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sur l’autre, c’est alors qu’on les incline, afin que l’eau de gomme que les feuilles ont prise puisse s’en écouler plus facilement.

On les tient inclinés comme on veut, ou par le moyen d’une barre de bois posée par en-bas, & qui empêche leur extrémité inférieure de glisser, & d’une corde qui tient leur extrémité supérieure élevée. La corde les embrasse par-dessous, & va saisir par en-haut la barre qui porte d’un bout au fond du cuvier & qui appuie sur le bord opposé du cuvier, ou par le moyen de deux barres, dont l’une est haute & l’autre basse.

On peut encore faire égoutter les feuilles colorées par le moyen de deux longs chassis assemblés à angle ; l’angle aboutit à une rigole qui reçoit l’eau gommée qui s’écoule, & la conduit dans un vaisseau.

Voyez fig. 6. les chassis égouttant sur le cuvier a ; la corde b ; la barre qui soutient les chassis, & à laquelle la corde se rend c ; d le cuvier.

Voyez aussi fig. 7. les deux longs chassis avec leur angle posé dans la rigole ; a un des chassis ; b l’autre ; c, d, la rigole ; e le vaisseau qui reçoit l’eau gommée ; d, d, d, d, le bâti qui supporte le tout, & qui incline la rigole vers le pot à recevoir les égouttures d’eau gommée.

Il ne faut qu’un quart d’heure aux feuilles colorées pour se décharger du trop de gomme, & s’imbiber des couleurs.

Le papier qui doit être marbré n’aura été qu’à demi collé à la papeterie : le trop de colle empêcheroit les couleurs de prendre ; l’épaisseur de la latte qui s’éleve au-dessus des réseaux des cordes empêche que les cordes d’un chassis ne touchent à la feuille étendue sur le chassis qui est dessous.

Lorsque l’eau de gommé qu’on se réservera sera toute égouttée, on enlevera les feuilles de dessus les chassis, & on les étendra sur les cordes tendues dans l’attelier ou dans un autre endroit. Voyez fig. 8. a, a, a, a, des feuilles étendues ; b, l’étendoir ; c, un ouvrier qui étend.

Quand elles sont seches, on les leve de dessus les cordes, & on les cire, soit avec de la cire blanche, soit avec de la cire jaune, mais non grasse ; cette opération se fait légerement sur une pierre ou sur un marbre bien uni. Voyez fig. 9. un ouvrier qui cire.

On lisse les feuilles cirées. Voyez fig. 10. la lissoire & sa manœuvre ; a, fût de la machine ; b, piece qui prend le caillou, & qui s’emboîte dans le fût a ; c, c, poignées qui servent à mouvoir la boîte du caillou ; d, caillou emboîté ; e, planche ou perche qui fait ressort ; f, marbre sur lequel on pose la feuille ; g, bâti qui soutient le marbre ; h, ouvrier qui lisse.

On peut se dispenser de cirer en faisant entrer d’avance la cire dans le broyer des couleurs mêmes. Pour cet effet, on commence par faire bouillir la cire avec une goutte d’eau ; puis on la laisse refroidir ; à mesure qu’elle se refroidit, on la remue. Quand elle est froide, on en met gros comme une noisette sur un quarteron de laque, & trois fois autant sur un quarteron d’indigo. Pour le jaune & le blanc, on n’y en donne point.

Quand les feuilles sont lissées, on les ploye, on les met par mains de vingt-cinq feuilles la main ; on ne rejette pas les feuilles déchirées ; on les racommode avec de la colle. Voilà tout ce qui concerne le papier commun. Voici la fabrication de celui qu’on appelle placard ; mais voyez auparavant fig. 10. a un ouvrier à l’établi qui plie ; b, les feuilles ; c, le plioir ; d, tas de feuilles étendues ; e, tas de feuilles pliées.

