Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 11.djvu/889

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

De la base de ces trois feuilles, sortent des petits paquets de fleurs rangées de la même façon que celles du souchet ; mais ces petits paquets ne sont point élevés sur des pédicules ; ils occupent immédiatement le centre des trois feuilles entre lesquelles ils sont placés, & y forment une petite tête. Les feuilles qui naissent de la racine & au-bas des tiges, ressemblent à celles du souchet ; cette plante que les Malgaches nomment sanga-sanga, vient en grande abondance dans les rivieres & sur leurs bords, mais particulierement dans la riviere de Tartas, auprès de Foule-Pointe, à Madagascar. Les Malgaches emploient l’écorce des tiges pour faire leurs nattes ; ils en font aussi les voiles & les cordages de leurs bâteaux de pêche, & des cordes pour leurs filets.

Cette espece de papyrus jusqu’ici inconnue, & différente du papyrus de Sicile par la disposition de ses paquets de fleurs, nous montre qu’il y a parmi les especes de cyperus, deux sortes de plantes qui peuvent aisément se confondre avec le papyrus des Egyptiens ; soit qu’on les considere du côté des usages particuliers auxquels les habitans des lieux où elles croissent les ont destinées ; soit qu’on compare leur forme, leur maniere de croître, & tous les points par lesquels elles paroissent se ressembler : comparaison qui peut se faire par le moyen des traditions, telles qu’on les a dans Théophraste & dans Pline, & encore à l’aide de la figure & de la description du papyrus du Nil, que Prosper Alpin a données, après l’avoir observé sur les lieux ; mais si l’on a égard au témoignage de Strabon, qui papyrum non nisi in Ægypto & solâ Indiâ gigni pro constanti affirmat, on ne sera pas éloigné de croire que le papyrus de l’île de Madagascar, située à l’entrée de l’Inde, pourroit être le même que celui de l’Egypte.

Quoi qu’il en soit, les habitans de cette île n’en savent tirer aucun profit, tandis que les Egyptiens ont immortalisé leur papyrus par l’art d’en faire ce papier célebre, quo usu maximè humanitas, vita constat & memoria, pour me servir des termes de Pline. Voyez donc Papier d’Egypte, Arts anciens. (Le chevalier de Jaucourt.)

PAQUAGE, s. m. (Négoce de saline.) ce terme se dit de l’arrangement qui se fait du poisson salé dans les gonnes, hambourgs, barrils, & autres futailles, en y foulant le poisson & le pressant bien fort, pour y en faire entrer le plus qu’il est possible.

PAQUE des juifs, (Critiq. sacrée.) dans la vulgate pascha, en chaldaïque phase, mot qui signifie passage. Cette fête fut établie en mémoire du passage de la mer Rouge, & de celui de l’ange exterminateur, qui tua tous les premiers-nés des Egyptiens, & épargna toutes les maisons des Israélites marquées du sang de l’agneau, est enim phase, id est transitus Domini, Exod. xij. 11.

Voici les cérémonies prescrites aux Juifs pour la célébration de cette fête : dès le dixieme jour du premier mois, qui s’appelloit Nisan, ils choisissoient un agneau mâle & sans défaut qu’ils gardoient jusqu’au quatorze, & ce jour, sur le soir, ils l’immoloient ; & après le coucher du soleil ils le faisoient rôtir pour le manger la nuit, avec des pains sans levain & des laitues sauvages : ils se servoient de pains sans levain, parce qu’il n’y avoit pas de tems pour faire lever la pâte, & sur-tout afin que ce pain insipide les fît ressouvenir de l’affliction qu’ils avoient soufferte en Egypte ; ils y mêloient les laitues ameres, pour se rappeller l’amertume & les angoisses de leur servitude passée.

On leur ordonna de manger un agneau tout entier dans une même maison, ayant les reins ceints, des souliers aux piés & un bâton à la main, c’est-à-dire en posture de voyageurs prêts à partir ; mais cette derniere cérémonie ne fut d’obligation que la nuit

de la sortie d’Egypte On teignoit du sang de l’agneau immolé le haut & les jambages de chaque maison, afin que l’ange exterminateur voyant ce sang, passât outre, & épargnât les enfans des Hébreux.

