Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, II.djvu/388

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Il n’y en a pas un qui ne sache que le chemin de la fortune, de l’honneur, de la richesse est le même.

Page 8. — Il est peu de Colombs ; et sur les mers de ce monde, uniquement jaloux d’honneurs, de places, de crédit et de richesses, peu d’hommes s’embarquent pour la découverte de vérités nouvelles.

Je n’en suis pas surpris, surtout si votre système est vrai. Toutes nos pensées, tous nos travaux, toutes nos vues se résolvent en dernière analyse à des voluptés sensuelles. Que fait donc celui qui prend l’or et qui dédaigne la découverte ? Il va droit au but, il est sage. Pourquoi voulez-vous qu’il fasse un long circuit pour arriver à un terme prochain ?

L’auteur était tout à l’heure en pleine mer, le voilà au fond des forêts où mille tournoient et tournoieront sans rien découvrir. L’homme de génie a ouvert le sentier, la multitude l’aplanit : c’est la classe des auteurs classiques, classe qui n’est pas assez prisée, esprits nets, esprits justes qui rendent la science commune.

Page 9. — Qu’est-ce que le besoin de la gloire ? C’est le besoin du plaisir ; dans tout pays où la gloire cesse d’en être représentative, le citoyen est indifférent à la gloire.

Oui, le citoyen en général.

On ne sent comme l’auteur que dans la vieillesse. Le spectacle de l’homme illustre qui meurt de faim est sans cesse exposé aux yeux des enfants par des pères sensés. Malheureux, que veux-tu faire ? Il est incertain que tu ailles à la gloire, et tu cours droit à la misère… Voilà les propos dont nos foyers retentissent, mais ils ne convertissent guère que les enfants médiocres ; les autres laissent dire les parents et vont où la nature les appelle. Tout ce que l’auteur ajoute ne convient qu’à ceux qui ne sont pas vraiment appelés.


SECTION IV.


CHAPITRE I.


Page 13. — Au moment où l’enfant se détache des flancs de la mère et s’ouvre les portes de la vie, il y entre sans idées et sans passions.

Sans idées, il est vrai, mais avec une disposition propre à