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Le composé s’entend de celui qui demande plusieurs opérations de suite dans une distance considérable.

Quand on veut opérer sur le terrein, il faut être plusieurs pour porter les jalons, les remuer suivant la volonté du niveleur, changer & établir le niveau à chaque station. On ne doit point parler dans les grandes distances où la voix se perd facilement ; des signes dont on conviendra, feront connoître tout ce qu’on voudra dire ; si en alignant un jalon sur une ligne, il verse du côté gauche, il faut montrer avec la main, en la menant du côté droit, que ce jalon doit être redressé du côté droit ; comme aussi en haussant ou baissant la main, signifier qu’il faut baisser ou hausser un jalon.

Faites choix d’un tems doux sans vent, sans pluie, ni grand soleil ; toutes choses qui nuisent à la vue par les réfractions, qui causent bien des différences en haussant ou abaissant le rayon visuel ; un tems un peu sombre & couvert est plus favorable pour niveler, & les yeux découvrent plus facilement les objets éloignés.

Outre les jalons qui servent dans un nivellement fait en plat pays, il faut avoir encore des perches de 12 à 15 piés de long, pour mesurer par station la pente des montagnes ; les uns & les autres seront garnis par en-haut de cartons blancs coupés à l’équerre & immobiles.

Pour opérer, on établit le niveau suivant ce qui est dit au mot Niveau ; on se met à quelque distance du niveau comme à trois ou quatre piés ; on pose l’œil & on s’aligne sur la surface de la liqueur comprise dans les fioles, qui conduit votre rayon visuel AAA, voyez les Pl. suivant lequel on fait arrêter à la distance requise un jalon ou une perche, par des hommes qui les haussent ou les baissent jusqu’à ce que le carton se trouve juste à cette ligne de mire. Quand le niveleur a déterminé un point entre deux grandes perches avec un jalon portatif & garni de carton, on le marque à fleur de ce carton avec de la craie blanche ou noire sur les grandes perches. Il faut toûjours observer de partir d’un endroit déterminé & remarquable, afin qu’on puisse se régler là-dessus, & tenir le pié de l’instrument toûjours de la même hauteur dans toutes les stations, pour éviter l’embarras de soustraire des élévations différentes ; une mesure de quatre piés convient assez par-tout.

Premiere pratique. Niveler un terrein de 250 toises de longueur, sur cinq piés & demi de pente ; ce qui s’appelle un nivellement simple.

Soit les deux points donnés A & B, voyez les Pl. établissez l’instrument dans le milieu de ces deux distances, comme en C, posez un jalon garni d’un carton en A, & faites le hausser ou baisser, suivant la superficie des liqueurs comprises dans vos fioles, c’est-à-dire, jusqu’à ce qu’il se trouve juste à la ligne de mire DD ; retournez-vous ensuite sur l’autre terme du nivellement vers B, & posez une perche ou jalon de la même maniere que l’autre ; ensuite mesurant celui des jalons, dont la place est déterminée, tel que celui A, d’où vous êtes parti, prenez-en la hauteur depuis le pié jusqu’y compris le carton, laquelle est ici supposée de 4 piés, & reportez sur celui B la même mesure de 4 piés en contre-bas ; si ce dernier jalon ou perche B, déduction faite des 4 piés, a 9 piés & demi de haut, la pente sera de 5 piés & demi du point A à celui B.

Seconde pratique. Niveler une longueur de 800 toises, où il se trouve une gorge & un contre-soulevement sur 12 piés de pente, ce qui s’appelle un nivellement composé.

Soit à mesurer une grande distance, telle que la chûte de la montagne A (fig. 3.) jusqu’en B, avec la sujétion de commencer en A, où est le bâtiment,

choisissez le chemin le plus commode & le moins inégal d’A en B, en le coupant en cinq stations ; établissez le niveau au point A, & dirigez-le vers B, où il sera nécessaire de planter un jalon pour mieux aligner ; faites tenir une perche à la distance d’environ 100 toises du bâtiment, comme en C supposé de 16 piés de haut, dont vous diminuerez la hauteur du pié du niveau jusqu’à la superficie de l’eau, laquelle est supposée de 4 piés, les 12 piés restant seront l’élévation du point A sur celui C ; transportez ensuite le niveau à pareille distance de C, c’est-à-dire à 100 toises par delà, comme en E, & dirigez le sur la perche CD, où vous marquerez en F avec de la craie le coup de niveau, retournez-vous sur l’autre terme qui sera à 100 toises par-delà l’instrument, comme en G, & faites-y mettre la perche GH suivant la ligne de mire II, & vous diminuerez en contre bas les 4 piés de la hauteur du niveau : ainsi des 12 piés qu’on suppose qu’a cette perche, il reste 8 piés de baissement. On posera à la troisieme station le niveau dans le milieu du ventre ou gorge K de 250 toises, & se retournant successivement sur les deux perches GH & LM, qu’on aura eu soin de faire poser sur l’alignement, on donnera deux coups de niveau, dont le premier se trouvant au pié de la perche GH, & dans la ligne de mire K, ne donnera rien à compter ; le second donnera deux piés de haussement en L, que vous marquerez avec de la craie sur la perche LM ; reportez ensuite le niveau en O, qui est le milieu du quatrieme alignement de 90 toises, vous donnerez deux coups de niveau sur les perches posées en LM & NP ; & ayant diminué les 4 piés de l’instrument sur la perche M, qui a 10 piés de long, dont deux ont déja été marqués dans le dernier nivellement, il en reste 8, dont 4 pour la hauteur de l’instrument ; ce sera 4 piés de reste, qu’il faut marquer pour le haussement du niveau : enfin ayant établi le niveau en Q au milieu de ce terme qui est de 160 toises, diminution faite des 4 piés de la hauteur de l’instrument sur la perche PN, on trouve 2 piés de haussement du niveau ; faites ensuite une table fig. 4. où seront marqués dans une colonne tous les haussemens du niveau, & les baissemens dans une autre ; on trouvera à la premiere station 12 piés de baissement, huit à la seconde, 2 de haussement à la troisieme, 4 de haussement à la quatrieme, & deux de haussement à la cinquieme & derniere station ; ajoutez ensemble les haussemens, & faites une autre somme des baissemens ; soustrayez l’une de l’autre, c’est-à-dire, la petite de la grande, le reste sera leur différence, qui sera l’évaluation du point A sur celui B, qui est de 12 piés, suivant la table : ainsi une source trouvée sur la montagne au point A, qui sera conduite en B, aura 12 piés de pente.

Troisieme pratique. Niveler la descente d’un côteau sans gorge ni remontée.

Soit le regard A fig. 5. d’une source trouvée sur le haut d’un côteau, d’où l’on veut conduire l’eau au bassin B, & savoir quelle hauteur aura le jet d’eau, posez le niveau au bord du regard A ; établissez-le suivant ce qui a été dit ci-dessus, & pointez le vers le bas B ; faites tenir une perche à quelque distance du niveau, comme en C, en la faisant hausser ou baisser, jusqu’à ce que le haut du carton se trouve juste à la ligne de mire DD, vous prendrez ensuite la hauteur qu’il y a depuis la superficie de l’eau du regard A jusqu’à la liqueur comprise dans les fioles, que vous diminuerez & marquerez en contre bas sur la perche C, en commençant par en-haut ; on comptera ce qui reste d’E en C, supposé ici de 4 piés : ayez un papier où vous chifrerez cette premiere station du nivelle-