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Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, X.djvu/226

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tives. C’était le Jugement d’Appuis Claudius, scène immense : Diomède qui blesse Vénus, autre scène immense ; Une Bacchanale, sujet d’ivresse exécuté avec force et chaleur. Je vous ai dit dans le temps[1] ce que j’en pensais, et ce soldat renversé de son cheval abattu, percé d’un dard, et dont le sang descendant le long de la crinière du cheval, allait teindre les eaux du Xante, m’est encore présent. Ah ! si le reste eût été composé et exécuté de la même vigueur !

Cette fois-ci il a voulu nous montrer Andromaque éplorée devant Ulysse, qui fait arracher de ses bras son fils Astyanax, et qui a ordonné qu’on les précipitât du haut des murs d’Ilion[2].

Le moment qu’il a choisi est celui où Ulysse marque de la main le haut de la tour et où l’on arrache l’enfant à sa mère.

On voit à droite une troupe de soldats ; Ulysse est devant eux et il marque de la main le haut de la tour.

Ici la composition s’interrompt et laisse un grand vide au milieu du tableau.

Après ce vide, la première figure qu’on aperçoit sur la gauche, vers un des angles du tombeau d’Hector, est belle, très-belle ; c’est une des suivantes d’Andromaque, agenouillée, les bras élevés vers le ciel, les mains jointes, le visage tout couvert de sa longue chevelure.

Ensuite c’est un soldat qui s’est saisi d’Astyanax, qu’il tient entre ses bras. L’enfant est tourné et penché vers sa mère.

Andromaque est prosternée aux pieds du soldat et semble plutôt supplier que disputer son enfant. Sa tête répond aux cuisses du soldat. Elle a les bras étendus, le corps incliné et la tête relevée ; son vêtement, son caractère, son attitude sont nobles et pathétiques.

Derrière Andromaque, un soldat empêche une des suivantes d’Andromaque d’approcher de sa maîtresse et de l’enfant ; cette suivante s’arrache les cheveux et elle est renversée sur une autre qui se tord les bras.

Toute cette partie de la scène, composée avec chaleur, se passe au-devant du tombeau, qui forme une belle et grande masse.

  1. Voyez Salons de 1759 et de 1761.
  2. Ce tableau, de 21 pieds de large sur 12 pieds de haut, appartient à l’Infant Don Philippe, duc de Parme et de Guastalla. (Note du Livret.) No 120.