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• comme fils de la seule Héra par les récits des Argonau- tiques d’Apollonios de Rhodes ’ ; divers autres textes récents le représentent aussi comme àitoÎTwp ’ ; c’est seulement à une époque de décadence qu’on cher- cha il expliquer ce cas exceptionnel en inventant des rapports illicites de Zeus et d’Héra, antérieurs à î’hiérogamie’ ; Héra aurait caché sa faute, en prétendant Héphaistos né avEu [jleiçeoj ;- Les anciens ne se sont point accordés sur la parenté du dieu ; les diverses tradi- tions relatives à sa famille la plus directe avaient même amené une dissociation de sa personnalité’. A l’occasion, on n’a pas manqué non plus de représenter Héphaistos comme « autochthone » ou né de la terre °, fiction qui, du moins, reporte encore l’esprit vers les patries les plus primitives du dieu ; en Lycie et à Lem- nos, personnifiant le feu souterrain, il était considéré comme habitant sous le sol ; il se manifestait sous la forme d’émanations enflammées, comme ailleurs par les sources chaudes des geyzers ".

Quelles que fussent les contradictions des récits mythiques à propos de sa naissance, le dieu ne tarda pas à devenir le héros de multiples aventures. C’est vraisemblablement un hymne homérique, comme on l’a reconnu ’, qui, le premier, avait pris pour sujet la chute d’Héphaistos, précipité du hautdu ciel, sa réception chez Thélis, les légendes d’Iléra enchaînée et du retour sur l’Olympe. L’histoire de la chute vieni la première en date dans la vie du dieu. Les traditions de ’ Iliade ne s’ac- cordent pas sur cette aventure etprésentent deux versions principales. Suivant la première ’, Héphaistos, déjà grand, étant intervenu dans une scène de ménage entre Zeus et Héra, Zeuslesaisit par lepied et le lance du seuil de l’Olympe. Il tombe tout le jour.. l’heure du couchant, il va choir à Lemnos, où les Sintiens le recueillent. On a remarqué justement^ que cette forme de la légende devait être dérivée et comme symbolique : Lemnos a été une des premières patries d’élection du dieu nou- veau en terre hellénique ; c’est de là, a-t-on pu dire en interprétant géographiquement la tradition, qu’il était « apparu à l’horizon de la Grèce » ’". Le second récit de VIliade" attribue à Héra même le geste fatal le dieu

«1,589. elScholies. — 2Lucian. Desacrif. 6 ; .onn. IX, 228 ; Hygia. Argument. Fabul. I (sino paire). Aulres telles cilés p»r Malien, I. c. p. 342. — 3 Scliol. ad lliad. I, 609 (Kuslalli. 987) ; cf. Jliad. XIV, 295 sq. ; Eiiphoriou, i’chol. ad Iliad. XIV, 595, attribue la même naissance à Prometheus ; Eîapp, dans Roscber, Lexic. d. itythol. 20*8-i049,a fait le relevé des leilcs relatifs à celle naissance. — 4 D’a- près Cicéron, De nalura deor. 111, 55, et Lydus, De mens. IV, «6, on pourraildislin- guerjusqu’à quatre Héphaistos : !• H. fils de Caelus (Cicéron), ou filsd’Ouranoset d’Héméra (Lydus), père de l’Apollon Falroos (dont Allièna serait la mère) ; 2» H. fils du Nil, identifié avec Ptah ; on sait que Ptah, démiurge, considéré comme ayant formé l’homme du limon de la terre et l’ayant modelé à la main, était en tôle de la liste de Slanélhon et passait à Meraphis pour le premier roi d’Égrple. 3« H. lils de Zeus, ou de Chronos (Lydus) et d’Héra. *’ H. •■ Menalio nalus, qui lenuit insulas, propter Siciliam, quae volcaoia nominabantur ». Lydus nomme té-«pto ; S Mi^To :; i Si»i».mTr.î U oî ’HçotTiigtSt ; a ! vii««-.. — i Harpocration, s. r. Aà-i/«o»i ;. Ejt/Sôvtov xa : ’HoatffTov l,t ^n ; çav^-.ott. — 6Cf. ci-après [sources chaudes deKausa, du Ponl, p. 990 et note 3]. — ^ ’Wilamowilz, Bephaittoi, 210 ; Plat. Jlespublic. 3TS D : ’H»« ; Si Stonoiî ûi ;ô uUoî «ai ’Hom’nsu pi’ijiîit l«b luaTOo ?, nAlovM ? tSi niiTf !

TuiTTonivT, i^ùviiv, xa ! «toiiayCn ; Sua ; "Oimfoî «■iio{,ixiv. Cette allusioD de Platon mélange les deui traditions homériques, dont l’une [H. p’-iii ; Ctt^ îraipô ;] se réfèreà/fiod. 1, 590 ;J’aulre(’Hja ; SiifLo ;)à /(iad. XVllI, 395sq. Sur laconjecture :

=b i,i ;, au lieu de îiô uWo ;, cf. Wilamowiti, 1. 1. in
Malien, Arch. Jahrb. XXVII,

