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conjecturer qu’elle résultait d’un décret de la curie 21[1]. La qualité d’incola, en soumettant aux charges de la cité, n’en donnait pas en général les droits 22[2]. Cependant des inscriptions mentionnent un individu adlectus in curiam Lugdunensium nomine incolatus 23[3], et Justinien semble indiquer que telle est de son temps la règle générale 24[4].

G. Humbert.

Bibliographie. Roth, De re municipali Romanor. 1801 ; Sarigny, Gesch. des röm. Recht. in mittelalterI, 2 ; Zumpt, Commentationes epigraphicae, 1850, 4 ; Hegel, Geschichte der Stadtverfass. von Halien, 1847, 8 ; Becker-Marquardt, Handbuch der römisch. Alterth. Leipzig, 1, 1551, et II, 3, III, 1 ; Walter, Römisch. Rechtsgeschichte, Bonn, 1560, in-8, I, §§ 202, Ï81, 284, 301, 303, 3e éd. ; Kuhn, Die städische Verfass. des röm. Reichs, I, p. 3. Lips. 1864.

ADLECTIO ITALICA. — Cette expression se trouve seulement dans un texte de Capitolin 1[5], qui dit en parlant de Marc-Aurèle : Hispaniis exhaustis italica allectione, contra Trajani praecepta verecunde consuluit. Ce texte avait été entendu en général d’une faveur relative à l’enrôlement militaire. Cette exemption, propre à l’Italie, aurait été accordée par Marc-Aurèle à l’Espagne. Mais cette opinion nous paraît avoir été renversée dans ses fondements par un savant français, M. Revillout, qui a prouvé 2[6] que l’Italie n’était pas exempte du service militaire. Le même écrivain 3[7] a proposé une autre interprétation plus satisfaisante du passage cité de Capitolin. Cet historien, en effet, après avoir traité de l’administration de l’Italie, et en particulier des lois fiscales, a dû probablement avoir en vue dans ce passage une faveur relative à cet ordre d’idées plutôt qu’au service militaire. Il s’agit du jus italicum prodigué à l’Espagne par Vespasien et par trois princes d’origine espagnole, Nerva, Trajan et Adrien. Or, cette concession entraînait exemption d’impôts directs [immunitas] pour le territoire de la cité qui en était l’objet. Alectio italica désignerait cette faveur qui, accordée à un certain nombre de villes, aurait par cela même accru la charge des autres, iniquité réformée par Marc-Aurèle. En effet, Symmaque 4[8] indique par le mot adlectio l’idée d’une exemption des charges de la préture attachée aux fonctions sénatoriales. Enfin, le Code Théodosien 5[9] place certains employés du palais, au sortir de leurs fonctions, inter adlectos immunesque a senatoriis descriptionibus 6[10]. G. Humbert.

ADLECTOR. — Ce mot se trouve employé principalement dans deux acceptions différentes.

Il s’applique aux membres d’une corporation qui avaient reçu le droit d’élire d’autres associés pour compléter le collège. Deux inscriptions nous montrent des allectores cultores Silvani 1[11][collegium].

Il désigne encore un receveur ou collecteur d’impôts pour le fisc dans les provinces 2[12]. Une constitution de Valentinien et Valens, de 366, ordonne certaines mesures à prendre pour l’envoi en lingots du produit des contributions, afin de prévenir les fraudes des employés du trésor 3[13] (procuratorum allectorumque). Une inscription 4[14] mentionne un allector arkae galliarum, dont l’emploi paraît se rattacher au trésor du concile des Gaules (concilium Galliarum), réunion des peuples gaulois à Lyon, analogue au κοινόν Άσίαζ [koina].

G. Humbert.

ADLOCUTIO, allocution militaire. — L’allocution est une scène de la vie militaire fréquemment reproduite par les monuments romains. Dans les longues spirales de bas-


