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percée comme celle de tous les piés des tuyaux, se place sur le sommier pour en recevoir le vent & le porter à l’anche : on conçoit, bien par conséquent, qu’il est nécessaire que la boîte s’applique exactement contre la bague du tuyau ; ensorte qu’il n’y ait aucune ouverture, puisque sans cela le vent qui vient du sommier dans la boîte au lieu de passer par l’anche, passeroit par les ouvertures, au lieu de redescendre dans la partie conique de la boîte, si la bague en s’appliquant exactement aux parois de la même boîte, ne lui fermoient exactement le passage.

Une attention que l’on doit avoir, est que la languette que nous avons dit être élastique, ne touche point l’anche dans sa partie inférieure lorsqu’elle n’est point comprimée, mais cependant elle doit en être très-peu éloignée.

La construction des jeux d’anches étant expliquée, nous allons faire entendre la formation du son dans ces sortes de tuyaux, en faisant usage des principes établis ci-devant. L’air condensé ou le vent poussé par les soufflets dans le sommier, entre dans la boîte du tuyau d’anche par l’ouverture de son pié, on peut regarder cette boîte comme la chambre des tuyaux de bois, puisqu’elle fait le même effet, il s’y condense & fait effort en tous sens pour sortir, mais il ne le peut que par l’anche, puisque nous avons dit que la boîte étoit exactement fermée ; ainsi il ouvrira davantage l’anche en écartant la languette, il se fera alors une explosion subite de l’air contenu dans la chambre ou boîte ; mais comme la languette qui est élastique a été écartée de son point de repos, elle fera effort pour s’y remettre ; mais après y être revenue, elle ne s’y arrêtera pas, elle continuera jusqu’à ce qu’elle soit appliquée sur la face de l’anche, puisqu’il est connu que les corps élastiques fixes par une de leurs extrémités oscillent comme un pendule. Dans l’instant où la languette sera appliquée sur l’anche, l’air qui vient continuellement dans la boîte s’y condensera de nouveau ; mais dans le même tems, la languette s’écartera de l’anche étant ramenée à son point de repos par sa force élastique, il se fera une seconde explosion, & la languette sera relevée comme la premiere fois, ensuite sa force élastique la ramenera contre l’anche ; ainsi alternativement & d’autant plus fréquemment, que la languette sera plus courte ou qu’elle sera plus élastique, ou que le vent sera plus fort ; cet effet est le même que celui du tremblant fort que l’on peut regarder comme une anche sans tuyau. Voyez Tremblant fort.

Ainsi on voit que le son du tuyau dépend de plusieurs causes variables ; c’est ce qui fait que jusqu’à présent personne n’a donné le vrai diapason des anches, faute de discerner les trois causes dans un seul effet. Nous allons essayer de donner une regle certaine pour trouver le diapason, en supposant les deux dernieres causes constantes.

Tirez la ligne A B, fig. 50. n°. 2. à discrétion ; divisez cette ligne en autant de parties égales qu’il y a de touches au clavier, ou que le jeu dont vous cherchez le diapason, doit avoir de tuyaux ; élevez sur les points de division, autant de perpendiculaires, dont vous marquerez le pié des noms ut, re, mi, fa, &c. selon la suite des touches du clavier.

Ensuite, construisez une anche d’une grandeur & grosseur quelconque que vous monterez d’une languette convenable ; vous pousserez ou tirerez la rasette jusqu’à ce que le son que l’anche rend soit le plus sonore, le plus plein & le plus agréable qu’il est possible, sans vous inquiéter du ton qu’elle rendra ; ce ton étant trouvé, cherchez son unisson au clavecin ; ce sera, par exemple, le sol de l’octave des basses ; démontez le tuyau sans déranger la ra-

sette, & mesurez avec un compas la distance de la

rasette à l’extrémité de la languette, ou la longueur de la partie vibrante de celle-ci que vous porterez sur la ligne Ea que je suppose être la perpendiculaire correspondante au sol, & y ferez une marque.

Construisez ensuite une autre anche, mais beaucoup plus petite que vous monterez, langayerez & ferez parler le mieux qu’il sera possible, ainsi qu’il a été dit ; cherchez son unisson au clavecin, ce sera, par exemple, le mi de l’octave des dessus ; mesurez exactement la longueur de la partie vibrante de la languette de cette anche que vous porterez sur la ligne perpendiculaire correspondante, que je suppose Fx, où vous ferez un point. Par les deux marques faites sur les perpendiculaires Ea, Fx, tirez la ligne CD, elle coupera toutes les autres perpendiculaires aux points yyyy, &c. les parties de ces perpendiculaires interceptées entre leur pié & la ligne CD, seront la longueur de la partie vibrante des languettes d’anches qui rendront les sons correspondans aux touches que les perpendiculaires représentent. Cette méthode qui est certainement ingénieuse, est autant exacte que le peut être une chose où des causes physiques incommensurables concourent à former l’effet ; de cette nature est, par exemple, l’élasticité des languettes, de l’égalité de laquelle il est très-difficile de s’assurer.

Les variétés produites par cette cause sont quelquefois si considérables, qu’il arrive qu’une anche rend un son beaucoup plus grave que celui d’une autre anche, quoique sa languette soit plus courte, selon notre diapason, ce devroit être tout le contraire ; en ce cas, le meilleur remede est de diminuer l’épaisseur de la languette, ou en mettre une autre, si elle se refuse à toutes les corrections. On doit être assuré qu’un jeu d’anche ne sera parfait, qu’autant qu’il suivra exactement le diapason que nous avons prescrit.

On trouvera les diametres proportionnels des anches en cette maniere ; on mettra sur la perpendiculaire aE le diametre de l’anche qui a donné cette ligne, & sur la perpendiculaire xF celui de l’autre anche ; on tirera par les points une ligne CD qui interceptera dans les perpendiculaires des lignes qui seront prises pour diametres des anches correspondantes : enfin, on ajoutera à chacun une longueur convenable pour que la rasette ait dequoi se placer & remonter, & que l’on puisse assurer l’anche dans sa noix.

Lorsque les tuyaux d’anche sont grands, on les fait de deux pieces, celle d’en-bas qui reçoit la grande s’appelle tube, voyez Tube. Cette disposition n’ôte ni n’ajoute rien à la perfection du tuyau, elle est seulement une commodité pour le facteur, en ce que de trop grands tuyaux ne sont pas maniables.

Les jeux dont un orgue complet est composé, sont la montre de seize piés ou de huit ; si l’orgue n’a point de seize pié, alors c’est le jeu qu’on appelle le huit piés ouvert. qui en tient lieu, le bourdon de seize piés & la bombarde qui est à l’unisson, le plus grand tuyau de ces jeux sonnant l’ut grave de l’octave des basses a seize piés de long.

Les jeux sonnant le huit piés ou l’unisson du clavecin, & dont le plus grand tuyau a huit piés, sont le bourdon de huit ou quatre piés bouché ; car, ainsi qu’il a été dit, les tuyaux bouchés n’ont que la moitié de ceux qui étant à l’unisson seroient ouverts.

Le huit piés ouvert, la trompette, le cromorne & la voix humaine.

Le jeu qui est à la quinte du huit piés est le gros nazard.

Ceux qui sonnent le quatre piés ou l’octave du clavecin, sont le prestant sur lequel on fait la parti-