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du forum de Trajan[1], la frise du temple du Soleil, dont les fragments gisent dans le jardin Colonna[2], et les rinceaux de la villa Médicis, qui ont dû décorer des corps de pilastres[3]. Semblables à ces derniers rinceaux étaient sans doute les acanthes d’or dont parle Diodore de Sicile, en décrivant le char funèbre d’Alexandre[4], et qui, surgissant du milieu de chaque colonne, s’élevaient insensiblement jusqu’aux chapiteaux[5].

L’acanthe molle fut aussi employée dans la décoration des chapiteaux ; nous la voyons au chapiteau composite de l’arc de Septime Sévère (fig. 29)[6]. C’est par erreur que Perrault et Quatremère de Quincy l’indiquent à l’arc de Titus[7] : les chapiteaux et les modillons de cet arc portent l’acanthe de convention.

L’acanthe en général, diversement interprétée suivant les différentes époques, ne fut pas seulement appliquée à l’architecture proprement dite. Nous la trouvons encore soit dans les peintures de Pompéi et des Thermes de Titus, soit comme ornement de vases, de candélabres, de tables, et de toutes sortes d’objets en marbre ou en bronze, que contiennent nos musées.

L’orfèvrerie s’en servit aussi très-heureusement ; nous en avons un bel exemple au Musée de Naples, dans un vase en argent, où se trouvent représentés Homère, l’Iliade et l’Odyssée, portés sur des rinceaux d’acanthe[8].

Dans leurs poésies, Théocrite, Ovide, Properce et Virgile, nous décrivent des vases et des coupes, en airain ou en bois, sur lesquels la flexible acanthe serpente et s’entrelace[9]. L’acanthe fut aussi employée en broderie pour orner les vêtements. E. Guillaume.

ACAPNA. — I. acapna ligna, ἄκαπνα ξύλα, bois qui brûlent sans fumée. Le climat de la Grèce et de l’Italie n’exige pas des appareils de chauffage très-compliqués. Les anciens, dans leurs appartements, se contentaient, en général, comme on fait encore dans beaucoup de pays chauds, d’un foyer fixe (ἑστία) ou portatif (focus, ἀνθράκια, ἔσχαρα), et dans le premier cas, une simple ouverture au plafond suffisait à donner passage à la fumée [focus, domus]. Ce mode de chauffage rendait nécessaire l’emploi de combustibles donnant aussi peu de fumée que possible. On se servait de bois que l’on avait eu la précaution de faire complétement sécher. Les poëtes ont toujours soin d’indiquer cette dessiccation par des épithètes convenables (ξύλα δανά[10], ξύλα κάγκανα[11], κᾶλα κάγκανα[12]). On perfectionna en Grèce les procédés de dessiccation de telle sorte qu’on obtint des bois brûlant sans produire aucune fumée, ξύλα ἄκαπνα, ou simplement ἄκαπνα[13] ; les Latins ont adopté le mot avec la chose qu’il désigne. Nous connaissons trois des procédés auxquels ils avaient recours. Le plus simple consistait à activer la dessiccation du bois en l’exposant à un feu ardent, sans toutefois le réduire en charbon ; les matériaux préparés de cette façon s’appelaient aussi ligna cocta ou coctilia[14] ; la seconde méthode consistait à enlever l’écorce et à faire séjourner le bois dans l’eau, puis à le faire complétement sécher avant de s’en servir[15] ; le dernier procédé était l’immersion dans de l’amurca, la partie aqueuse du suc de l’olive qui sort la première sous le pressoir, avant l’huile [olea] ; quelquefois aussi on se bornait à en enduire la surface du bois, qui était ensuite séché au soleil[16].

II. acapnon mel, miel sans fumée, c’est-à-dire le miel enlevé de la ruche sans qu’on eût enfumé les abeilles[17]. Comme cette dernière opération communiquait au miel un goût assez désagréable, le mel acapnon était fort recherché [mel]. Ch. Morel.

