Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, VII.djvu/306

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Qu’allais-je devenir ?… C’est lui qui m’a conservé Sophie… Menacée par moi, menacée par mon oncle, c’est Germeuil, c’est ma sœur qui l’ont sauvée… Ils n’avaient qu’un instant… elle n’avait qu’un asile… Ils l’ont dérobée à ma violence… Les punirez-vous de ma faute ?… Cécile, venez. Il faut fléchir le meilleur des pères. (Il amène sa sœur aux pieds de son père, et s’y jette avec elle.)

Le Père de famille.

Ma fille, je vous ai pardonné ; que me demandez-vous ?

Saint-Albin.

D’assurer pour jamais son bonheur, le mien et le vôtre. Cécile… Germeuil… Ils s’aiment, ils s’adorent… Mon père, livrez-vous à toute votre bonté. Que ce jour soit le plus beau jour de notre vie. (Il court à Germeuil, il appelle Sophie :) Germeuil, Sophie… Venez, venez… Allons tous nous jeter aux pieds de mon père.

Sophie, se jetant aux pieds du Père de famille, dont elle ne quitte guère les mains le reste de la scène.

Monsieur !

Le Père de famille, se penchant sur eux, et les relevant.

Mes enfants… mes enfants !… Cécile, vous aimez Germeuil ?

Le Commandeur.

Et ne vous en ai-je pas averti ?

Cécile.

Mon père, pardonnez-moi.

Le Père de famille.

Pourquoi me l’avoir celé ? Mes enfants ! vous ne connaissez pas votre père… Germeuil, approchez. Vos réserves m’ont affligé ; mais je vous ai regardé de tout temps comme mon second fils. Je vous avais destiné ma fille. Qu’elle soit avec vous la plus heureuse des femmes[1].

Le Commandeur.

Fort bien. Voilà le comble ! J’ai vu arriver de loin cette extravagance ; mais il était dit qu’elle se ferait malgré moi ; et Dieu merci, la voilà faite. Soyons tous bien joyeux, nous ne nous reverrons plus.

  1. Germeuil répondait, à la représentation : Ah ! monsieur, en baisant la main du Père de famille.