Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, VII.djvu/246

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Saint-Albin[1].

Vous m’abandonnez ?

Sophie.

Je n’oublierai point ce que vous avez fait pour moi. Vous m’avez vraiment aimée : ce n’est pas en descendant de votre état, c’est en respectant mon malheur et mon indigence, que vous l’avez montré. Je me rappellerai souvent ce lieu où je vous ai connu… Ah ! Sergi !

Saint-Albin.

Vous voulez que je meure.

Sophie.

C’est moi, c’est moi qui suis à plaindre.

Saint-Albin.

Sophie, où allez-vous ?

Sophie.

Je vais subir ma destinée, partager les peines de mes sœurs, et porter les miennes dans le sein de ma mère. Je suis la plus jeune de ses enfants, elle m’aime ; je lui dirai tout, et elle me consolera.

Saint-Albin.

Vous m’aimez et vous m’abandonnez ?

Sophie.

Pourquoi vous ai-je connu ?… Ah !… (Elle s’éloigne.)

Saint-Albin.

Non, non… je ne le puis… Madame Hébert, retenez-la… ayez pitié de nous.

Madame Hébert.

Pauvre Sergi !

Saint-Albin, à Sophie.

Vous ne vous éloignerez pas… j’irai… je vous suivrai… Sophie, arrêtez… Ce n’est ni par vous, ni par moi que je vous conjure… Vous avez résolu mon malheur et le vôtre… C’est au nom de ces parents cruels… Si je vous perds je ne pourrai ni les voir, ni les entendre, ni les souffrir… Voulez-vous que je les haïsse ?

Sophie.

Aimez vos parents ; obéissez-leur ; oubliez-moi.

  1. On coupait à la représentation depuis ce passage jusqu’à : Non, non, je ne le puis.