Fabrication du placard. Vous broyerez votre la-

que à l’ordinaire. Quant à l’indigo, vous en triplerez

la dose, c’est-à-dire que vous mettrez trois cueillerées d’indigo sur une pinte d’eau, & quatre cueillerées du blanc d’Espagne, puis vous mêlerez bien le tout.

Vous employerez le verd, comme nous l’avons prescrit plus haut. Pour le jaune, vous prendrez de l’orpin jaune, vous le broyerez avec de l’ochre, vous mettrez sur quatre parties d’orpin seize parties d’ochre, ou quatre parties d’ochre sur une d’orpin, vous broyerez le tout avec gros comme une petite noisette de gomme adragant, & deux cueillerées de fiel de bœuf, vous en formerez comme une bouillie claire ; vous employerez le blanc comme nous l’avons dit.

Vous commencerez par faire vos eaux plus fortes que pour le papier commun ; vous jetterez le rouge en tapis, ensuite le bleu en mouches ; vous ferez cinq rangs de mouches, & six mouches sur chaque rang. Le premier rang occupera le milieu du baquet, & les deux autres rangs seront entre celui-ci & les bords du baquet : troisiemement, le verd en mouches & par rangs ; ces mouches de verd seront au nombre de six sur chaque rang, & chaque rang de verd entre les rangs du bleu : quatriemement, le jaune aussi en mouches, & entre le verd & le bleu ; chaque rang de jaune aura cinq ou six mouches : en dernier lieu, on semera le blanc par-tout en petites mouches comme des lentilles.

Cela fait, on prendra la pointe & l’on tracera des palmes, des frisons & autres figures.

Voyez fig. 11. a un ouvrier avec sa pointe b, son baquet c, qui fait cet ouvrage.

Travail du persillé. Le travail du persillé ne differe de celui du placard qu’en ce qu’au lieu de la pointe on prend le peigne à un seul rang de pointes ou dents, qu’on l’applique en haut, & qu’on le meut sans le retirer de gauche à droite, ni de droite à gauche, toujours en descendant, comme si l’on écrivoit du boustrephedon, lentement & serré, sans quoi le peigne entraîneroit la couleur de haut en-bas.

Travail du petit peigne. Il faut encore ici des eaux plus fortes. On couche les couleurs verticalement : premierement, le rouge en trois colonnes qu’on trace en passant légerement le pinceau à fleur d’eau de bas en-haut : secondement, le blanc qu’on prend avec la pointe ; on secoue la pointe, & l’on trace ensuite trois autres colonnes entre les trois colonnes de rouge : troisiemement, le bleu dont on formera trois colonnes entre le blanc & le rouge avec le pinceau : quatriemement, le verd dont on formera au pinceau trois colonnes entre le bleu & le rouge : cinquiemement, le jaune qu’on jettera en plaques entre le verd & le bleu seulement en deux colonnes. Il faut qu’il y ait cinq plaques de jaune sur chacune de ses colonnes, & l’on redoublera le jet sur chaque plaque pour les fortifier ; puis on prendra la pointe, & l’on tracera des zigzags de gauche à droite, ensorte que toute la hauteur du baquet soit divisée en sept parties égales. Après quoi, l’on se servira du peigne à cent quatre dents, on le placera à fleur d’eau au haut du baquet, & on le descendra parallelement à lui-même sans lui donner d’autre mouvement.

Si l’on veut pratiquer ici des petits frisons, on les exécutera avec un petit peigne à cinq pointes, & à cinq reprises sur toute la hauteur du baquet.

Les pinceaux dont on se sert pour coucher les couleurs, sont serrés & formés en plume.

Quand on ne veut qu’imiter un marbre, on jette, 1°. un jaune ; 2°. un rouge ; 3°. un bleu ; 4°. un noir ; 5°. un verd, & l’on couche la feuille.

De la marbrure de la tranche des livres. Quant aux livres qui doivent être dorés, & qu’il faut auparavant marbrer sur la tranche, on se sert des couleurs