Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, X.djvu/107

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cela, c’est une grande toile nue où quelques figures oisives et muettes se perdent. On ne regarde ni Vulcain, ni la déesse. Je ne sais s’il y a des Cyclopes. La seule figure qu’on remarque, c’est un homme placé sur le devant qui soulève une poutre ferrée par le bout…

Et ce Jugement de Pâris, que vous en dirai-je ? Il semble que le lieu de la scène devait être un paysage écarté, silencieux, désert, mais riche ; que la beauté des déesses devait tenir le spectateur et le juge incertains ; qu’on ne pouvait rencontrer le vrai caractère de Paris que par un coup de génie. M. de La Grenée n’y a pas vu tant de difficultés. Il était bien loin de soupçonner l’effet sublime du lieu de la scène… Son jeune Satyre qui s’amuse du sifflet de Pan a plus de gorge qu’une jeune fille. Le reste, c’est de la couleur, de la toile et du temps perdu.


CHALLE[1].


Je n’ai pas mémoire d’avoir vu un Saint Hippolyte dans la prison[2] ; ni un Domine non sum dignus[3], ni une Lucrèce présentant le poignard à Brutus[4], ni les autres tableaux[5] de Challe. Vous savez avec quelle dédaigneuse inadvertance on passe sur les compositions médiocres.


CHARDIN[6].


Il y a de Chardin un Retour de chasse[7] ; des Pièces de gibier[8], un Jeune Élève qui dessine, vu par le dos ; une Fille

  1. Michel-Ange-Charles Challe, né à Paris en 1718, mort en 1778. Professeur pour la perspective ; il était académicien depuis 1753.
  2. Tableau de 10 pieds de haut sur 8 de large, pour l’église Saint-Hippolyte ; no 31.
  3. Tableau de 7 pieds de haut sur 5 de large, pour le Chapitre des Feuillants de la rue Saint-Honoré ; no 32.
  4. Tableau de 6 pieds 1/2 de haut sur 5 de large ; no 33.
  5. Challe n’avait à cette exposition qu’un autre tableau, le portrait du sculpteur Mignot ; no 34.
  6. Jean-Baptiste-Siméon Chardin, né à Paris en 1699, élève de Cazes et de Noël Coypel, mort en 1779. Conseiller (1743) et trésorier (1755) de l’Académie.
  7. Tableau d’environ 7 pieds de haut sur 4 de large (no 35) qui appartenait à M. le comte du Luc.
  8. Deux tableaux de 2 pieds 1/2 de haut sur 2 pieds de large (no 30) qui appartenaient à M. Trouard, architecte.