ACATUS, ACATIUM (Ἄκατος, Ἀκάτιον). — Petit bâtiment dont le nom se rencontre assez fréquemment dans les auteurs anciens, mais dont aucun n’a laissé une définition précise. Des divers passages où il en est question, il résulte que ce nom, resté indéterminé, comme chez nous ceux de barque ou d’embarcation, s’appliquait à des navires d’importance et de destination diverses. Hérodote[18] parle d’acates servant à transporter des grains ; Lucien[19] appelle de même un navire de charge pouvant contenir des passagers en grand nombre, des armes, des provisions, et en état de résister à une longue et pénible traversée ; mais, en général, ce nom désigne des bâtiments légers et surtout propres à la course. Tels étaient ceux dont se servaient les pirates, « légers, étroits, de facile manœuvre, embarquant, dit Strabon[20], environ vingt-cinq hommes, rarement capables d’en porter trente. » Thucydide raconte que les habitants de Mégare assiégée par les Athéniens, dans la guerre du Péloponèse, sortaient pendant la nuit pour exercer la piraterie ; ils transportaient sur une charrette jusqu’à la mer et faisaient rentrer de la même manière dans la ville, avant le jour, un de ces navires, que l’historien appelle ἀκάτιον ἀμφηρικόν, c’est-à-dire que chaque rameur y maniait deux avirons[21]. Quand Carthage fut réduite à toute extrémité par la révolte des mercenaires, elle arma les plus grandes acates qui se purent trouver[22] ; c’étaient par conséquent des navires qui n’avaient pas auparavant cette destination. D’autres témoignages prouvent encore que des acates servaient à la pêche[23], ou comme embarcations attachées à de plus grands vaisseaux[24], qu’elles naviguaient tantôt à la rame[25] et tantôt à la voile[26], et qu’elles étaient au besoin munies de gouvernails[27], d’ancres[28], et quand elles devaient combattre, d’éperons. Ce dernier trait leur est attribué par Pline[29], aussi bien que la poupe arrondie et courbée en dedans ; mais ce sont là des caractères qui ne les distinguent pas de la plupart des autres navires. Plutarque[30] appelle ἀκάτιον le bateau dans lequel se jeta César surpris à Alexandrie, d’où il gagna à la nage un bâtiment en rade, et Suétone, racontant le même fait[31], lui donne le nom de scapha ; il s’agit donc ici d’une chaloupe. Enfin, les poëtes grecs se servent quelquefois du mot ἄκατος en parlant de la barque de Caron, le nocher des enfers. On voit combien serait peu rigoureuse toute définition de l’acate.

  1. 20 Envoi de M. Bonnet ; Owen Jones, The Grammar of ornement, ch. 6, pl. XXVI.
  2. 21 Envoi de M. Bonnet.
  3. 22 Moulages romains à l’École des Beaux-Arts.
  4. 23 Diod. Sic. XVIII, 26.
  5. 24 Ouatremère de Quincy, Monuments et ouvrages d’art antiq. restitués, t. II, p. 46.
  6. 25 Envoi de M. Ancelet.
  7. 26 Envoi de M. Vaudremer.
  8. 27 Mus. Borb. XIII, pl. 49.
  9. 28 Theocr. Idyl. I, 55 ; Ovid. Metam. XIII, v. 701 ; Propert. Eleg. III, 9 ; Virg. Bucol. III, 44.
  10. ACAPNA. 1 Hom. Od. XV, 322 ; Aristoph. Pax, 1134.
  11. 2 Hom. Od. XVIII, 308 ; Il. XXI, 361.
  12. 3 Hom. Hymn. in Merc. 110.
  13. 4 Plut. Sympos. II, I, 17 ; Galen. De san. tuend. I. IV, I. VI, p. 427.
  14. 5 Mart. Epigr. XIII, 15.
  15. 6 Theophr. Hist. plant. XV, 10.
  16. 7 Cato, De re rust. 130 ; Plin. Hist. Nat. XV, 8.
  17. 8 Plin. Hist Nat. XI, 15 ; Colum, VI, 33.
  18. ACATUS, ACATIUM. 1 VII, 186.
  19. 2 De ver. narr. I, 5.
  20. 3 XI, 758 B.
  21. 4 Thuc. IV, 47, et Schol. ad h. l.
  22. 5 Polyb. I, 73, 2.
  23. 6 Oppian. Hal. V, 154 Suid. s. v.
  24. 7 Heliod. V, 37, p. 249 ; Agathias, III, c. 21, p. 57 ; Acta apostol. XXVII, 2.
  25. 8 Thuc. l. c.
  26. 9 Xen. Hellen. VI, 2, 27 ; Pind. Pyth. XI, 60 Lucian. l. c.
  27. 10 Böckh, Urkunden über das Seewesen des attisch. Staates, XI. u ; Theogris, 457.
  28. 11 Thuc. VII, 59.
  29. 12 Hist. Nat. IX, 30, 49.
  30. 13 Caes. 64.
  31. 14 Caes. 64.