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permet sa conservation ’. Ainsi Vesta se confond avec Tellus Matei Tune et l’autre avec la Grande Mère des Dieux. Une tradition fait de palès, divinité des pâtu- rages par lesquels s’est opérée la transition de la vie sauvage à la civilisation, une incarnation soit de Vesta, soit de Magna Mater’-. Preuner en a tiré cette défi- nition, où se résume la nature totale d’Hestia- Vesta : une divinité non du feu en soi, mais du feu déter- miné par les conditions de la vie sédentaire et de la religion ^

Cette divinité, transplantée dans l’Italie centrale, s’y présente à nous, sous ses traits exclusivement latins, avec un relief plus accusé et avec un caractère plus imposant qu’en Grèce. Toutes les traditions concor- dent à nous la montrer en pleine faveur dès les temps les plus reculés de la royauté ^. Les uns attribuent l’ins- titution de son culte à Romulus, qui l’aurait importée d’Albe-la-Longue ; les autres lui donnent une origine sabellique et en rapportent l’organisation à Numa : elle semble, en elTet, avoir été partie intégrante de la religion organisée, d’après la légende, par ce roi, en qui s’incarne la piété des premiers âges. Fait remarquable, si ce culte a été le patrimoine commun des nationalités de l’Italie centrale, il n’en existe point de traces anciennes en dehors du Latium°. L’institut des Vestales [vir(10 ves- TALisj, qui fut, après le collège des Pontifes, l’organe le Jj^. plus éminent, le plus populaire et le plus efficace de la piété romaine, en est la preuve par excellence. A Rome seulement, Vesta est une divinité d’ordre politique et national ; la faveur dont elle jouit à l’abri de la maison des Vestales, sous le regard et l’autorité du Roi, plus tard du Grand Pontife, explique qu’elle prend aussi la première place, avec les Pénates et les Lares, au foyer de la famille ’^. Si, dans chaque maison, le foyer qui sert et à la préparation de la nourriture et à l’oblation des sacrifices est le centre d’où l’action divine se répand sur la famille entière, le feu qui brûle dans Vulriiim de Vesta est l’àme de la ville entière Il y prend même une telle importance que, partout ailleurs dans le

  • Cic. de dom. 57, lH ; Sencc. Conirov. IV, 2, i : Fest. p. iGi ; Arnob.

et Isidor. l, c. Cf. Jordan. Der Tempet dur Ve«/a, p. 5i ; Preller-Jordan, Jtoem. Mytiiol. il, p. 173 s<|. — 2 Serv. Georg. III, I ; cf. I<yd. De mens. 138, 18. — 3 Uestia- Vesta, p. 42 sq. Cf. Augusl. Civ. [). IV, 1 : cum tamen saepe Vestam nonnisi ignvm esse perliibeant pertinentem ad focos. — * Diou. Hal. Il, 6G ; il attribue l’iustilulion du culte à Romulus ; chez T. Liv. I, 4, 1, où Rliea Silvia est Vestale, la religion de Vesta serait môme antérieure et venue d’Allie à Rome ; ibid. I, iO, 3. L’upiiiioD la plus plausible esl celle rjui la lait.later de Numa : Plut. Xum. 1 i ; Ov. Fast. IV. SJT ; VI, 203, et Trist. 111,1, 30 ; Virg. Geory. 1. 19« .

— ô Wissowa, Op. cit. p. m. Jordan, Op. cit. p. 79, insiste sur la limitation quasi absolue du culte de Vcsla, dans la Iiaule antiquité, à Rome et au LaLiuin. Toutes les tentatives en vue de le découvrir bors du sol latin ont jusqu’à présent échoué, même celle de Brial, Tab. Eug. lit. qui a cru le trouver chez les Ombriens ; cf. la Yesmma celtique chez Buecheler, Cmbrica, 1G2 et 33 ; elle na rien de commun avec Vesta. — 6 Ou a remarqué avec raison que VAedi^s Vestae du Forum se trou- e en de hors de la Homa ffuadrata et i|ue son cmpla- cemeni n a pas dû être délimité par les augures, preuve manifesie ’jue le cidle de

!a déesse précéda l’introductiou à Rome de la science augurale venue d’Élrurie. 

V.Scrv. odAen.VU, 133 ; Dion. Hal. II,G5 ; Aul. Gell.XIV, 7, 7, et Lanciani, A’o<i :ie d. scavi, 1863, p. 471 ; Thédenat, Forum, p. 8«. Cf. Gilbert, Ûp. cit. I, p. 301 sq.

— 7 PES.iTES, IV. I, p. 376, 379, passim ; Cic. Leg. Il, 8, 20 ; ignem foci publici sempiternum. Tac. Ann. XV, 41 : delulmm Vestae cum Penalibus populi Homatii.

— » Pour Lavinium, Serv. ad Aen. Il, 296 ; III, 12 ; Macr. So(. 111,4, 11 : pourAlbe, JuT. IV, 61 ; Ascon. p. 35 ; t’oTp. inscr. lut. VI. 2172 ; cf. Orelli, 1393, inscription trouvée sur le Slont Albain, en l’honneur de Jupiter, Minerve, JuiioD et Vcsla appelée Albann. Pour Tibur, Corp. inscr. lai. XIV, 3677, 3679. Le souvenir de la Vesta Albana se retrouve encore chez Lucan. IX, 990 ; Slat. Silv. IV, 5, 2 ; pour Tibur, Marini, Atti, p. 6 et 22, n. 39. Dans une roonogiaphie récente (// sacerdozio deth Vestali Hon.ane, FlorCLCc, 1913 ; cf. Meeuc Archiolog. 1913, 11, p. 429), M. Gianelli reprend comme fondée I opinion latine, que le culte de la Vesia des Latins esl une importation de celui de Ucstia, entre 550 et SOO avant J.-Chr.

