Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, I.djvu/337

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XIV.


De toutes les religions celle-là doit être préférée dont la vérité a plus de preuves pour elle et moins d’objections. Or la religion naturelle est dans ce cas ; car on ne fait aucune objection contre elle et tous les religionnaires s’accordent à en démontrer la vérité.


XV.


Comment prouve-t-on son insuffisance ? 1° parce que cette insuffisance a été reconnue de tous les autres religionnaires ; 2° parce que la connaissance du vrai et la pratique du bon a manqué aux plus sages naturalistes. Fausses preuves. Quant à la première partie, si tous les religionnaires se sont accordés pour convenir de son insuffisance, apparemment que les naturalistes n’en sont pas. En ce cas le naturalisme retombe dans le cas de toutes les religions qui sont tenues pour les meilleures par chacun de ceux qui les professent et non par les autres. Quant à la seconde partie, il est constant que depuis la religion révélée nous n’en connaissons pas mieux Dieu ni nos devoirs. Dieu, parce que tous ses attributs intelligibles étaient découverts, et que les inintelligibles n’ajoutent rien à nos lumières ; nous-mêmes, puisque la connaissance de nous-mêmes se rapportant toute à notre nature et à nos devoirs, nos devoirs se trouvent tous exposés dans les écrits des philosophes païens ; et notre nature est toujours inintelligible, puisque ce qu’on prétend nous apprendre de plus que la philosophie est contenu dans des propositions ou inintelligibles, ou absurdes quand on les entend, et qu’on ne conclut rien contre le naturalisme de conduite des naturalistes. Il est aussi facile que la religion naturelle soit bonne et que ses préceptes aient été mal observés, qu’il l’est que la religion chrétienne soit vraie, quoiqu’il y ait une infinité de mauvais chrétiens.


XVI.


Si Dieu ne devait aux hommes aucun moyen suffisant pour remplir leurs devoirs, au moins il ne lui était pas permis par sa natale de leur en fournir un mauvais. Or un moyen insuffisant est un mauvais moyen ; car le premier caractère distinctif