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dition, s’il est doué d’une grande mémoire ; à la géométrie, s’il combine facilement des nombres et des espaces ; à la poésie, si on lui reconnaît de la chaleur et de l’imagination ; et ainsi des autres sciences : et que le premier chapitre d’un bon traité d’éducation doit être de la manière de connaître les dispositions naturelles de l’enfant.


CHAPITRE III.


Page 6. — L’inégalité des esprits vient moins du partage trop inégal des dons du hasard que de l’indifférence avec laquelle on les reçoit.

— Et cette différence, d’où vient-elle ?

— De la différence d’attention.

— Et cette attention différente ?

— De l’intérêt.

— Et l’intérêt ?

— De l’instruction.

— Mais l’instruction ne donne point l’intérêt ; elle le détruit quelquefois.

— Dans l’instruction je fais entrer toutes les sortes d’encouragements.

— Mais il y a mille exemples d’enfants encouragés par tous les moyens possibles dont on n’a rien fait, et d’autres découragés par tous les moyens possibles de la chose qu’ils ont faite, tantôt bien, tantôt mal ou médiocrement, en dépit de tous les obstacles qu’on leur a suscités.

Il y a je ne sais quoi de louche dans le commencement de ce IIIe chapitre. Est-ce ma faute ou celle de l’auteur ? Je n’en sais rien. Helvétius dit : « Si presque tous les objets considérés avec attention ne renfermaient point en eux la semence de quelque découverte ; si le hasard ne partageait pas à peu près également ses dons et n’offrait point à tous des objets de la comparaison desquels il pût résulter des idées grandes et neuves, l’esprit serait presque en entier le don du hasard. » J’entendrais mieux, ce me semble, s’il avait dit : « Si le hasard partageait également ses dons, s’il offrait à tous, etc. »

On reçoit avec indifférence les dons du hasard.

Voilà une façon de s’exprimer bien singulière ; on dirait que