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On commence la cueillette 1[1] par le côté du vignoble exposé au soleil 2[2]. Des chefs de travaux (antistites) surveillent les vendangeurs et leur indiquent au besoin les ceps dont il faut cueillir les grappes (fig. 7501) 3[3]. La tâche est facilitée si l’on a pris soin de ne pas mélanger dans

Fig. 7502. Silènes faisant la vendange.

la même vigne des espèces plus ou moins tardives. Les vendangeurs (τρυγητήρ 4[4], vindemiator 5[5]), parmi lesquels on compte souvent des femmes 6[6] cueillent les grappes à la main, ou plus aisément avec une serpette 7[7] (fig. 2867). La vigne étend rarement ses branches au ras du sol

Fig. 7503. La récolte des dattes.

[VINUM] 8[8] ; aussi faut-il, pour atteindre les raisins, se hisser sur de hauts escabeaux (fig. 7502) ou sur des pierres 9[9]. Lorsque la vigne est enlacée aux arbres, on

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grimpe sur les arbres (fig. 1432) 10[10], on se sert d’échelles (fig. 7512) 11[11]. La cueillette au sommet d’arbres aussi élevés que le peuplier n’est pas sans danger : en Campanie, le vendangeur stipule qu’en cas de chute mortelle il sera enseveli aux frais du propriétaire 12[12].

On trie au fur et à mesure le raisin qui sera mangé comme fruit et celui dont on fera le vin 13[13]. Les grappes sont mises dans de grands paniers d’osier κανθήλια 14[14], σταφυλοβόλεια 15[15], corbulae 16[16] (fig. 1727, 1942, et 7501 17[17]). Comme le pressoir est d’ordinaire à proximité du vignoble [TORCULAR], on y porte aussitôt les paniers de raisins 18[18] ; sinon on les charge sur des chars 19[19].

La vendange est une fête 20[20], qui s’accompagne de musique, de chants et de danses 21[21]. Les vendangeurs reçoivent le vin à discrétion 22[22].

Les termes grecs et latins s’appliquent encore à la cueillette des fruits autres que le raisin. Pour les olives [OLEA] 23[23], on les ramasse à terre (fig. 5391), après les avoir abattues à coups de gaule (fig. 5385), ou bien on les cueille sur l’arbre en se servant d’une échelle (fig. 2094) 24[24]. Les coings, comme les olives, s’abattent à coups de gaule 25[25]. Dans une peinture de la villa Pamfili, un homme, portant une corbeille sur le dos, grimpe à un dattier pour en cueillir les fruits 26[26] (fig. 7503). A. JARDÉ.


VINDEX. Le vindex est celui qui prend fait et cause pour un débiteur soumis à la manus injectio de son créancier, ou pour un citoyen cité en justice (in jus vocatio). Dans l’un et l’autre cas, le vindex intervient en faveur d’une personne qui est appréhendée au corps pour être conduite de force dans une prison privée ou devant le magistrat. Le vindex s’interpose entre l’auteur et la victime de la violence. Son rôle, dans le premier cas, est caractérisé par l’expression manum depellere 1[27]. Il repousse la force par la force.

Tel était l’état primitif du droit. On en retrouve la trace dans la disposition de la loi des Douze Tables relative à celui qui in jure vindicit sur un judicatus 2[28] ; dans une clause de la loi de la colonie Genetiva Julia relative à celui qui vim facit 3[29], et dans la dénomination de vindex qui, d’après Festus, désigne celui qui vindicat pour libérer une personne appréhendée au corps 4[30]. Ce sont là des allusions très nettes à la lutte qui s’engage entre le créancier et le vindex, lutte qui, à l’ori-

VINDEX.

