Page:Dictionnaire des Antiquités grecques et romaines - Daremberg - V 2.djvu/142

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

VES

— 759 —

VES

, porte pas le deuil des morts qui lui sont apparentés et, ainsi qu’au llamine, il lui est défendu de louclier un cadavre. De même le corps d’une Vestale défunte n’est pas une souillure, mais une relique sainte, en qui conti- nue de résider la divinité ; on l’enterre dans l’enceinte même du pomoerium, comme les corps des empereurs divinisés ’. La défense édictée par les législateurs des XII Tables d’inhumer ou d’incinérer les corps dans l’intérieur de la ville était levée, sans restriction, pour les Vestales^. De son vivant, en justice, elle est admise à témoigner sans prêter serment ; elle dispose de sa fortune et peut tester sans restriction d’aucune sorte ’.

IV. Costume, COIFFURE, représentations. — La condition sociale, la vie, les fonctions religieuses classaient à part les Vestales, non pas seulement dans la société romaine, mais même dans le groupement des ministres du culte ; il était donc tout naturel qu’un habillement spécial les désignât à la vénération des foules. Ce costume, aux temps où les monuments artistiques, statues, bas-reliefs, monnaies, nous en ont conservé les détails *, est un com- promis fort heureux entre la toilette de la femme patri- cienne et le vêtement qui suggère l’idée d’une fonction religieuse. D’abord, il les désigne nettement comme femmes^ ; il est en somme le même que celui des fian- cées, c’est-à-dire celui des femmes de l’ancien temps, dont il perpétue la tradition. LasTOLA(t. IV 2, p. 1521) est celle des matrones, ainsi que la PALLA(«6«rf. l,p. 292, fig. 3181), l’une et l’autre en laine blanche, peut-être bordées de pourpre.

La partie originale est constituée par la coiffure, par l’arrangement des cheveux et l’emploi d’une sorte de voile appelé suffibulum t. IV, 2, p. 1361), que Festus définit ° : " un vêtement blanc, bordé, quadran- gulaire, pius long que large, que les Vestales mettent sur leur tête lors- qu’elles sacrifient et qu’elles attachent fig. 7417. —Coiffure sur la poitrinc avec une agrafe (/(’^«/a ; ».

des Vestales. i^ • i . . , . j i

Parmi les statues exhumées dans les ruines de l’Atrium une seule nous donne la repré- sentation exacte de ce voile*. La plupart d’ailleurs (six sur dix) sont sans tète el les autres portent à même le suf/ibulum sur la chevelure, attaché par des fibules invisibles. Celui qui distingue la statue la plus an- cienne parait avoir passé de mode et avoir été rem- placé par un autre plus commode, sinon plus décoratif.

1 LcsTiUTio, t. UI, i, p. 1*7 ; Aulu-Gcll. X. 15, 24 — 2 Serv. ml Aen. XI. i06 ; il est vrai que, sous l’Empire, les Vestales n’usaient pas toujours de ce droit. V. Uomrascn, Corp. inscr. lat. I, p. 185. Cf. Hreuner, Uesiia- Yesta, p. 300 sq. ; pomihcbs, IV, 1, 576 B. — 3 Aulu-Gell. VI, 7 ; X, 13 ; .Sen. ConIroM. V(, 8 ; Tac. Ann. il, 34. Depuis Auguste, le jus Irium tiberorum leur était conKré ; Plut. .Vumo, 10 -, Dio Cass. LVI, 10. V. d’autres textes relatifs aux privilèges des Vestales : Cic. Dep. III, 10 ; Aulu-Geil. X, 15, 31 ; I, IS, 9 ; Scnec. Controi-. VI, 8 ; Plut. Numa, 10 : Gains, I, 145 ; Dio Cass. Il, 67 ; et les réserves formulées par Gilbert, op. t. II, p. Ui’sq. note 3. — 4 Les représentations que fournit la numismatique ne suffisent pas à nous donner une idée sûre et complète du costume ; il n’y a d’exception que pour le médaillon de Julia Domna, celui de BcUicia îlodesla et le Imsle de Neratia (pierre gravée, Musi’-e Carpeijna). Cf. Visconti, Mm. Pio-Clem. t. III, pi. A. ; Jordan, p. 43 sq. ; Lanciaui, Notizie d. tcaii, 1884, i9 sq., lab. XVIlI, 4-S. — o Jordan, ber Tempet, etc., p. 55 ; elles sont en réalité les seules prétresses qui figurent dans l’organisme public de la religion de Rome ; elles y jouent le rôle des déléguées par l’État dans les fonctions de la mire de famille ; i4irf. p. 56. Cf. Febrie, Op. l. p. il". — 6 Fcsl. 348 a ; Pauly, /. c. p. 340. Cf. Jordan, ibid. p. 54. Sur le détail des bandeaux, t. le même, p. 47. — ’i Elles sont au nombre de dix ; ibid. lab. VIII el IX. — * Jordan, ibid. lab. IX, fig. 10 ; reproduite de profil clici Thédenat, Le

. :Hs. — Statu de Vestale.

