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DON PABLO OLAVIDÈS
précis historique rédigé sur des mémoires fournis a m. diderot par un espagnol
1782

Don Pablo Olavidès est de Lima, capitale du Pérou. Il naquit avec des talents précoces, chose assez ordinaire dans les contrées méridionales. Il s’appliqua aux sciences, il cultiva les lettres dès sa jeunesse, et parvint, à l’âge de vingt ans, à la dignité d’oydor de Lima.

En 1748 ou 1749, il y eut un grand tremblement de terre, dans lequel tout Callao et une partie considérable de Lima furent bouleversés. Don Pablo, qui avait en sa garde des sommes appartenant aux habitants qui perdirent la vie dans ce désastre, jugea à propos d’employer celles qui ne furent point réclamées par des héritiers, à la construction d’une église, et d’un théâtre où les citoyens allassent dissiper la triste impression de la catastrophe à laquelle ils avaient échappé. Le clergé désapprouva l’érection du théâtre, et lui en fit un crime auprès du ministre de Madrid. Hinc prima mali labes. Sous le règne précédent, le clergé avait pris un ascendant sans bornes sur l’esprit de Ferdinand VI. Son confesseur, le père Ravago, jésuite, lui avait persuadé que le premier, le plus essentiel des devoirs d’un roi catholique, était une entière soumission aux volontés des oints du Seigneur, et le bon roi aurait vu les enfers s’ouvrir sous ses pieds s’il ne s’était aveuglément conformé aux conseils de Ravago. Toute la religion de ce prince consistait en des pratiques minutieuses dont on n’avait garde de le désabuser en l’éclairant. Il fut donc très-facile à Ravago et à ses collègues de lui montrer dans Pablo un homme sans religion, sans mœurs, un impie qui avait préféré la construction d’une église et d’un théâtre à celle de deux églises ; un scélérat digne du dernier