Enfin ils eurent ordre d’immoler chaque année un agneau mystérieux & d’en manger la chair, afin d’en conserver la mémoire du bienfait de Dieu, & du salut qu’ils recevoient par l’aspersion du sang de cette victime. Il leur fut défendu d’user du pain levé pendant toute l’octave de cette fête ; & l’obligation de la célébrer étoit telle que quiconque auroit négligé de le faire, étoit condamné à mort. Exterminabitur anima illa de populis suis. Num. ix. 13.

Le mot de pâque signifie dans l’Ecriture 1° la solemnité de pâque, qui duroit sept jours ; 2° le jour même auquel on immoloit l’agneau le quatorzieme de la lune, Luc xxij. 1 ; 3° le sabbat qui arrivoit dans la semaine de pâque ou des azymes, ce qui est nommé le parasceve de pâque, Jean xix. 14 ; 4° l’agneau paschal qu’on immoloit le quatorzieme jour de la lune du premier mois, Luc xxij. 7 ; enfin Jesus-Christ lui-même est appellé notre pâque ou l’agneau paschal, I. Cor. v. 7. (D. J.)

Paque des Chrétiens, (Critiq. sacrée.) la pâque des Chrétiens est la fête qu’ils célebrent tous les ans en mémoire de la résurrection du Christ : on l’appelle pâque à cause de son rapport avec celle des Juifs.

Dans le premier siecle de l’Eglise, les Chrétiens suivoient ordinairement les Juifs pour le tems de la célébration de la pâque : seulement les uns l’observoient le même jour que les Juifs, c’est-à-dire le quatorzieme jour de leur premier mois du printems, appellé Nisan, sur quelque jour de la semaine que tombât ce quatorzieme de la lune, & les autres ne la célébroient que le dimanche d’après. Ceux qui la célébroient le même jour que les Juifs, sans aucun égard au jour de la semaine, prétendoient suivre en cela l’exemple des apôtres saint Jean & saint Philippe, & les autres celui de saint Pierre & de saint Paul, qui avoient toujours, à ce qu’ils disoient, célébré cette fête le dimanche qui suivoit immédiatement le 14 de la lune.

Tandis que ceux de la circoncision qui avoient embrassé le christianisme, & qui pourtant observoient toujours la loi de Moïse, aussi-bien que celle de l’Evangile, entretinrent la communion avec l’Eglise ; cette diversité ne causa point de démêlé. Mais quand ils s’en furent séparés, l’Eglise jugea à propos de s’écarter aussi de leur usage à cet égard ; &, après plusieurs assemblées & plusieurs conciles, on résolut que la pâque ne s’observeroit plus le quatorzieme jour de la lune, comme cela se pratiquoit parmi les Juifs ; mais le dimanche d’après, & tout le monde reçut ce réglement, hormis les Eglises d’Asie, qui prétendoient avoir pour elles l’exemple des apôtres saint Jean & saint Philippe, & le saint martyr Polycarpe qui ne voulut jamais s’en écarter.

Victor, évêque de Rome, les excommunia à cause du refus qu’elles firent de s’y conformer. Tant l’esprit de domination commença promptement à se glisser dans ce siege ! Car ceci arriva dès l’an 197. Mais Irénée & la plûpart des autres chrétiens de ce tems-là blâmerent la conduite de Victor comme téméraire & injuste. Cependant la dispute continua à s’échauffer, & les chrétiens d’Asie qui soutenoient leur ancien usage, quoique traités par les Occidentaux de quartodecimans, parce qu’ils observoient, comme les Juifs, le quatorzieme de la lune, conserverent cet usage jusqu’à ce qu’enfin au concile de Nicée l’an 325 elles l’abandonnerent ; & cette dispute tomba. Depuis ce tems-là, le premier jour de la semaine, en mémoire de la résurrection de Jesus-Christ arrivée ce jour-là, a toujours été regar-