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Scène IX


LE PÈRE DE FAMILLE, LE COMMANDEUR
en robe de chambre et en bonnet de nuit.


Le Commandeur.

Eh bien ! monsieur d’Orbesson, vous avez vu votre fils ? De quoi s’agit-il ?

Le père de famille.

Monsieur le Commandeur, vous le saurez. Entrons.

Le Commandeur.

Un mot, s’il vous plaît… Voilà votre fils embarqué dans une aventure qui va vous donner bien du chagrin, n’est-ce pas ?

Le père de famille.

Mon frère…

Le Commandeur.

Afin qu’un jour vous n’en prétendiez cause d’ignorance, je vous avertis que votre chère fille et ce Germeuil, que vous gardez ici malgré moi, vous en préparent de leur côté, et, s’il plaît à Dieu, ne vous en laisseront pas manquer.

Le père de famille.

Mon frère, ne m’accorderez-vous pas un instant de repos ?

Le Commandeur.

Ils s’aiment ; c’est moi qui vous le dis.

Le père de famille, impatienté

Eh bien ! je le voudrais.

(Le Père de famille entraîne le Commandeur hors de la scène tandis qu’il parle.)
Le Commandeur.

Soyez content. D’abord ils ne peuvent ni se souffrir, ni se quitter. Ils se brouillent sans cesse, et sont toujours bien. Prêts à s’arracher les yeux sur des riens, ils ont une ligue offensive et défensive envers et contre tous. Qu’on s’avise de remarquer en eux quelques-uns des défauts dont ils se reprennent, on y sera bien venu !… Hâtez-vous de les séparer ; c’est moi qui vous le dis…