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rairement[1]. À Palmyre, on voit au plafond du pronaos du temple du Soleil l’image de Saturne, entourée de celle des six autres planètes, associée chacune à un signe du zodiaque : c’est probablement le thème de géniture du monument[2], car on consultait les astrologues pour connaître le moment favorable à la fondation des édifices comme à celle des villes[3]. Aussi, à l’époque romaine, plusieurs cités de Syrie continuent-elles à marquer sur leurs monnaies le signe qui présidait au mois où elles étaient nées : le Bélier à Antioche et à Cyrrhus, le Capricorne à Zeugma[4]. Il en fut de même dans les régions voisines : au delà de l’Euphrate, en Osrhoène, on trouve le Verseau à Édesse, le Bélier à Nisibis, le Sagittaire à Reséna et à Singara, surmontant

Fig. 7587. Horoscope d’Antiochus de Commagène.
Fig. 7587. Horoscope d’Antiochus de Commagène.

parfois un buste de la Fortune (Τὺχη πόλεως)[5] : en Phénicie, le Cancer avec un croissant lunaire apparaît à Aradus[6] ; en Cilicie, qui fut toujours largement ouverte aux influences sémitiques, on rencontre le Capricorne à Anazarbè et à Augusta, le Lion à Anémurium[7]. Le clergé était fort attaché à une superstition savante dont il se promettait la connaissance de l’avenir. L’horoscope de Julia Domna, qui appartenait à la race sacerdotale d’Émèse, lui promettait une union royale[8] et son époux Septime Sévère fit placer le sien au plafond de son prétoire au Palatin[9]. D’autre part, on voit les divinités figurées au milieu du cercle du zodiaque, pour indiquer qu’elles règnent sur le ciel et par suite sur le monde[10]. La conversion de la Syrie au christianisme ne la fit pas renoncer à la pseudo-science cultivée chez elle depuis de longs siècles. Ainsi saint Éphrem reprochait à Bardesane d’avoir lu assidûment les livres traitant des signes du zodiaque[11] et c’est seulement au Ve siècle qu’Isaac d’Antioche put affirmer que « la médecine de Dieu avait guéri les Chaldéens de l’adoration » qu’ils leur rendaient[12]. Toutefois les gens de Harrân (Carrhae) persistèrent jusqu’au moyen âge à pratiquer leur vieux culte sidéral[13].

Égypte. — L’astrologie était inconnue dans l’Égypte des Pharaons. Elle fut probablement introduite dans ce pays sous la domination perse et, sous les Ptolémées, elle y était entièrement naturalisée. Le plus conservateur de tous les clergés, après avoir subi son ascendant alors irrésistible, se livrait avec ardeur à son étude[14], et bientôt il prétendit l’avoir lui-même inventée[15]. De fait, elle avait acquis dans ce pays superstitieux et érudit un développement original, et notamment les spéculations sur le zodiaque y prirent une importance nouvelle. Hermès Trismégiste était par excellence l’auteur chez lequel on apprenait à connaître « les douze signes, la nature et l’influence de chacun[16] ». Ce sont les Égyptiens qui ont introduit dans l’astrologie le système des « décans », c’est-à-dire de divisions des signes en trois parties de dix degrés chacune, ces trente-six tranches étant consacrées à trente-six dieux sidéraux[17]. Au milieu du IIe siècle avant notre ère, parurent en grec des œuvres attribuées au roi Néchepso et à son confident le prêtre Pétosiris, qui prétendaient révéler la vieille divination astrale de l’Égypte, dont elles codifiaient en quelque sorte les lois[18]. Ces œuvres apocryphes devinrent comme les livres sacrés de tous les mathematici postérieurs. Le prestige dont jouissait alors la pseudoscience qu’elles enseignaient était tel qu’Hipparque lui-même ne dédaigna pas de s’en occuper[19].

La puissance acquise par l’astrologie dans les temples de la vallée du Nil est éloquemment attestée par les zodiaques sculptés sur leur parois. Les plus célèbres sont ceux du grand temple de Hathor à Dendérah (Tentyris), dont l’un, circulaire, décorant une chapelle d’Osiris, remonte au temps d’Auguste ou de Cléopâtre (fig. 7589)[20], l’autre, rectangulaire, sculpté dans le pronaos, date du règne de Néron[21] ; puis ceux des deux temples d’Esnéh (Latopolis)[22] et celui d’un propylon d’Akhmôm (Panopolis)[23] qui sont tous trois du IIe siècle de notre ère. Les fresques qui ornent les tombeaux[24], les peintures des cercueils de bois[25] reproduisent parfois aussi, à l’époque romaine, le zodiaque et les planètes, pour rappeler l’immortalité céleste qui est réservée au mort

