot d’un ancien ; Le trépas est une loi, et non pas une peine. Et il ajoutait : Trois choses doivent nous consoler de la vie : les amis que nous avons perdus ; le peu de gens dignes d’être aimés que noits 13