Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, VI.djvu/121

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hommes ; ils viennent de Paris et s’en vont à la terre du plus âgé.

Jacques.

Qui sait cela ?

L’hôtesse.

Eux, qui le disent.

Jacques.

Belle raison !…

Le maître fit un signe à l’hôtesse, sur lequel elle comprit que Jacques avait la cervelle brouillée. L’hôtesse répondit au signe du maître par un mouvement compatissant des épaules, et ajouta : À son âge ! Cela est très fâcheux.

Jacques.

Très fâcheux de ne savoir jamais où l’on va.

L’hôtesse.

Le plus âgé des deux s’appelle le marquis des Arcis. C’était un homme de plaisir, très aimable, croyant peu à la vertu des femmes.

Jacques.

Il avait raison.

L’hôtesse.

Monsieur Jacques, vous m’interrompez.

Jacques.

Madame l’hôtesse du Grand-Cerf, je ne vous parle pas.

L’hôtesse.

M. le marquis en trouva pourtant une assez bizarre pour lui tenir rigueur. Elle s’appelait Mme de La Pommeraye. C’était une veuve qui avait des mœurs, de la naissance, de la fortune et de la hauteur. M. des Arcis rompit avec toutes ses connaissances, s’attacha uniquement à Mme de La Pommeraye, lui fit sa cour avec la plus grande assiduité, tâcha par tous les sacrifices imaginables de lui prouver qu’il l’aimait, lui proposa même de l’épouser ; mais cette femme avait été si malheureuse avec un premier mari qu’elle… (Madame ? — Qu’est-ce ? — La clef du coffre à l’avoine ? — Voyez au clou, et si elle n’y est pas, voyez au coffre.) qu’elle aurait mieux aimé s’exposer à toutes sortes de malheurs qu’au danger d’un second mariage.