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tincte, lorsqu’on ne lui donne qu’une partie de cette longueur.

Quand on veut se servir du microscope solaire, on doit rendre la chambre aussi obscure qu’il est possible, car c’est de l’obscurité de la chambre & de la vivacité des rayons du soleil que dépendent la clarté & la perfection de l’image. Les lentilles les plus utiles à ce microscope sont en général la quatrieme, la cinquieme ou la sixieme.

L’écran propre à recevoir l’image des objets est ordinairement d’une feuille d’un très-grand papier étendue sur un chassis qui glisse en-haut ou en-bas, ou qui tourne, comme on veut, à droite ou à gauche sur un pié de bois arrondi, à-peu-près comme certains écrans qu’on met devant le feu : on fait aussi quelquefois des écrans plus grands avec plusieurs feuilles du même papier collées ensemble, que l’on roule & déroule comme une grande carte.

Ce microscope est le plus amusant de tous ceux qu’on a imaginés, & peut-être le plus capable de conduire à des découvertes dans les objets qui ne sont pas trop opaques, parce qu’ils les représentent beaucoup plus grands qu’on ne peut les représenter par aucune autre voie. Il a aussi plusieurs autres avantages qu’aucun microscope ne sauroit avoir ; les yeux les plus foibles peuvent s’en servir sans la moindre fatigue ; un nombre de personnes peuvent observer en même tems le même objet, en examiner toutes les parties, & s’entretenir de ce qu’elles ont sous les yeux, ce qui les met en état de se bien entendre & de trouver la vérité ; au lieu que dans les autres microscopes on est obligé de regarder par un trou l’un après l’autre, & souvent de voir un objet qui n’est pas dans le même jour, ni dans la même position. Ceux qui ne savent pas dessiner, peuvent par cette invention prendre la figure exacte d’un objet qu’ils veulent avoir ; car ils n’ont qu’à attacher un papier sur l’écran, & tracer sur ce papier la figure qui y est représentée, en se servant d’une plume ou d’un pinceau.

Il est bon de faire remarquer à ceux qui veulent prendre beaucoup de figures par ce moyen, qu’ils doivent avoir un chassis où l’on puisse attacher une feuille de papier, & l’en retirer aisément ; car si le papier est simple, on verra l’image de l’objet presqu’aussi clairement derriere que devant ; & en la copiant derriere l’écran, l’ombre de la main n’interceptera pas la lumiere, comme il arrive en partie lorsqu’on la copie par-devant.

Le microscope solaire est encore une invention qui est dûe au génie du docteur Lieberkuhn prussien, membre de la société royale, à laquelle il a communiqué en 1748 ou environ, les deux beaux microscopes qu’il avoit inventés & travaillés lui-même, je veux dire le microscope solaire & le microscope pour les objets opaques ; ensuite Mrs Cuff & Adam, anglois, ont perfectionné ces ouvrages. Le microscope solaire du D. Lieberkuhn n’avoit point de miroir, & par conséquent ne pouvoit servir que pendant quelques heures du jour lorsqu’on pouvoit placer le tube directement contre le soleil ; mais l’application du miroir fournit le moyen de faire réfléchir les rayons du soleil dans le tube, quelque soit sa hauteur ou sa situation, pourvu qu’il donne sur la fenêtre. Phil. trans. n°. 458. sect. 9. de Baker, microscop. object. (D. J.)

MICROSCOPIQUE, objet, (Optiq.) Les objets microscopiques sont ceux qui sont propres à être examinés par les microscopes ; tels sont tous les corps, tous les pores, ou tous les mouvemens extrèmement petits.

Les corps extrèmement petits sont, ou les parties des plus grands corps, ou des corps entiers fort dé-

liés ; comme les petites semences, les insectes, les

sables, les sels, &c.

Les pores extrèmement petits sont les interstices entre les parties solides des corps ; comme dans les os, dans les minéraux, dans les écailles, &c. ou comme les ouvertures des petits vaisseaux ; tels que les vaisseaux qui reçoivent l’air dans les végétaux, les pores de la peau, des os, &c. des animaux.

Les mouvemens extrèmement petits sont ceux des différentes parties ou membres des petits animaux, ou ceux des fluides renfermés dans les corps des animaux ou des végétaux.

Sous l’un ou l’autre de ces trois chefs, tout ce qui nous environne peut nous fournir un sujet d’examen, d’amusement & d’instruction ; cependant plusieurs personnes savent si peu combien l’usage des microscopes est étendu, & sont tellement embarrassées à trouver des objets à examiner, qu’après en avoir considéré quelques-uns des plus communs, soit seuls, soit avec des amis, ils abandonnent leurs microscopes, comme n’étant pas d’un grand usage. Nous tâcherons de les détromper par quantité de faits que nous mettrons, dans l’occasion, sous les yeux du lecteur ; & peut-être que par ce moyen nous engagerons des curieux à employer agréablement & utilement leurs heures de loisir dans la contemplation des merveilles de la nature, au lieu de les passer dans une oisiveté pleine d’ennui, ou dans la poursuite de quelque passion ruineuse ; mais avant que de discuter l’examen des objets microscopiques, il faut parler de l’instrument qui les grossit à nos yeux.

On sait que les microscopes sont de deux sortes ; les uns simples, les autres doubles : le microscope simple n’a qu’une lentille ; le double en a au moins deux combinées ensemble. Chacune de ces especes a son utilité particuliere ; car un verre simple fait voir l’objet de plus près & plus distinct ; & la combinaison des verres présente un plus grand champ, ou, pour le dire en d’autres termes, elle découvre tout à-coup une plus grande partie de l’objet qu’elle grossit également. Il est difficile de décider lequel des deux microscopes on doit préférer, parce qu’ils donnent chacun une différente sorte de plaisir. On peut alléguer de grandes autorités en faveur de l’un & de l’autre ; Leeuwenhock ne s’est jamais servi que du microscope simple ; & M. de Hook a fait toutes ses observations avec le microscope double. Les fameux microscopes du premier consistoient dans une simple lentille placée entre deux plaques d’argent, qui étoient percées d’un petit trou, & il y avoit au-devant une épingle mobile pour y mettre l’objet, & l’appliquer à l’œil du spectateur. C’est avec ces microscopes simples qu’il a fait ces découvertes merveilleuses qui ont surpris l’univers.

Aujourd’hui le microscope de poche de M. Wilson, passe pour le meilleur ; & le microscope double de réflexion le plus estimé, est un diminutif perfectionné du grand microscope double de MM. Culpéper, Scarlet & Marshal. Nous avons donné la description relative à nos figures, de ces machines. Mais il importe beaucoup, avant que de passer à la méthode d’examen des objets microscopiques, de connoître la force des lentilles d’un microscope, & de découvrir la grandeur réelle des objets qu’on y présente.

De la surface des verres d’un microscope simple. La vue est incapable de distinguer un objet qu’on approche trop des yeux ; mais si on le considere au-travers d’une lentille convexe, quelque près que soit le foyer de cette lentille, on y verra l’objet très-distinctement, & le foyer de la lentille sera d’autant plus proche qu’elle sera plus petite ; de sorte que la force de cette lentille, pour grossir un objet, en sera plus grande dans la même proportion.