Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, V.djvu/383

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Je viens vous demander de vos nouvelles ; je viens aussi vous dire quelques mots de nos affaires littéraires, afin que vous sachiez où nous en sommes. J’espère livrer la première moitié de ma traduction vers le milieu de janvier, et l’autre moitié à la fin du mois ; pour les notes qu’il faudra y joindre, ce sera plus long. On entre d’abord dans l’eau, croyant qu’on pourra la traverser à gué, mais bientôt on sent qu’on enfonce, et l’on est forcé de se mettre à la nage. La bombe de ce singulier dialogue éclate juste au beau milieu de la littérature française, et il faut se recueillir sérieusement pour indiquer la place où frappent les coups.

… Les observations critiques sur ce dialogue commencent à devenir plus difficiles que je ne me l’étais imaginé d’abord. On y parle de la pièce les Philosophes comme d’une production toute récente, et c’est le 20 mai 1760 qu’elle a été représentée pour la première fois à Paris. Alors le vieux Rameau vivait encore. Il faudrait donc placer la composition de ce dialogue avant 1764, date de la mort du vieux Rameau. Mais il y est aussi question des Trois Siècles de la littérature française[1], ouvrage qui n’a paru qu’en 1772. De tout ceci, on est autorisé à conclure que le dialogue a été revu et corrigé bien longtemps après sa première composition, et en pareil cas, les anachronismes sont presque inévitables. Avant de rien affirmer sur une matière si embrouillée, il faut y regarder à deux fois. Je ne puis donc calculer au juste à quelle époque j’aurai fini ce commentaire.

Goethe.
GOETHE À SCHILLER.
Weimar, janvier 1805.

… Je vous envoie avec plaisir la Vie de Marmontel, cela vous intéressera pendant quelques jours. Vous y rencontrerez une ou deux fois le financier Bouret, qui est devenu intéressant pour nous par le Neveu de Rameau.

Goethe.
SCHILLER À GOETHE.
Weimar, le 22 février 1805.

… Je serais bien curieux de savoir si votre manuscrit du Neveu de Rameau est sous presse. Depuis quinze jours, je ne sais plus rien de ce qui se passe dans le monde.

Schiller.
GOETHE À SCHILLER.
Weimar, le 26 février 1805.

… Pour terminer mes notes sur le Neveu de Rameau, je me suis égaré de nouveau dans la littérature française…

Goethe.
GOETHE À SCHILLER.
Weimar, le 28 février 1805.

J’ai appris avec beaucoup de plaisir que vous êtes satisfait de mes comptes rendus[2] ; en pareille matière, on ne sait jamais si on ne fait pas trop, et ne pas faire

  1. Par l’abbé Sabatier de Castres.
  2. Pour la Gazette d’Iéna.