1912, p. 2(1, noie 5.-8 liiad. I, 5Î0 sq. ; cf. Accius, Phitoctelus dans Trag. lai. reliq. [r. 2, p. 531i, 3« éd. Ribbcck ; Val. Flaccus, 11, 88 sq. ; Lucian. De sacrif. 6 ; la scène est représentée sur un relief de basse époque romaine ; Gerhard, Ânt. BUdw. 81,6 ; musée de Berlin, Beschr. d. Skulpt. a’ 912. — 9 Malien, Bepliaistos, 34 i. — 10 Ibid. — Il lliad. XVIII, 395 sq. Même tradition dans l’hymne à Apollon Pythien, 140 ; Pausan. I, 20, 3. Comme pour développer la confusion déjà faite par Platon entre les deux récits homériques, Apoltodore, I, 3, 5, fail tomber HéphaÏB- tos à Lemnos, mais menlionoe qu’il est sauvé par Tbétis ; Servius, Comm. ad

Kig. 7308. — Héphaislo

nouveau-né ; pour cacher aux regards des Olympiens la laideur de son fils infirme, Héra jette au loin l’es- tropié. Il tombe dans la mer, où Eurynomè et Thétis le recueillent, au fond d’une grotte sous-marine ; il reste là neuf ans près des déesses et apprend à forger des armes précieuses ’2. Cet épisode de la grotte magique, où l’exilé mène longtemps une vie ignorée des hommes et des dieux, est un élément de légende qui se retrouve dans le folk-lore des peuples les plus divers ". L’inter- vention des déesses marines, d’autre part, reporte encore une fois l’esprit vers l’idée transposée des sources chaudes, manifestation apparente du feu caché". Quant à la durée de la réclusion, il se peut qu’elle soit un détail ajouté pour expliquer certains rites du culte d’Héphai- stos à Lemnos"’. Au thème delà chute se rattache naturellement celui du retour dqns l’Olympe, justifié par l’a- venture de l’en- chaînement d’Héra [baccuus,

p. 610]. Cette suite de légendes semble bien aussi re- monter aux mêmes origines littéraires, c’est-à-dire à la poésie lyrique post-homérique. Connu de Platon, le mythe de l’enchaînement d’Héra a été raconté pour la première fois par Pausanias, en explication d’une pein- ture du temple de Dionysos, à Athènes". Pour se ven- ger d’avoir été précipité du haut du ciel par sa mère ou, disent quelques traditions, pour apprendre d’elle le secret de sa naissance, Héphaistos lui aurait envoyé, comme pré- sent, un trône d’or garni de liens invisibles ; elle y aurait été fixée dès qu’elle y fut assise. D’où un conseil des dieux, dont diverses traditions relatent les péripéties ’ Seul

.-Enei’i. Vlll, 45’t, fait précipiter Héphaistos par sa mère, mais raconle qu’il est tombé à Lemnos. Pour un poème comme l’iiym’ne homérique à Héphaistos, qui relate aussi l’enchaînement d’Héra, seule la tradition, d’après laquelle la déesse se sei’ait montrée coupable envers son fils, pouvait être prise en considéralion. U. V. Wilamowilz, /. l. p. 223, pense que, le récit de la chute ne faisant pas hon- neur à Héra, on l’atténua dans l’hymne ; le lils disgracieux fut mis en appren- ^ssagc chez d’habiles techniciens ; cf. ^chol. ad lliad.. XIV, 29U (apprentissage chez Kédalion à Naxos). — 12 La légende est reprise par Callimach. Uijmn. Del. 142 : Apollon. Rhod. III, 40 ; Virgil. ^neid. Vlll, 416. Le thème de la grotte sous- marine, où le dieu forgeron habile, est adopté en particulier par ces trois écrivains ; cf. un relief de sarcophage : Mus. Capit. IV, 25 ; Roscber, Héphai- stos, p. 2070 (reproduction). — 13 Cf. les rapprochements établis par R^pp, Lexic- de Roscher, 2052-2053, avec les nains forgerons des légendes allemandes, habitants des grottes, avec la grolte du dieu védique Agni, la grotte des nuées du Rigvéda. — l*Rapp, 1. 1. 2053 ; l’interpréUition symbolique proposée par Rapp pour tous les éléments de cette légende est forcée et peu vraisemblable. — i^ Pliilostral. Ber. 740. On éteignait à certaine période loul feu sur l’ile, pendant neuf jours, en atlen- dant qu’un nouveau feu sacré fùtapporté de Délosavecdes cérémonies appropriées : ce rite, déterminé vraisemblablement par l’influence magique du nombre 9 (Hoscher, Die Siebenund Neunzahl im Kultus und ./i/thua d. Griech. daus les AbAandt. sSchs. Gesell. der Wiss. XXIV, I, 1906), a provoqué, semble-t-il, sur un point particulier, la dérivation de la légende. — 16 Pausan. 1, 20, 3 ; cf. les explications complémentaires données par Libanius, Narrât. 30, 1 (Weslermann, Mythogr. 372) ; un poème de Pindare faisait allusion, bien antérieurement, à ce mythe ; Suidas s. V. ’H^ai’aTcioî îti^iiis ; Photius, Lexic. : "Hja ; *e(r|»oO« ùitb uîioî. — 17 Per- sonne n’était capable dans l’Olympe de délivrer Héra, sauf Héphaistos (Alcae. fr. Il [7r, p. 152,4’ édit. Bergk) ; suivant la tradition. Ares s’engagea à ramener de force Héphaistos (Sappho, fr. 66, p. 110, 4» éd. Bergk), mais il fut repoussé’ par les sortilèges du dieu du feu. Dans le récit de Pausanias, I, 20, 3, Ares n’intervient pas.