Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, I.djvu/202

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qu’il est possible : car, si tout n’est pas le mieux qu’il est possible, c’est en Dieu impuissance ou mauvaise volonté. C’est donc pour le mieux que je ne suis pas plus éclairé sur son existence : cela posé, qu’ai-je affaire de vos lumières ? Quand il serait aussi démontré qu’il l’est peu que tout mal est la source d’un bien ; qu’il était bon qu’un Britannicus, que le meilleur des princes pérît ; qu’un Néron, que le plus méchant des hommes régnât ; comment prouverait-on qu’il était impossible d’atteindre au même but sans user des mêmes moyens ? Permettre des vices pour relever l’éclat des vertus, c’est un bien frivole avantage pour un inconvénient si réel. » Voilà, dit l’athée, ce que je vous objecte ; qu’avez-vous à répondre ?… « Que je suis un scélérat, et que si je n’avais rien à craindre de Dieu, je n’en combattrais pas l’existence. » Laissons cette phrase aux déclamateurs : elle peut choquer la vérité ; l’urbanité la défend, et elle marque peu de charité. Parce qu’un homme a tort de ne pas croire en Dieu, avons-nous raison de l’injurier ? On n’a recours aux invectives que quand on manque de preuves. Entre deux controversistes, il y a cent à parier contre un, que celui qui aura tort se fâchera. « Tu prends ton tonnerre au lieu de répondre, dit Ménippe à Jupiter ; tu as donc tort ? »

XVI.

On demandait un jour à quelqu’un s’il y avait de vrais athées. Croyez-vous, répondit-il, qu’il y ait de vrais chrétiens ?

XVII.

Toutes les billevesées de la métaphysique ne valent pas un argument ad hominem. Pour convaincre, il ne faut quelquefois que réveiller le sentiment ou physique ou moral. C’est avec un bâton qu’on a prouvé au pyrrhonien qu’il avait tort de nier son existence. Cartouche, le pistolet à la main, aurait pu faire à Hobbes une pareille leçon : « La bourse ou la vie ; nous sommes seuls, je suis le plus fort, et il n’est pas question entre nous d’équité. »

XVIII.

Ce n’est pas de la main du métaphysicien que sont partis les grands coups que l’athéisme a reçus. Les méditations