Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, XIII.djvu/142

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premiers principes d’une science ou d’un art jusqu’à ses conséquences les plus éloignées, et remonter de ses conséquences les plus éloignées jusqu’à ses premiers principes ; passer imperceptiblement de cette science ou de cet art à un autre, et, s’il est permis de s’exprimer ainsi, faire, sans s’égarer, le tour du monde littéraire. Nous convenons avec lui que le plan et le dessein de son dictionnaire sont excellents ; et que, si l’exécution en était portée à un certain degré de perfection, il contribuerait plus, lui seul, au progrès de la vraie science, que la moitié des livres connus. Mais nous ne pouvons nous empêcher de voir combien il est demeuré loin de ce degré de perfection. En effet, conçoit-on que tout ce qui concerne les sciences et les arts puisse être renfermé en deux volumes in-folio ? La nomenclature d’une matière aussi étendue en fournirait un elle seule, si elle était complète. Combien donc ne doit-il pas y avoir dans son ouvrage d’articles omis ou tronqués ?

Ce ne sont point ici des conjectures. La traduction entière du Chambers nous a passé sous les yeux ; et nous avons trouvé une multitude prodigieuse de choses à désirer dans les sciences ; dans les arts libéraux, un mot où il fallait des pages, et tout à suppléer dans les arts mécaniques. Chambers a lu des livres, mais il n’a guère vu d’artistes ; cependant il y a beaucoup de choses qu’on n’apprend que dans les ateliers. D’ailleurs il n’en est pas ici des omissions comme dans un autre ouvrage. L’Encyclopédie, à la rigueur, n’en permet aucune. Un article omis dans un dictionnaire commun le rend seulement imparfait. Dans une Encyclopédie, il rompt l’enchaînement et nuit à la forme et au fond ; et il a fallu tout l’art d’Éphraïm Chambers pour pallier ce défaut. Il n’est donc pas à présumer qu’un ouvrage aussi imparfait pour tout lecteur, et si peu neuf pour le lecteur français, eût trouvé beaucoup d’admirateurs parmi nous.

Mais sans nous étendre davantage sur les imperfections de l’Encyclopédie anglaise, nous annonçons que l’ouvrage de Chambers n’est point la base sur laquelle nous avons élevé ; que nous avons refait un grand nombre de ses articles, et que nous n’avons employé presque aucun des autres, sans addition, correction ou retranchement ; qu’il rentre simplement dans la classe des auteurs que nous avons particulièrement consultés ;