  1. Babelon, ibid. p. 8 sq. p. 219, no 21 sq. ; p. 221, no 39 sq. ; p. 222, no 39, no 43 ; Inventaire collection Waddington, no 4800, pl. XIII, 3 (Cietis). Le Scorpion est probablement ici le signe, non de l’horoscope royal, mais de la Commagène.
  2. Wood, Ruins of Palmyra. 1753, pl. XIX A ; cf. Bouché-Leclercq, op. l. p. 228.
  3. Cat. codd. astrol. V, pars I, p. 118. n. 2 ; cf. Bouché-Leclercq, op. l. p. 368 sq.
  4. Wroth, Cat. greek coins Brit. Mus. ; Galatia, Cappadocia, Syria, 1899, p. 166 sq. (Antioche ; cf. De Witte, Revue numism. 1844, p. 11), p. 137 (Cyrrhus), p. 126 sq. (Zeugma).
  5. Head, Hist. nummorum, 2e éd. 1911, p. 815 sq.
  6. Francis, Cat. greek coins Br. Mus. ; Phoenicia, p. XXXVII et pl. XIV, 6.
  7. Hill, Cat. Greek coins Br. Mus. ; Lycaonia, Isauria, Cilicia, 1900, p. 35, 37, 39 (Anazarbe) ; p. 44 (Augusta). Peut-être le Capricorne est-il ici le signe d’Auguste (cf. infra, p. 1054) ; p. 43 (Anemurium).
  8. Vita Severi, 3, 8.
  9. Dio Cass. LXXVI, 11.
  10. Zodiaque entourant un temple d’Artémis à Ptolémaïs (Francis, op. cit. p. LXXXIV ; Astarté entourée par le zodiaque à Sidon (Ibid. p. 187). De même à Aegae, tête de Méduse dans le zodiaque (Müller-Wieseler, t. II, pl. LXXII. no 920). Sur ce type monétaire, cf. infra, p. 1057. no 14.
  11. Nau, Patrologia Syriaca, t. III, 1907, p. 499 ; sur les noms araméens des signes, cf. Noldeke, Zeitschr. Deutschen Morgent. Gesellschaft, XXV, 1871, p. 256 sq.
  12. Isaac Antioch. XI, 242 sq. (p. 217 Bickell) : Medicina Dei sonavit populos ab aegritudine idolatriae, per illam sanati sunt Chaldaei ab adoratione signorum zodiaci.
  13. Chwolson, Die Sabier, 1856, passim. Sur une épigramme du IVe ou Ve siècle, qui se serait trouvée sous un zodiaque à Bersabée en Palestine, mais dont l’interprétation est douteuse, cf. Schmidt et Charles, Amer. Journ. of Archaeol., 1910, p. 66 = Revue ét. grecques, 1912, p. 66.
  14. Boll, Sphaera, p. 372 sq. ; Otto, Priester und Tempel im hellenistischen Aegypten, II, 1908, p. 225.
  15. Cicer. De divin. I, 1, etc. ; cf. Bouché-Leclercq, op. l. p. 51, n. 1.
  16. Julian. Laodic. ap. Palchum, Cat. codd. astrol. V (Romani), pars I, p. 188, 24 : Τὰ τε ζώδιᾳ καὶ ὁποίας ἕκαστα φύσεως τε καὶ ἐνεργείας ἐστίν, ὅ τε Τρισμέγιστος Ἑρμῆς καὶ οἱ ἀπ’ ἐκείνου ἐδιδαξαν.
  17. Bouché-Leclercq, op. l. p. 215 sq. ; cf. Brugsch, Thesaurus inscr. Aegypt. 1883, t. I, p. 131-194 ; Daressy, Annales du service des Antiqu. de l’Égypte, I. 1900, p. 79-90 ; Lacau, Sarcoph. antérieurs au Nouvel-Empire, II, p. 104-189. Sur les décans en Occident, cf. infra, p. 1053, n. 7, et sur leur transformation en démons, p. 1059, n. 7.
  18. Cat. codd. astrol. VII, p. 29 sq.
  19. Boll, Byzant. Zeitschr. 1899, p. 525 sq. ; 1902, p. 140.
  20. Letronne, Analyse, pl. 1 ; Boll, Sphaera, pl. II et III et p. 159 sq. Les inscriptions dans Brugsch, Thesaurus inscript. Aegypt. 1883, 1, p. 134 sq.
  21. Letronne, op. cit. pl. II ; Boll, op. cit. pl. IV.
  22. Letronne. pl. III et IV (portique du grand temple d’Esnéh et plafond du temple au nord d’Esnéh.
  23. Pococke, Descript. of the East, 1743, 1, p. 77 ; cf. Boll, Sphaera, p. 302, n. 5.
  24. Flinders Petrie, Athribis, 1908, pl. XXXVI-XXXVIII.
  25. Momie Caillaud (époque de Trajan) ; Letronne, Observ. critiques sur l’objet des représ. zodiacales, 1824 ; cercueil d’un prêtre d’Ammon (époque romaine) : Brugsch, Recueil de monuments égyptiens, 1862. I, pl. XVII et p. 30 sq. Des deux côtés de la déesse du Ciel, on voit les douze signes avec les cinq planètes et les douze heures du jour et de