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Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, XX.djvu/14

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d’autre faute que celles auxquelles la férocité de ses frères la contraignait et de tomber dans la misère.

3° Que ses frères lui ont fait un tort réel en faisant saisir mal à propos des marchandises qui sont restées sur son compte. C’est, ce me semble, au saisissant à répondre des suites d’une saisie mal faite.

4° Que les violences qu’elle a essuyées de ses frères, brisant les portes pendant la nuit et s’introduisant chez elle, doivent entrer en considération, soit pour excuser les démarches inconsidérées de leur sœur, soit pour apprécier la sorte d’indemnité qui leur est due.

5° Que sur la connaissance que j’ai des pauvres ménages des ouvriers de province, je ne saurais vous dire le peu de valeur des spoliations possibles, fussent-elles réelles et démontrées.

6° Que l’ayant interrogée moi-même sur des draps et autres guenilles, en un mot sur la circonstance qui paraît la charger davantage, elle y a satisfait avec beaucoup d’ingénuité et de vraisemblance. Elle nomme ceux à qui ces effets appartiennent, et elle en motive l’emprunt par la nature de la maladie de sa mère, qui exigeait plus de linge qu’il n’y en avait à la maison.

7° Que moi qui connais un peu ce que c’est que le linge des ouvriers de province, je puis vous assurer qu’on n’en ferait pas ici des torchons de cuisine. Imaginez qu’une fille portait sur ses bras quatre paires de ces draps.

8° Que, quoique la maladie de sa mère eût été dispendieuse et longue, il se trouve plus de bien à sa mort qu’il n’y en avait à la mort du mari.

9° Que cette fille se trouve dans la position la plus effroyable ; que si elle perd son procès, elle sera réduite à la dernière extrémité, et que si elle le gagne, elle sera forcée de s’expatrier, à moins qu’elle ne veuille s’exposer à périr de la main de ses frères.

10° Que ses frères ont leur talent et que l’unique ressource de la sœur est d’entrer au service.

11° Qu’il ne lui restera pas seulement l’honneur intact, parce que la moindre indemnité l’accuse de vol.

12° Que s’il y a des cas où interdum pœna justo juri recidit,