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rut fort âgé l’an 596, laissant la tutelle de son fils à son frere Attale.

Celui-ci commença sa régence par une action glorieuse, ce fut de rétablir Ariarathe dans le royaume de Cappadoce. Il se signala par plusieurs autres faits, & mourut l’an 616 ; ensuite de quoi son pupille Attale III. regna seul.

Ce prince fut surnommé Philometor, en vertu de sa piété pour sa mere, qui même fut cause de sa mort ; car comme il lui creusoit un tombeau, il fut frappé du soleil sur la tête, & mourut en sept jours. Il aima extrèmement l’agriculture, & même il composa sur ce sujet des livres qui n’étoient pas inconnus à Varron, à Pline & à Columele. Il entendoit très-bien la matiere médicale & la fonte des métaux ; mais il ternit ses vertus & ses talens par un penchant à la cruauté. Il fit mourir plusieurs personnes illustres, ce qui le jetta dans une triste mélancholie ; il se couvrit alors, pour ainsi dire, de sac & de cendre, abandonna le soin des affaires, & ne s’occupa que du soin de son jardin. Il mourut environ l’an 621 ; & comme il n’avoit point d’enfans, il institua pour son héritier le peuple romain.

Ainsi finit le royaume de Pergame, qui dans l’espace de 150 années étoit devenu fort puissant, & où la magnificence fut si éclatante, qu’elle passa en proverbe. Il suffit de lire les Poëtes & leurs commentateurs pour n’en pas douter :

Attalicis conditionibus
Nunquam dimoveas.


C’est Horace qui parle ainsi des richesses d’Attale. Properce en dit bien davantage :

Nec mihi tunc fulcro sternatur lectus eburno
Nec sit in Attalico mors mea mixta toro.

Eleg. xiij. liv. II.

Attalicas supra vestes, atque omnia magnis
Gemmea sint ludis, ignibus ista dabis.

Eleg. xvij. l. III.

Les tapisseries ne furent connues à Rome que depuis qu’on y eut transporté celles d’Attalus. Ce prince fut l’inventeur de la broderie d’or : aurum intexere in eâdem Asiâ, invenit Attalus rex.

Enfin je ne dois pas oublier de dire que l’émulation de Ptolomée, roi d’Egypte, & d’Eumenès, roi de Pergame, à qui dresseroit une plus belle bibliotheque, fut cause que le roi d’Egypte fit interdire le transport du papier ; mais l’on trouva à Pergame l’art de préparer des peaux, c’est-à-dire le parchemin, pour y suppléer. C’est donc encore à cette ville de Mysie qu’est dûe la gloire de l’invention d’une chose qui assure aux hommes une sorte d’immortalité.

M. l’abbé Sevin a donné dans le recueil des Inscriptions, tom. XII. in-4o. trois savans mémoires sur les rois de Pergame ; c’est l’histoire complette de ce royaume : il faut la lire, elle ne laisse rien à desirer. J’ajouterai seulement qu’Athénodore, surnommé Cordylion, célebre philosophe stoïcien, étoit de Pergame, où il demeura une grande partie de sa vie, considéré de tout le monde, & refusant constamment les graces & les honneurs que les rois & les généraux voulurent lui faire. Caton le jeune étant en Asie à la tête d’une armée, & ayant oui parler du grand mérite de cet homme illustre, souhaita extrèmement de l’avoir auprès de lui ; mais persuadé qu’une simple lettre ne pourroit l’engager à sortir de sa retraite, il prit le parti de se rendre lui-même à Pergame, capitale du royaume d’Attale, & à force de sollicitations & de prieres, il engagea Athénodore à le suivre dans son camp, & de-là à Rome, où il revint avec lui en triomphe, plus content de l’acquisition qu’il venoit de faire, que Lucullus & Pompée ne pouvoient l’être de toutes leurs conquêtes. Athénodore demeura jus-

qu’à sa mort avec Caton, dans la maison duquel il mourut, ainsi que nous l’apprend Strabon, l. XIV. pag. 674. (Le Chevalier de Jaucourt.)