reliefs qui se déroulent autour de la colonne Trajane 1[15] et de la colonne Antonine 2[16], comme sur les murailles sculptées des arcs de triomphe 3[17], on voit le groupe des légionnaires dominés par leurs enseignes et la plate-forme élevée d’où le général, ayant à côté de lui le préfet du prétoire et quelquefois d’autres officiers, harangue ses troupes. Le même tableau se représente, avec les réductions qu’imposait l’exiguïté de l’espace, au revers d’un grand nombre de médailles romaines 4[18], presque toujours avec une de ces inscriptions : adlocutio, adlocvtio adv, adlocvtio cob… Nous donnons ici trois exemples de ces petites compositions 5[19]. Le premier (fig. 106), emprunté à un grand bronze de Galba, du Cabinet de France, est conforme au type généralement suivi. Les soldats y sont armés de hastes,
Fig. 106. Allocution militaire.
ils ont le casque et le bouclier ; au-dessus de leurs têtes on distingue l’étendard flottant (vexillum) des corps de cavalerie, l’aigle de la légion et le manipule [signa militaria]. Une estrade mobile (suggestum, suggestus 6[20], tribunal 7[21])) sert de piédestal à l’imperator. Quelquefois il montait sur un tertre couvert de gazon (caespiticium tribunal 8[22], tribunal viruli caespite instructum 9[23]). Les deux autres figures sont empruntées à des monnaies de Posthume, du même cabinet. L’un (fig. 107) 10[24], montre l’empereur debout sur le suggestus ou tribunal, entouré, comme dans l’exemple précédent, des troupes de toutes armes ; on distingue les chevaux de plusieurs cavaliers ; les porte-enseignes sont rangés des deux côtés du tribunal. Il en est de même dans la plupart des bas-reliefs cités plus haut qui

Fig. 107. Fig. 108. Allocutions militaires.

reproduisent la même scène. Les officiers qui, d’habitude, accompagnent l’empereur, sont remplacés sur la médaille par deux femmes, sans doute la Fortune et la Victoire qui le couronnent. L’autre médaille (fig. 108) 11[25] est un grand bronze du même empereur, que l’on voit, au revers, prononçant une allocution ; il est à cheval et tient la main droite étendue, comme on représente ordinairement les orateurs.

Le témoignage des historiens, d’accord avec les monuments, nous prouve que les généraux romains adressaient

  1. 21 Cf. Plin. Epist. X, 115.
  2. 22 Cf. Aggenus Urbicus, p. 84.
  3. 23 Orelli, 3709, 3723 ; Becker, III, 1. p. 383.
  4. 24 C. 6, eud. X, 30.
  5. ADLECTIO ITALICA. 1 Marc. Aur. Ï7.
  6. 2 De Romani exercit. delectu et supplemento, Paris, 1845, p. 23.
  7. 3 Revue historique, 1850, p. 370, note 4.
  8. 4 Epist. VII, 96.
  9. 5 c. I, Cod. Theod. VI, 23.
  10. 6 C 8 et 10, De dum. VI, 24. C. I, tit. xxv et C. 5, De agent. in reb. VI, 27, éd. Hanel ; Kuhn, Die städt. Verfass. des röm. Reichs. I. Lips.. 1861. I, p. 210 et sqq.
  11. ADLECTOR. 1 Orelli, 779 et 490 : cf. 1878.
  12. 2 Orelli, 369 et 3654.
  13. 3 C. 12, Cod. Theod XII. 6. De susceptor praep. et arcar. ; Gothofred, Comm. ad Cod, Theod.
  14. 4 Orelli-Henzen, n" 6950 ; Boissieu, Inscr. de Lyon, VII, 16, p. 25S ; Gruter, 472, 1 ; Boissieu, l. l. VII, 17. p. 260 ; Rein, in Pauly, Real Encycl. t. I, p. 173. 2e éd. ; Mommsen, in Annal. dell’Instit. Archeolog. 185, p. 63 et suiv. ; Kuhn, Städt. Verf. II, p. 424 et 425, Leipzig, 1865.
  15. ADLOCUTIO. I Bartoli, Col. Traj. pl. viii, ix, xx, xxxii, xxxviii, lvii xcvi, xcvii, xciii.
  16. 2 Bellori, Col. Ant. pl. vii, x, xi, xxxvi, lvi, lvii, lviii, lxii, lxv.
  17. 3 Bartoli, Vet. arcus Augustorum, pl. x, vii, xxiv, xxv, xxvi.
  18. 4 Rasche. Rei monn. Lexic., s. v.
  19. 5. Cohen,.IA, Mono. imp. t. I, Galba, n° 101.
  20. 6 Caes. Bell. Gall. VI, 3 ; Tac. Ann. I, 44.
  21. 7 Hygin. De mun. cast. 11.
  22. 8 Vopisc. Prob. 10.
  23. 9 Plin. Paneg. 56.
  24. 10 De Witte, Recherches sur les empereurs qui ont régné dans les Gaules. Posthum., n° 7 ; Cohen. Mono. imp. t. V, pl. i.
  25. 11 De Witte, l. l. no 37 ; cf. Cohen, l. l. t. II, pl. vi, et ii. 786-789.