Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, II.djvu/475

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maxime qu’on ne manque jamais de colorer de l’intérêt public.


XX.

Penser une chose, en dire une autre ; mais avoir plus d’esprit que Pompée. Pompée n’aurait pas eu besoin d’esprit, s’il avait su faire ce qui convenait à son caractère, dire vrai ou se taire, d’autant plus qu’il mentait maladroitement.


XXI.

Ne pas outrer la dissimulation ; s’attrister de la mort de Germanicus, mais ne pas la pleurer. Alors les larmes, évidemment fausses, n’en imposent à personne, et ne sont que ridicules.


XXII.

Parler de son ennemi avec éloge : si c’est pour lui rendre la justice qu’il mérite, c’est bien fait ; si c’est pour l’entretenir dans une fausse sécurité et le perdre plus sûrement, c’est une perfidie.


XXIII.

Publier soi-même[1] une disgrâce : souvent c’est un acte de prudence ; cela empêche les autres de vous en faire rougir et de l’exagérer.


XXIV.

Demander la fille d’Antigone pour épouser la sœur d’Alexandre ; mais être plus fin que Perdiccas. Perdiccas n’eut ni l’une ni l’autre.

  1. Cette maxime paraît n’être qu’une faible réminiscence de ce beau passage de Tacite : At Vitellius, fractis apud Cremonam rebus, nuntios cladis occultans, stulta dissimulatione, remedia potius malorum quam mala differebat. Quippe confitenti consultantique supererant spes viresque : quum e contrario lœta omnia lingeret, falsis ingravescebat. Mirum apud ipsum de bello silentium : prohibiti per civitatem sermones, coque plures : ac si liceret, vera narraturi, quia vetabantur, atrociora vulgaverant. Hist. lib. III, cap. liv.

    Voilà ce qu’il faudrait graver en lettres d’or sur l’intérieur des murs du palais des souverains, sur le bureau de leurs ministres, et en général de tous ceux qui gouvernent, sous quelque dénomination que ce soit. (N.)