Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, XVIII.djvu/278

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argent qu’on y mît, parce qu’il faudrait encore être servi par des circonstances qui ne se retrouvent pas. J’en écris à M. le général Betzky. Dites-lui, je vous prie, qu’il n’y a pas un moment à perdre, si nous ne voulons pas être croisés par des nuées de concurrents régnicoles et étrangers. Je leur fais passer par la personne qui vous remettra cette lettre le catalogue des livres du comte de Lauraguais. Ce Lauraguais est homme à jeter à la tête du premier venu la bible de Mayence, tous les Italiens et tous les Grecs et tous les Latins du monde, s’il manque d’argent et que la fantaisie lui prenne d’une chanteuse italienne ou d’une sauteuse anglaise. Donnez avis de cet envoi à M. de la Fermière.

Adieu, mes amis, adieu. Il n’y a là que quelques lignes, et c’est bien contre mon usage et mon gré ; car je n’aime rien tant que bavarder avec mes amis, et vous en savez quelque chose. Mademoiselle Victoire, puisque vous savez que le premier plâtre de Sa Majesté Impériale que vous m’avez envoyé a été gâté, vous ne pouvez pas ignorer ce que j’attends de votre amitié.

Je vous prie de dire à M. de Soltikoff que les maîtres continuent à me rendre les meilleurs témoignages des élèves, qu’ils sont honnêtes et assidus, qu’ils gardent leurs mœurs, emploient bien leur temps et acquièrent du talent.

Je vous embrasse bien tendrement tous les deux. Lorsque vous aurez occasion de porter votre hommage aux pieds de l’impératrice, joignez-y le mien.

À propos, je me rappelle qu’il pourrait bien y avoir dans ma dernière lettre quelque vivacité qui vous aura contristé. Je ne sais plus ce que c’est, et j’espère que vous l’aurez oublié comme moi.

S’il plaisait à M. Grimm de me restituer mes papiers, vous auriez la connaissance la plus complète du dernier Salon et la matière de cinquante lectures agréables à l’Académie. Mais il faut croire que cela me reviendra, et que je m’acquitterai envers vous.

Bonjour, bonjour encore, mille embrassements du père, de la mère et de l’enfant.

Ce 18 juillet 1708.