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Au reste le vrai évangile hébreu de saint Matthieu ne subsiste plus, que l’on sache, en aucun endroit. Car ceux que Sébastien Munster & du Tillet ont fait imprimer sont modernes, & traduits en hébreu sur le latin ou sur le grec. Quelques modernes comme Grotius, M. Huet, & Mille dans ses prolégomenes, ont avancé que l’évangile syriaque de saint Matthieu, qui est imprimé à part & dans les polyglottes, étoit le texte original ; mais ceux qui l’ont examiné avec plus de soin remarquent que cette traduction est faite sur le grec.

La version grecque de cet évangile qui passe aujourd’hui pour l’original, a été faite dès les tems apostoliques. Quant à la traduction latine, on convient qu’elle est faite sur le grec, & n’est guere moins ancienne que la grecque même, mais l’auteur de l’une & de l’autre est inconnu.

Quelques modernes comme Erasme, Calvin, Ligfoot, Witaker, Schmith, Casaubon, le Clerc, &c. soutiennent que saint Matthieu écrivit en grec, & que ce que l’on dit de son prétendu original hébreu est faux & mal-entendu. Car, disent-ils, les Peres comme Origene, saint Epiphane & saint Jérome, n’en parlent pas d’une maniere uniforme ; ils le citent, mais sans lui donner autant d’autorité qu’ils auroient dû faire si c’eût été un original. Si l’on en avoit eu cette idée, l’auroit-on laissé périr dans l’Eglise ? Si saint Matthieu avoit écrit en hébreu, trouveroit-on dans son ouvrage l’interprétation des noms hébreux en grec ? Y citeroit-il l’Ecriture, comme il la cite, suivant les Septante ? La langue grecque étoit alors commune dans tout l’Orient, dans tout l’Empire, à Rome même, puisque saint Paul écrit en grec aux Romains, saint Pierre & saint Jacques écrivent dans la même langue aux Juifs dispersés en Orient, & saint Paul aux Hébreux de la Palestine. Enfin, pendant que tous les autres auteurs du nouveau-Testament ont écrit en grec, pourquoi veut-on que saint Matthieu seul ait écrit en hébreu ?

Mais ces raisons ne sont pas sans réplique. Car 1°. les anciens témoignent que saint Matthieu avoit écrit en hébreu, & ils le disent pour avoir vû & consulté cet évangile écrit en cette langue. Si leur témoignage n’est pas uniforme, c’est qu’il y avoit deux sortes d’évangile attribué à saint Matthieu : l’un pur & entier, dont ils ont parlé avec estime ; l’autre altéré, qu’ils ont jugé faux & apocryphe. 2°. On convient que la langue grecque étoit vulgaire en Palestine, mais il n’en est pas moins vrai que le commun du peuple y parloit ordinairement hébreu, c’est-à-dire, un langage mélé de chaldaique & de syriaque. Saint Paul ayant été arrêté dans le temple, harangua la multitude en hébreu, act. XXI. v. 4. 3°. Les noms hébreux, expliqués en grec dans saint Matthieu, prouvent que le traducteur est grec & l’original hébreu. 4°. Saint Matthieu ne cite que dix passages de l’ancien-Testament, dont sept sont plus approchans du texte hébreu que de la version des Septante, & les trois autres ne paroissent conformes aux Septante que parce que dans ces passages les Septante eux-mêmes sont conformes au texte hébreu. 5°. La perte de l’original ne détruit pas la preuve de son existence, les églises l’abandonnerent insensiblement parce que les Ebionites le corrompoient, le grec qui étoit demeuré pur fut conservé & regardé comme seul authentique. Voilà pourquoi l’on négligea l’hébreu, mais s’ensuit-il de-là qu’il n’ait pas existé ? 6°. Quoique les autres Apôtres aient écrit en grec aux Juifs de la Palestine, & à ceux qui étoient dispersés en Orient, on n’en sauroit conclure que saint Matthieu n’ait pas écrit en hébreu pour ceux de la Palestine qui parloient l’hébreu vulgaire plus communément que le grec. Enfin, on ne prétend pas que saint Matthieu ait absolument été obli-

gé d’écrire en hébreu, mais il s’agit de savoir s’il y

a écrit. Or c’est un fait attesté par tous les anciens dont plusieurs ont vû son original & ont été très capables d’en juger, comme Origene, Eusebe, saint Jérome. Oppose-t-on des conjectures a des faits attestés ? Il paroît donc constant que l’évangile de saint Matthieu a été primitivement écrit en hébreu vulgaire.

