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Les intervalles n’étant pas strictement égaux, un changement de ton devenait un véritable changement de mode. La tierce ut-mi, dans le ton d’ut majeur, contient 97 savarts, la tierce mi-sol , dans le ton de mi, en contient 102 : c’est ce qui explique comment les anciens maîtres pouvaient attribuer un caractère expressif différent aux différentes tonalités et comment J.-J. Rousseau pouvait parler des tierces majeures « trop fortes » qui impriment, au lieu d’une idée de joie « jusqu’à des idées de fureur ». Avant l’adoption du T. égal, plusieurs systèmes furent proposés pour la division de l’octave. Sauveur imagina une division de l’octave en 43 mérides, dont chacun équivalait à 7 savarts. Huyghens réclamait une division en 55 parties. Ces systèmes ne pouvaient être adoptés par les musiciens ni par les constructeurs d’instruments. C’est le développement de la composition dans le sens tonal (au lieu du sens modal ancien) qui conduisit à la nécessité du T. égal. Bach s’en fit le plus illustre et le plus piquant avocat en écrivant son recueil de préludes et fugues intitulé Le Clavecin bien tempéré. Les raisonnements les plus spécieux des théoriciens n’ont pas pu depuis l’emporter sur la force des résultats pratiques obtenus. Quel que soit le T. adopté, il faut, pour établir la partition et pour obtenir l’accord des instruments à sons fixes, fausser légèrement plusieurs des 12 quintes qui forment 7 octaves plus 6 savarts, intervalle dénommé parfois, « comma pythagoricien ». Chladni prouva que plus on maintient de quintes exactes, plus le T. est mauvais, parce que celles où l’on distribue le contenu du comma pythagoricien deviennent moins supportables ; l’oreille supportera mal cette différence de répartition ; le plus mauvais T. serait celui où des quintes seraient haussées, parce que des fractions en excès s’ajouteraient aux fractions du comma pythagoricien. Au contraire, la répartition deviendra à peu près insensible si les 6 savarts sont répartis également. Pour obtenir pratiquement le T. égal, on procède donc de quinte en quinte en prenant pour point de départ la quinte juste (de 176σ1) que l’on diminue aussi peu que rien » (à 175σ6). On suit l’ordre du cercle ou cycle des quintes et l’on parvient après 12 quintes exactement au son d’où l’on est parti. (Voy. Cycle.). Quoique le T. égal ne soit pas appliqué avec une rigueur parfaite à tous les instruments d’un orchestre, il reste cependant entre eux le lien le plus pratique pour parvenir à une justesse aussi grande que possible.

Température, n. f. Le son s’élève avec la T., pour tous les instr. à vent, de 0,8 savart environ par degré. On doit en tenir compte pour juger du bon accord d’un orchestre au début et à la fin d’un concert. Les instr. à cordes sont en outre influencés par les conditions hygrométriques.

Tempérer, v. tr. Accorder entre eux les intervalles, pour les rendre égaux.

Tempéré, adj. qual. Qui est en rapport avec le tempérament. La gamme européenne moderne est la gamme tempérée, la seule dont tous les tons et demi-tons soient parfaitement égaux.

Temps, n. m. Unité de durée choisie pour la division symétrique de la phrase musicale. Un nombre déterminé de durées forme un temps, un nombre déterminé de temps forme une mesure. Le temps premier est l’unité de valeur, sur laquelle se mesurent les sons. Ainsi qu’en arithmétique le nombre premier, en rythmique le temps premier est indivisible. Il était tel en effet chez les anciens et dans le chant liturgique, où la brève sert aux combinaisons rythmiques en se multipliant, sans se diviser jamais. Temps fort, temps faible. Dans la musique mesurée moderne, notée avec barres de mesure, la division en compartiments symétriques, opérée par les barres de mesure, et la régularité de la battue, ou battement des temps, a conduit les musiciens à marquer fortement et à nommer temps fort le premier temps de chaque mesure binaire ou ternaire, le premier et le troisième, de la mesure binaire double, etc. Hugo Riemann, qu’a suivi d’Indy, adopte la théorie d’un temps léger et un temps lourd dans le rythme musical, sans les assimiler aux temps fort et faible de la mesure. Le temps léger et le temps lourd sont pour eux l’expression de l’accent. rythmique, non celui des divisions symétriques de la mesure. Riemann, suivi par d’Indy, affirme qu’ « il n’est point de mélodie qui commence sur un temps lourd. » Il y a toujours une anacrouse ou préparation de l’accent. Mais cette anacrouse est parfois sous-entendue (!). — Temps parfait, imparfait. Dans la notation proportionnelle, on distinguait le temps parfait, tempus perfectum, où la division de l’unité était ternaire, du temps imparfait, où la division était binaire. Le temps parfait se marquait par un