On en a disposé sans mon aveu. Elle vivait avec une amie ; celle-ci, accoutumée au rôle de maîtresse dans la maison, a tout pris, tout donné, tout vendu, lits, glaces, linge, vaisselle, meubles, batterie de cuisine, argenterie, et il ne me reste de mobilier non plus que vous en voyez sur ma main.
Cela était-il considérable ?
Assez. Je ne sais quel parti prendre. Perdre une bonne partie de son bien, surtout quand on n’est pas mieux dans ses affaires que moi, cela me paraît dur ; attaquer l’ancienne amie d’une sœur, cela me semble indécent. Que me conseillez-vous ?
Ce que je vous conseille ? De rester en repos.
C’est bientôt dit.
Demeurez en repos, vous dis-je. Savez-vous ce que c’est que votre affaire ? La même que celle que j’ai avec votre vieille amie madame Servin, qui dure depuis dix ans, qui en durera dix autres ; pour laquelle j’ai fait cinquante voyages à Paris, qui m’y rappellera cinquante fois encore ; qui me coûte en faux frais à peu près deux cents louis, qui m’en coûtera plus de deux cents autres ; et qui, grâce aux puissantes protections de la dame, ou ne sera jamais jugée, ou dont après la sentence, si j’en obtiens une, je ne tirerai pas le quart de mes déboursés.
Ainsi vous ne voulez pas absolument que je plaide.
Non, de par tous les diables qui emportent et votre amie madame Servin et l’amie de votre sœur !
Si c’était à recommencer, vous ne plaideriez donc pas ?
Non… À quoi pensez-vous ?