Latium, il n’est plus, aux temps historiques, que le souvenir vague d’une religion tombée en désuétude. C’est le cas pour Albe, Lavinium, Tibur et Préneste, d’où Vesta peut être venue à Rome, où elle entra ensuite dans l’ombre que projetait sur elles le développement politique et religieux de la grande ville ^ L’affirmation de Preller que chaque ville du Latium avait sa Vesta et ses Pénates est tout au moins probable ; mais plus éta- blie est l’opinion que la Vesta de Lavinium fut la plus ancienne de l’Italie, ainsi que le Palladium qui, à Rome, devait être inséparable de son culte [minerva, fig. 5076] ’. iNous avons montré ailleurs [pénates, p. 376 sq.] que Vesta, dans le temple de la / ?e(7îa, devint le symbole col- lectif de leurpuissance tutélaire etqu’en elle s’incarnaitla

«"puissance céleste qui veillait sur les destinées de Rome et de son empire’". La religion de Vesta n’est si vénérable dans chaque foyer particulier que parce qu’elle y reçoit le rayonnement de V Atrium commun de la cité. Lors de lafondation del’empire, la Vesta Publica populi Romani Quiritium, dont le culte était commis aux Vestales’^ sous la surveillance du Grand Pontife, trouva comme ’ une succursale dans la maison même de l’Empereur sur le Palatin ; elle y devint l’objet d’une sorte de religion dynastique, parallèlement avec la religion nationale dont le siège était à la Rer/ia ". C’était comme un retour

,-hùx temps où le Roi était préposé à la religion du foyer public, où les ministres de Vesta, Flamine et Vestales, l’assistaient pour la célébration du culte, tandis que dans chaque demeure particulière le père de famille, entouré de ses enfants, accomplissait les rites domesti- ((ues, dont le premier était l’entretien du feu sacré [CAMILLI, 1,2, p. 8581 ’-.

A Rome plus encore qu’en Grèce, et cela de toute anti- quité, Vesta était considérée comme une divinité de premier rang et classée parmi les douze grands dieux. Tout d’abord elle fut honorée en compagnie de janus PATER (III, p. 010 sq.) ’^ Le prêtre attitré de ce dernier était le rex sacrorum, qui, chaque année, à jour fixe, recevait la visite des Vestales lesquelles l’in-

L’événement aurait ainsi précédé d’un dcmi-siôcle l’introduction des Livres Sibyl- lins [siifYLLA, IV, 2, p. 1296, A]. Si l’on songe que le sacerdoce des Decemviri s. f. resta toujours un organe erotique, malgré son importance, on admettra difficilement que celui des Vestales, si intimement lié à la religion des Pénates, au collège des Pontifes, à toutes les institutions les plus vénérables du culte romain, ait pu, dans le inéme temps, passer de la forme hellénique au caractère indigène et Vesla venir, selon le mot de Varron, la dearum maxinia des Romains. Cf. S. Rciiiach, Itev. Archéol. l.lc. — » Preller-Jordan, lloem. Mythol. Il, 160 sq. ; mais il a tort d’ajouter qu’il eu est de même pour d’autres peuples de l’Italie. Varron, Ling. /.ut. V, 74, la coraple parmi les divinités salielli- ques. Gilbert, Geschichte uud Topogr. Itom. I 349, not. I, considère la Vesla de Lavinium comme la plus aiicienue de l’Italie et renvoie à Macrobe, III, 4, 11. Cf. Scrv.arf Aen. 11,296 ; 111, 12 ; Vil, l’JO ; VIII, 664 ; Scliol. Veron. Aen. 1, 259. Pour le Palladium, v. Cic. Phil. XI, 10, 24 : Id signmn qiiod de caelo delapsum Vestae custodiis continetur. — ") Cicer. Catil. IV, 9, 18 ; Harusp. resp^ 6, 12 ; C. i. /. X, 5375. Cf. SchHcgler, Hoem. Gescli. I, p. 317 sq. not. 4 et 5. — *’ Le calendrier de Cumes, pour commémorer le jour où Augusie fut revêtu de la dignité de Grand Pontife {6 mars, an 12 av. J.-C), mentionne une Supplicatio Vestae dis publicis Penatibus P. H. Q. La dédicace du temple nouveau sur le Palatin est célébrée le 28 avril. Cal. Praen. ; cf. Wi>soa, Hernies, XXII, 44 ; Religion und Kullu.i, p. 144 et p. 69. Cf. Suct. Oct. 31 et l’an. PESAFKS, p. 381, not. 9. Le Pontifex Maximus est le représentant et le chef des Vestales dans les affaires du culte et, à ce titre, il est appelé sacerdos Vestae, C. i. l. X, S375 ; cf. Ov. Fast. 111, 417 sq. Pour son inlervinlion disciplinaire, v. Dion. liai. 11, 66 ; Hist. Aug. Heiiog. 6. Il priait de concert avec les Vestales pour le bien de TÉlat : Hor. Carm. III, 30, 809 ; Lyd. De mens. IV, 36 ; Ov. Fast. V, 573 : Vestae sacerdos. — 12 Cic. Leg. 11, 8, 20 ; Dion. Hal. II, 60 ; Flor. I, 2. Cf. Gilbert, Op. l. I, p. 547 sq. — 13 Serv. Aen. l, 592 : ipsa et Janus in omni- bus sacrificiis iniocantur. Cf. Preuner, Hestia-Vcsta, p. 29 ; Wissowa, Jlelii/ion und Jiullus, p. 91 ; 141 ; Juv. VI, 3.’C : et faire et tmo Jamim Veslilmijue rot/abat.