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nisme, étoit savant dans l’Astronomie, comme plusieurs ouvrages, qui nous restent de lui, en font foi.

Parmi les Astronomes du sixieme siecle, il faut placer Boëce ; car ses écrits prouvent qu’il s’étoit appliqué à cette science. Thius fit des observations à Athènes, au commençement du même siecle. Elles ont été imprimées pour la premiere fois à Paris, en 1645, sur un manuscrit de la bibliotheque du Roi. Les progrès de Denys le Petit à cet égard son connus. Laurentius de Philadelphie, composa quelques ouvrages d’Astronomie, qui ne subsistent plus. Ce que Cassiodore a écrit est trop peu de chose pour lui donner rang parmi les Astronomes. Il en faut dire autant de Simplicius ; son commentaire sur le livre d’Aristote de Cælo, montre pourtant une teinture de cette science.

Dans les siecles VII. & VIII. nous trouvons Isidore de Séville, à qui l’Astronomie ne doit aucune découverte. Léontius, habile dans la méchanique, construisit une sphere en faveur d’un de ses amis, & composa un petit traité pour lui en faciliter l’usage. L’on trouve dans les ouvrages du vénérable Bede diverses choses relatives à l’Astronomie. Alcuin, son disciple, cultiva aussi cette science, & porta Charlemagne, dont il avoit été précepteur, à favoriser les savans.

Les auteurs qui ont écrit depuis Constantin jusqu’au tems de Charlemagne, & depuis, réduisoient toute leur étude à ce qui avoit rapport au calendrier & au comput ecclésiastique. Charlemagne, suivant le témoignage d’Eginhard & de la plûpart des historiens, étoit savant dans l’Astronomie : il donna aux mois & aux vents, les noms allemands qui leur restent encore avec peu de changement. L’ambassade que lui envoya Aaron Rechild est fameuse dans l’histoire à cause des présens rares dont elle étoit accompagnée, parmi lesquels on marque une horloge, ou selon d’autres un planisphere.

L’auteur anonyme de la chronique des rois Francs, Pepin, Charlemagne, & Louis, cultiva l’Astronomie. Il a inséré plusieurs de ses observations dans sa chronique. Une preuve de son habileté & de ses progrès, c’est qu’il prédit une éclipse de Jupiter par la lune, & qu’il l’observa. Sur la fin du dixieme siecle, on trouve le moine Gerbert, qui fut évêque & ensuite pape sous le nom de Sylvestre II. Il étoit savant dans l’Astronomie & dans la méchanique, ce qui lui attira le soupçon de magie. Il fit une horloge d’une construction merveilleuse, & un globe céleste. Il faut placer dans le onzieme siecle Jean Campanus de Novarre ; Michel Psellus, sénateur de Constantinople ; Hermannus Contractus, moine de Reichenau, & Guillaume, abbé de S. Jacques de Wurtzbourg. Ils ont tous écrit sur l’Astronomie. Dans le douzieme siecle, Sigebert de Gemblours s’attacha à marquer les tems, selon le cours du soleil & de la lune. Athélard, moine Anglois, fit un traité de l’astrolabe ; & Robert, évêque de Lincoln, un autre de la sphere. Jean de Seville traduisit l’Alfragan de l’Arabe en Latin.

Une des principales causes du peu de progrès que l’Astronomie a fait pendant plusieurs siecles, fut l’ordre que donna Omar III. calife des Sarrasins, de brûler tous les livres qui se trouvoient en orient, vers le milieu du septieme siecle : le nombre de ceux qui se trouvoient à Alexandrie étoit immense ; cependant comme il fallut employer plus de six mois pour exécuter l’ordre du calife, qui achevoit pour lors la conquête de la Perse, les ordres qu’il avoit envoyés ne furent pas si rigoureusement exécutés en Egypte, qu’il n’échappât quelques manuscrits. Enfin la persécution que les différentes sectes qui s’étoient élevées parmi les Mahométans, avoient fait naître tant en Afrique qu’en Asie, ayant cessé presque entierement,

les mêmes Arabes ou Sarrasins recueillirent bientôt après un grand nombre d’écrits que les premiers califes Abbassides firent traduire d’après les versions Syriaques, & ensuite du Grec en leur langue, laquelle est devenue depuis ce tems, la langue savante de tout l’orient.