  1. — 1 Description de la vendange, Hom. Iliad. XVIII, 561 ; Hesiod. Scut. Herc. 286-301 ; sur les préparatifs, Cat. De agric. 23.
  2. — 2 Varr. R. rust. I, 54.
  3. — 3 Colum. III, 21. Le surveillant porte à la main un bâton recourbé (sarcophage du musée de Latran, Roller, Catac, de Rome, 1, pl. xliv, fig. 3 ; Duruy, Hist. des Rom. VI, p. 229, d’où est tirée notre fig. 7501).
  4. — 4 Dans la Paix, Aristophane appelle son héros le « vendangeur, Τρυγατοζ.
  5. — 5 Varr. De 1. lat. V, 94.
  6. — 6 Demosth. Contr. Euboulid. p. 1313, 45 ; Pollux, VII, 32, 141.
  7. — 7 Virg. Aeneid. VII, 179.
  8. — 8 Gerhard, Etrusk. Spieg. pl. cccxiii ; cf. la miniature de l’Hortus deliciarum dans Gaz. arch. X (1885), pl. vi.
  9. — 9 Satyres agenouillés pour cueillir les raisins d’une vigne basse, Campana, Oper.di plast. pl. xxxrx ; Robden, Terrakotten, p. 264 ; Gerhard, Auserl.Vasenb. I, pl. xv ; Duruy, Hist. des Grecs, II, p. 238 notre fig. 7302.
  10. — 10 Rom. Mitt. XI (1896), p. 81. Autres scènes de vendange : Labarte, Hist. des arts industr. I, pl. xv ; Daller, Op. 1. I, pl. xxi ; Clarac, Musée sculpt. 447, 82t [TELLUS, p. 82] ; R. Rochette, Mém. de l’Acad. des inscr. XIII (1818), p. 125 sq. ; Billiard, La vigne dans l’ant. p. 1, fig. 3 ; p. 147, fig. 64 ; p. 425, fig. 135. En Égypte, Rossellini, Mon. Civ. II, pl. XXXVII.
  11. — 11 S. Reinach, Répert. reliefs, III, p. 293 ; Bull. comun. 1874, pl. iii-iv. Satyres vendangeurs grimpant à la vigne même (fig. 7502, 6134). Cf. Espérandieu, Bas-rel. de la Gaule, III, n° 1760 ; Billiard, Op. 1. p. 427, fig. 136 ; E. Cuisant, Catalogue des sculptures du musée de Bruxelles, p. 64, n° 52.
  12. — 12 S. Reinach, Op. l. p. 294 ; Veriniglioli, Iscr. perugin. II, pl. Ix, 63 ; Bottari, Pitt. e sculp. sacr. I, p. 125 ; Wilpert, Le pitt. delle catac. rom. pl. ccxlv ; Duruy, Hist. des Romains, VII, p. 191 ; Furtwängler, Ant. Gem. III, pl. xxxvi, fig. 19 ; Billiard, Op. l. p. 237, fig. 88 ; p. 261, fig. 95 ; p. 423, fig. 133 ; Michon dans Revue biblique, janvier 1913, fig. 5.
  13. — 13 Plin. XIV, 30.
  14. — 14 Varr. R. rust. I, 54.
  15. — 15 Geopon. VI, 11.
  16. — 16 Poll. VII, 151 ; Bekker, Anecd. gr. I, p. 303, 15.
  17. — 17 Cat. De agric. 13.
  18. — 18 Bartoli, Sepolcri dei Nasoni, pl. xxiv, Sur un fragment sculpté de Sens (Espérandieu, op. l. IV, p. 53, n° 2852) figurent des instruments qui semblent se rapporter à la fabrication du vin des corbeilles, soit vides, soit pleines de fruits, des cuves en bois de forme tronconique ; trois tas pourraient bien être des tourteaux de marc de raisin.
  19. — 19 Sur la plupart des monuments figurés, les scènes de vendange avoisinent les scènes de foulage et de pressurage ; cf. nos fig. 4762, 7502 ; S. Reinach, Op. l. III, p. 293, 3 ; 294, 1.
  20. — 20 Roller, Op. l. 1, pl. xliv, fig. 3 ; Duruy, Op. l. VI, p. 229 ; Billiard, Op. l.. pl. xiii. Cf. Espérandieu, Op. l. III, p. 22, n° 1766.
  21. — 21 Plin. Epist. VII, 16.
  22. — 22 Hom. Iliad, XVIII, 561. On sait comment les fêtes des vendanges prirent à Athènes une extension particulière (Sittl, Dionys. Treiben und Dichten ; Foucart, Le culte de Dionysos en Attique, Mém. de l’Acad. des inscr. XXXVII, 1904) et donnèrent naissance à la poésie dramatique (Maur. Croiset, Hist. de la litt. gr. III, p. 51 et 416).
  23. — 23 Vindemia olearum, Plin. Nat. hist. XV, 5 ; cf. Aristoph. Vesp. 712.
  24. — 24 Cf. De Laborde, Mon. de Fr. l, pl. lxxiii.
  25. — 25 Relief de la collection Mattei, S. Reinach, Repert. de rel. Il, p. 452, n° 1. Un relief de sarcophage (Espérandieu, Op. 1. III, p. 42, n* 1761) représente, en même temps que la vendange, la cueillette des poires ; un Éros, grimpé dans l’arbre, coupe les fruits avec une serpette.
  26. — 26 Rom. Mitt. V (1890), p. 15 (Keller) = notre fig. 7503. Au musée d’Alexandrie, figurine grotesque de terre cuite, singe costumé en paysan, avec un panier au bras gauche et cueillant des dattes (Breccia, Alexandrea ad Aegyptum, p. 272, fig. 139).
  27. — 1 Gaius, 1V, 21. Un geste analogue était usité cher les Chaldéens ; cf. Édouard Cuq, Le droit babylonien au temps de la première dynastie de Babylone, 1909, p. 430.
  28. — 2 A. Gell. XX, 10, 15.
  29. — 3 Corp. inscr. lat. H, 5439, c. 6, 1 Si quis in eo vim faciet.
  30. — 4 Fest. s. v. Vindex, ab eo qua vindicat, quominus is qui prensus est ab aliquo teneatur.