PERGAMO, (Geogr. mod.) ville bâtie sur les ruines de Pergante, dans la grande Mysie, & dont on peut voir l’article n°. 4.

Pergamo est une ville de la Natolie, à 34 milles de Smyrne, & à 20 de Thyatire. Elle est assise au pié d’une montagne qu’elle a au nord, dans une belle plaine, fertile en grains, où passent le Titanus & le Caïcus, qui se dechargent dans la riviere d’Hermus. Voici ce qu’en disoit M. Spon dans le dernier siecle.

A côté de la ville passe le ruisseau rapide appellé anciennement Selinus, qui court au S. S. E. & se va rendre dans le Caïcus. De l’autre côte du Selinus il y a une église qui portoit le nom de Sainte Sophie, & qui est convertie présentement en mosquée. Dans le quartier oriental de la ville, on voit les ruines d’un palais ; c’étoit peut-être la demeure des rois du pays. De toutes les colonnes qui enrichissoient cet édifice, il n’en reste que cinq de marbre poli, hautes seulement de 21 piés, & l’on eu voit encore quelques-unes de l’autre côté de la rue.

Vers la pointe méridionale de la ville, il y a aux deux côtés du grand chemin, deux petites collines artificielles sur lesquelles étoient deux forts pour garder l’entrée de la ville, & au levant il y en avoit deux autres semblables. On voit près de-là un grand vase de marbre de 21 piés de tour, gravé d’un bas-relief d’hommes à cheval.

Le long de la montagne, vers le S. O. se voient les ruines d’un aqueduc, qui a encore six arcades, sur un ruisseau, & au midi de ces arcades, il y en a six autres avec de grandes voûtes, que les Turcs appellent kisserai. De-là en tirant encore plus vers le S. on apperçoit les ruines d’un théâtre sur le penchant de la colline.

Parmi les débris de marbre, on trouve une inscription ancienne, consacrée par le sénat & par le peuple de Pergame à l’honneur de Caïus Antius Aulus Julius Quadratus. L’inscription porte qu’il avoit été deux fois consul, & proconsul d’Asie, qu’il avoit eu plusieurs emplois dans diverses provinces particulieres en Candie & en Cypre ; enfin, qu’il avoit été éparque de Syrie, sous l’empereur Trajan, & grand bienfaiteur de Pergame.

Les Chrétiens de Pergamo sont aujourd’hui en pauvre état, puisqu’ils ne sont qu’au nombre d’une douzaine de familles qui cultivent la terre ; la ville n’est peuplée que d’environ deux mille turcs. Voilà les successeurs des Eumenès & des Attales.

Télephe, grammairien, naquit à Pergamo vers l’an 118 de Jesus-Christ. Il composa l’histoire de sa patrie, les vies des poëtes comiques & tragiques, & un grand traité des lois, des usages & des tribunaux d’Athènes. (D. J.)

PERGANTIUM, (Géog. anc.) ville de la Ligurie. C’est aujourd’hui Bregançon, sur la côte de Provence, vis-à-vis les îles d’Hières ; car la Ligurie s’est autrefois étendue jusques-là.

PERGASE, s. f. (Hist. d’Athènes.) l’une des démarchies ou intendances, selon lesquelles le pays de l’Attique étoit distribué. La pergase se trouvoit dans la tribu érechthéïde. (D. J.)

PERGE, (Géog. anc.) Perga, ville de Pamphylie, selon Strabon, l. XIV. p. 667. Ptolomée, l. V. c. v. & Pline l. V. c. xxvij. Elle étoit dans les terres, à 8 milles de la mer. Ortelius dit qu’on la nomme présentement Pirgi.

Pomponius Mela, l. I. c. xjv. la place entre les fleuves Cestron & Cataractes, & il nous apprend qu’il y avoit un temple de Diane Pergée, ainsi appellée du nom de cette ville. Ce temple, selon Strabon, étoit situé sur une hauteur voisine ; il étoit fort an-