Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, VI.djvu/204

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fait une bosse au front, est appuyée contre la portière, et se presse la tête à deux mains. Cependant la populace s’est attroupée, les polissons accourent et poussent des cris, les marchands et les marchandes ont bordé le seuil de leurs boutiques, et d’autres spectateurs sont à leurs fenêtres.

Le maître.

Comment diable ! Jacques, ta composition est bien ordonnée, riche, plaisante, variée et pleine de mouvement. À notre retour à Paris, porte ce sujet à Fragonard ; et tu verras ce qu’il en saura faire.

Jacques.

Après ce que vous m’avez confessé de vos lumières en peinture, je puis accepter votre éloge sans baisser les yeux.

Le maître.

Je gage que c’est une des aventures de l’abbé Hudson ?

Jacques.

Il est vrai.


Lecteur, tandis que ces bonnes gens dorment, j’aurais une petite question à vous proposer à discuter sur votre oreiller : c’est ce qu’aurait été l’enfant né de l’abbé Hudson et de la dame de La Pommeraye ? — Peut-être un honnête homme. — Peut-être un sublime coquin. — Vous me direz cela demain matin.


Ce matin, le voilà venu, et nos voyageurs séparés ; car le marquis des Arcis ne suivait plus la même route que Jacques et son maître. — Nous allons donc reprendre la suite des amours de Jacques ? — Je l’espère ; mais ce qu’il y a de bien certain, c’est que le maître sait l’heure qu’il est, qu’il a pris sa prise de tabac et qu’il a dit à Jacques : « Eh bien ! Jacques, tes amours ? »

Jacques, au lieu de répondre à cette question, disait : N’est-ce pas le diable ! Du matin au soir ils disent du mal de la vie, et ils ne peuvent se résoudre à la quitter ! Serait-ce que la vie présente n’est pas, à tout prendre, une si mauvaise chose, ou qu’ils en craignent une pire à venir ?

Le maître.

C’est l’un et l’autre. À propos, Jacques, crois-tu à la vie à venir ?