Le but de saint Matthieu dans son évangile a été, selon le vénérable Pierre Damien, de montrer que Jesus-Christ étoit le Messie. Pour cela il montre par ses miracles qu’il est le Christ, que Marie sa mere est Vierge, que Jesus-Christ n’est point venu pour détruire la loi, mais pour l’accomplir, & que ses miracles vraiment divins sont des preuves incontestables de sa mission. On remarque dans saint Matthieu une assez grande différence dans l’arrangement des faits depuis le chap. iv. v. 22. jusqu’au chap. xiv. v. 13. d’avec l’ordre que suivent les autres évangelistes, mais cela ne préjudicie en rien à la vérité de ces faits. On a attribué à saint Matthieu quelques ouvrages apocryphes, comme le livre de l’enfance de Jesus-Christ, condamné par le pape Gelase, une liturgie éthiopienne, & l’évangile selon les Hébreux dont se servoient les Ebionites, c’est-à-dire, un évangile altéré dont le fonds étoit de saint Matthieu, mais non les parties surajoutées. Calmet, dictionn. de la Bible, tom. III. pag. 646 & suiv.

MATTIAQUES les, (Géog. anc.) Mattiaci, peuples de la Germanie, qui tiroient leur nom de Mattium ou Mattiacum, capitale du pays des Cattes. Les bains d’eau chaude appellés anciennement aquæ Mattiacæ, se trouvoient chez les peuples Mattiatiques. On nomme aujourd’hui ces bains Weisbaden, & comme leur situation est connue, il n’est pas besoin d’autre preuve pour établir la demeure des Mattiaques ; il habitoient donc sur le Rhin, dans le pays que les Ubiens avoient abandonné, selon que Tacite, liv. I. ch. lvj. le fait entendre. (D. J.)

MATTIOLA, (Botan.) nom d’un genre de plante dont voici les caracteres, selon Linnæus. Le calice particulier de la fleur est cylindrique court, droit, & subsiste après la chûte de la fleur ; la fleur est monopétale, faite en long tuyau qui s’élargit insensiblement, & forme une gueule avec une bordure unie. Les étamines sont cinq filamens pointus, plus courts que la fleur. Le germe du pistil est arrondi & placé au-dessous du calice : le stile est très-délié, & celui du pistil est gros & obtus. Le fruit à noyau est spherique, contenant une seule loge. La graine est osseuse, arrondie, & renferme un noyau de même figure. (D. J.)

MATULI, s. m. (Comm.) mesures des liquides dont on se sert en quelques villes de Barbarie. Le matuli de Barbarie est de trente-deux rotolis. Voyez Rotolis. Dictionn. de commerce.

MATUMA, s. m. (Hist. nat.) espece de serpent aquatique, qui se trouve dans les fleuves du Brésil, & qui ne sort jamais de l’eau ; on en rencontre qui ont 25 ou 30 piés de long. Ils ont les dents d’un chien, sont très-voraces, & attaquent les hommes & les animaux. Les couleurs de sa peau sont de la plus grande beauté, & c’est à son exemple, dit-on, que les sauvages du pays se peignent le corps de différentes couleurs.

MATURATIFS, adj. (Pharm.) remedes propres à aider la formation de la matiere purulente. Tels sont les oignons de lys, la levure de biere, le vieux levain, la bousse de vache, les gommes & les résines, les plantes émollientes & leurs pulpes. Et enfin, ce terme se dit de tous les remedes qui peuvent hâter la coction, l’atténuation, la préparation des humeurs nuisibles & génératrices des maladies, pour