On sait qu’en général les Arabes ont fort cultivé les Sciences : c’est par leur moyen qu’elles ont passé aux Européens. Lorsqu’ils se rendirent maîtres de l’Espagne, ils avoient traduit en leur langue les meilleurs ouvrages des Grecs. C’est sur ces traductions que les Occidentaux se formerent d’abord quelque idée des sciences des Grecs. Ils s’en tinrent à ces traductions jusqu’à ce qu’ils eussent les originaux. L’Astronomie n’étoit pas la science la moins cultivée parmi ces peuples. Ils ont écrit un grand nombre de livres sur ce sujet. La seule bibliotheque d’Oxford en contient plus de 400, dont la plûpart sont inconnus aux savans modernes. L’on n’en sera pas surpris, si l’on fait attention que les califes eux-mêmes s’appliquoient à l’Astronomie, & récompensoient en princes magnifiques ceux qui se distinguoient dans cette science. Le plus illustre parmi les princes Mahométans qui ont contribué à perfectionner l’Astronomie, non-seulement par la traduction des livres Grecs, mais encore par des observations astronomiques, faites avec autant d’exactitude que de dépense, a été le calife Almamoun, septieme de la famille des Abbassides, qui commença son empire en 813. Il étoit fils de cet Aaron Rechild dont nous avons parlé à l’occasion de Charlemagne. On dressa sur les observations qu’il fit faire, les tables astronomiques qui portent son nom. Il en fit faire d’autres pour la mesure de la terre dans les plaines de Sinjar ou Sennaar, par trois freres très habiles Astronomes, appellés les enfans de Mussa : le détail de ces observations est rapporté par différens auteurs, cités par Golius dans ses savantes notes sur l’Alfragan. Il ramassa de tous côtés les meilleurs ouvrages des Grecs, qu’il fit traduire en Arabe. Il les etudioit avec soin ; il les communiquoit aux savans de son empire : il eut sur-tout un grand soin de faire traduire les ouvrages de Ptolomée. Sous son regne fleurirent plusieurs savans Astronomes ; & ceux qui sont curieux de connoître leurs ouvrages, & ce que l’Astronomie leur doit, trouveront dequoi se satisfaire dans Abulfarage, d’Herbelot, Hottinger, &c. qui sont entrés sur ce sujet dans un assez grand détail.

Quelques savans se sont appliqués à traduire quelques-uns de leurs ouvrages, ce qui a répandu beaucoup de jour sur l’Astronomie. Il seroit à souhaiter que l’on prît le même soin de ceux qui n’ont pas encore été traduits. Depuis ce tems les Arabes ont cultivé l’Astronomie avec grand soin. Alfragan, Abumassar, Albategni, Geber, &c. ont été connus par nos auteurs, qui les ont traduits & commentés sur des traductions hébraïques faites par des Juifs : car jusqu’aux derniers siecles, presque aucune traduction n’avoit été faite sur l’Arabe. Il y en a encore un grand nombre d’autres qui ne le cedent point à ceux que nous connoissons. De plus à l’exemple d’Almamoun, divers princes ont fait renouveller les observations astronomiques pour fixer les tems, ainsi que fit Melikschah le plus puissant des sultans Seljukides, lorsqu’il établit l’époque gélaléenne, ainsi appellée à cause que Gelaleddin étoit son surnom. Les califes Almanzor & Almamoun, étant souverains de la Perse, inspirerent aux Persans du goût pour cette science. Depuis eux, il y a eu dans cette nation de tems en tems des Astronomes célebres. Quelques-uns des monarques Persans ont pris des soins très-loüables pour la réformation du calendrier. Aujourd’hui même ces princes font de grandes dépenses pour le progrès de cette science, mais avec fort peu de succès : la raison est qu’au lieu de s’appliquer à l’Astronomie, ils n’étudient