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avec eux des esclaves qui, n’ayant eu toute leur vie d’autre occupation que d’apprendre les noms des citoyens, les connaissaient parfaitement, et les disaient à voix basse aux candidats. Ces esclaves étaient appelés Nomenclateurs.

Cependant il y avait une espèce de gloire à se passer de nomenclateurs. C’est ce qui donna lieu à la belle réponse que fit Scipion l’Africain à Appius Claudius son collègue dans la censure, qui se vantuit de n’avoir pas besoin de ce secours : « J’ai pris plus de soin, dit-il, de faire connaître mon nom

» que d’apprendre les noms des autres. »

Cet usage changea sous les Empereurs. On voit par plusieursépigrammes de Martial (1) [1], qu’on se servait souvent des mots Dominus, Rex, pour saluer ou pour adresser la parole à quelqu’un de considérable, comme chez nous du mot Monsieur. Dans la suite, l’usage prévalut de nommer les supérieurs du nom de leur dignité, comme on disait en France, Monsieur le Duc, Monsieur le Président, et de n’appeler par leur nom que ses inférieurs ou ses intimes amis.

Les Romains avaient encore d’autres nomenclateurs ; c’étaient des esclaves chargés de faire placer à table les convives.

Dans les festins, on buvait autant de coups qu’il y avait de lettres dans le nom du prince, d’un ami, de la femme qu’on aimait ; c’est ce que prouve l’épigramme de Martial (2) [2],

Nœvia sex cyathis, septem Justina bihatur, etc.

Les Grecs et les Romains se nommaient toujours les premiers dans les lettres qu’ils écrivaient, de quelque condition que fussent les personnes auxquelles ils écrivaient. Cet usage subsistait encore du temps d’Ausone. Ce poète s’étant nommé après Paulin au commencement d’une lettre, s’en excuse sur la nécessité du vers.

Les anciens Romains, dans leurs lettres, appelaient par leurs noms les personnes les plus éminentes. Quî fit, Mœcenas, non quià, Mæcenas. Novum crimen, Cai Caesar ; patres conscripti, et tu, Cæsar. Chez les modernes, un évêque se voulant délivrer de la cérémonie des titres, prit le parti d’écrire au cardinal de Richelieu en latin : Latine ad te scribo, Armande Cardinalis, ut majestate linguœ libèrent me à formulis servitutis.

  1. (1) Liv. I, epig. 113. Liv. V. epig. 57. Liv. VI. epig. 58.
  2. (2) Liv. I. epig. 7a.