Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, VI.djvu/230

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Jacques.

Comme je vous vois.

Le maître.

Et il se taisait ?

Jacques.

Non pas, s’il vous plaît. Ne se contenant plus de rage, il se mit à crier : « Au meu… meu… meurtre ! au feu… feu… feu !… au vo… au vo… au voleur !… » Et voilà le mari que nous croyions loin qui accourt.

Le maître.

J’en suis fâché : je n’aime pas les prêtres.

Jacques.

Et vous auriez été enchanté que sous les yeux de celui-ci…

Le maître.

J’en conviens.

Jacques.

Suzon avait eu le temps de se relever ; je me rajuste, me sauve, et c’est Suzon qui m’a raconté ce qui suit. Le mari qui voit le vicaire perché sur le fenil, se met à rire. Le vicaire lui disait : « Ris… ris… ris bien… so… so… sot que tu es… » Le mari de lui obéir, de rire de plus belle, et de lui demander qui est-ce qui l’a niché là : Le vicaire : « Met… met… mets-moi à te… te… terre. » Le mari de rire encore, et de lui demander comment il faut qu’il s’y prenne. — Le vicaire : « Co… co… comme j’y… j’y… j’y suis mon… mon… monté, a… a… avec la fou… fou… fourche… — Par sanguienne, vous avez raison ; voyez ce que c’est que d’avoir étudié ?… » Le mari prend la fourche, la présente au vicaire ; celui-ci s’enfourche comme je l’avais enfourché ; le mari lui fait faire un ou deux tours de grange au bout de l’instrument de basse-cour, accompagnant cette promenade d’une espèce de chant en faux bourdon ; et le vicaire criait : « Dé… dé… descends-moi, ma… ma… maraud, me… me dé… dé… descendras… dras-tu ?… » Et le mari lui disait : « À quoi tient-il, monsieur le vicaire, que je ne vous montre ainsi dans toutes les rues du village ? On n’y aurait jamais vu une aussi belle procession… » Cependant le vicaire en fut quitte pour la peur, et le mari le mit à terre. Je ne sais ce qu’il dit alors au mari, car Suzon s’était évadée ; mais j’entendis : « Ma… ma… malheureux ! tu… tu… fra… fra… frappes