Sous ce voile, couronnant le front, apparaît la cheve- lure partagée en six tresses ou bandeaux, comme celle des fiancées. On en trouvera le détail à l’article infula, p. 315, fig. 4056et40.j7. Outre les têtes des trois statues’", un médaillon à l’effigie de Bellicia Modesta, v{irgo) V{estalis), coiffée du capital (t. 1,2. p. 897, fig, ll-W), achève de nous initier aux détails de la coiffure ". Les six bandeaux parallèles (par- fois quatre seulement sont visibles) s’étagent sur le front sous le suffibulum el leurs extrémités se réunis- sent sur l’occiput où ce voile les recouvre. Varron parle de cette coiffure comme d’un emblème de virginité [coma, I, 2, p. 1367]. Le plus sou- vent une tresse passe sous le premier bandeau, celui qui en diadème coiffe le front, ce qui démontre que les Vestales ne se faisaient pas couper ras la chevelure, quoiqu’on le soutienne par- fois, à tort (fig. 7417)’^. Au temps de Piaule, les six ban- deaux étaient le privilège des matrones dès le jour du mariage ; pour se coiffer elles employaient la uasta CAELiBARis (t. III, 2, p. 1633)". Un bas-relief provenant d’un autel de Sorrente représente probablement cinq Vestales (une mutilation de la pierre a supprimé la sixième) ainsi drapées et voilées".

Les statues conservées dans la maison de Vesta sont de grandeur naturelle ou s’en approchent ; les plus récentes sont postérieures à Hadrien, peut-être même du m" et du iv siècle ; celles qui sont sans tête ont également perdu les mains et même les bras. Des autres, l’une tient dans la main gauche une touffe de pavots ; la droite réunit sur la poitrine les plis du voile tombant ’^. Celle que nous reproduisons (fig. 7418) n’a plus de bras ; la tète en est singulière- ment expressive ; le suf/ibulum couvre directement la chevelure et ne dépasse pas les épaules (fig. 40.56)"^ ; il ne faut pas le confondre avec le voile formé par le pan du manteau ramené sur la tête (fig. 7418j ; cette

Forum /ïfjmain, p. 3 :^7, ftg. 57. II y a des traces d’oxydation sur la poitrine, laissées sans doute par un collier en métal. C. Wusclier-Becclii, bie Kopftrackt der Vestalinnen und das Vélum ihr ijott. fjeweikten Junfjfrauen, Itoem. Quar- talschrift, 1902, p. 3i3 sq. — 9 Des allusions à ce voile sont probables chez Prop. V, 11, 54 : carbaêu» alba ; Val. Max. I, 2, 7 ; Dion. Halfc. II, 68. Le cosluroe plus récent nous est donné par les autres statues ; la plus complèle, reproduite par Thédenat, fig. 56, p. 325 {— noire lig. 7HS), porte chez Jordan le n° î, tab. VIII. — lO Jordan, lab. VIII, 1, 2 et 3. — " Buonarotli, Medanl. ant. XXXVI, I. Cf. Varr. ling. lat. V, 130, et chez Festus, 339 a, 23 : senis crinibus nubentes ornantur. V. chez Jordan, tab. X, lig. 11. la coifTure vue par derrière = (notre fig. 7417, d’après Baumeisler, Antike Denkm. fig. 2171). — 12 V. Jordan, Op. t. p. 48 : « II est superflu de constater f|ue nos statues fournissent la preuve, sans réplique, (|ue les Vcslales n’ont pas tondu ras leur chevelure naturelle. <• Cf. Lauciani, ÎVotizie d. scavi, 1883, p. 461. — " V. lig. 4871 el les notes 10 sq. ; Plaut. Most. 224 sq. ; A/ites glor. 790 sq. Cf. Tib. I, 6, 67 : Ov. Pont. III, 3, 51 ; cf. Serv. ad Aen. VII, 403. — U Gerliard, Antike Ditdwerke, tab. 2i (ou des matrones romaines ?) ; s. Keinach, Itépert. de reliefs. III, p. 421. CD. — 1^ Jordan, Op. l. tab. VIII, a- 4. — 16 Voir aussi Thédenat, Op. l. p. 327, fig. 57. — " Ibid. p. 325, Og. 36.