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Dieu avoit opérées pour l’en délivrer, de son introduction dans la terre de Chanaan ; & il la terminoit par ces paroles : C’est pour quoi j’offre maintenant les prémices des fruits de la terre que le Seigneur m’a donnés. On voit par-là quel étoit le motif & le fondement de cette cérémonie religieuse. Après ces mots, il mettoit son panier sur l’autel, se prosternoit & s’en alloit. La Misna parle fort au long de ce qui regarde les prémices, dans les traités intitulés Thrumoth & Becorim.

Il y avoit une autre espece de prémices qu’on payoit au Seigneur, & dont il est fait mention dans les Nombres, ch. xjv. vers. 19 & 20. Lorsqu’on avoit paîtri le pain dans chaque famille, on en mettoit à part une portion qui se donnoit au prêtre ou au lévite qui demeuroit dans la ville ; que s’il ne s’y trouvoit ni prêtre ni lévite, on la jettoit au four & on la laissoit consumer par le feu. La loi n’en avoit pas fixé la quantité ; mais saint Jérôme dit que la coutume & la tradition l’avoient déterminé entre la quarantieme & la soixantieme partie de ce qu’on paîtrissoit. Philon, lib. de præmiss. sacerdot. en parle comme d’une coutume usitée parmi tous les Juifs. Léon de Modene cérém. des Juifs, part. II. ch. jx. témoigne qu’elle s’observe encore aujourd’hui : c’est un des trois préceptes qui regardent les femmes, parce que ce sont elles ordinairement qui font le pain. Lorsqu’on a fait un morceau de pâte gros à-peu-près comme quarante œufs, on en prend une petite partie dont on fait une espece de gâteau qu’on jette au feu en disant : Soyez beni, Seigneur notre Dieu, roi du monde, qui nous avez sanctifié par vos préceptes, & qui nous avez commandé de séparer un gâteau de notre pâte. Les rabbins tiennent qu’on n’est obligé de payer les prémices que dans la terre promise, qu’on doit donner au-moins la vingt-quatrieme partie de la masse qu’on a paîtrie, & que les boulangers n’en doivent que la quarante-huitieme.

On donne aussi dans l’ancien Testament le nom de prémices aux offrandes de dévotion que les Israëlites apportoient au temple, pour y faire des repas de charité, auxquels ils invitoient leurs parens, leurs amis, & les lévites qui étoient dans les villes ; aussi bien qu’aux offrandes qu’on faisoit de tous les premiers nés. Voyez Premiers nés.

Le nom latin de prémices, primitiæ, se prend dans l’Ecriture non-seulement à la lettre pour les prémices des fruits de la terre, & les offrandes qu’on faisoit au Seigneur, mais aussi pour ce qu’il y a d’excellent en chaque chose. Par exemple, S. Paul, Rom. viij. 23, dit que les Chrétiens ont les prémices du S. Esprit, primitias Spiritus habentes, c’est-à-dire une plus grande abondance de l’esprit de Dieu, & des dons plus parfaits que n’en avoient eu les Juifs. Ailleurs il dit que Jesus-Christ est ressucité d’entre les morts, comme les prémices de ceux qui sont décédés : primitiæ dormientum. I. Cor. xxv. 20. Il est appellé dans l’apocalypse le premier né des morts, c’est-à-dire le premier des ressucités par sa propre vertu, primogenitus mortuorum ; & dans l’épîtr. 2 aux Thessalonic. c. j. v. 12. S. Paul leur dit qu’ils sont comme des prémices que Dieu a choisis pour les sauver, elegit vos Deus primitias in salutem, par une distinction particuliere, comme on choisit les prémices parmi ce qu’il y a de plus exquis dans les fruits pour les offrir au Seigneur. Calmet, Dictionn. de la Bible.

Prémices, (Jurisprud.) primitias, sont les premiers fruits qu’on recueille de la terre ou des animaux.

Il étoit d’usage dans l’ancien Testament d’offrir les prémices au prêtre : il est fait mention de ces oblations dans l’Exode.

Elles devinrent même de précepte, suivant le Lévitique, ch. xxiv. feretis manipulos spicarum primitias messis vestræ ad sacerdotem ; & dans le livre des Nom-

brès, ch. 5. il est dit qu’elles appartiennent au prêtre, omnes primitiæ quas offerent filii Israel ad sacerdotem pertinent. Ces prémices se payoient depuis la trentieme jusqu’à la cinquantieme partie.

Suivant le Deuteronome, chap. xiv. on étoit aussi obligé d’offrir les premiers nés des troupeaux, primogenita de jumentis & ovibus suis.

Les Israélites payoient en outre la dixme.

Dans les premiers siecles de l’Église, les fideles mettoient tous leurs biens en commun ; les ministres de l’Église vivoient d’oblations en général, sans qu’il y eût aucun précepte pour leur donner les prémices ni la dixme.

La premiere rétribution qui fut établie en leur saveur, ce fut la dixme.

Alexandre II. y ajouta les prémices ; il se fonda, pour établir ce nouveau droit, sur l’ancien Testament. Ces prémices étoient offertes sur l’autel, & bénites à la messe. C’est à ces fruits que s’appliquoit cette priere qui se dit au canon de la messe. Per quem hæc omnia Domine semper bona creas, santificas, benedicis & præstas nobis, &c. Présentement que les prémices ne s’offrent plus ainsi, ces paroles s’appliquent au pain & au vin déja consacrés.

La quotité des prémices n’étoit pas fixée par la loi de Moïse. Saint Jérôme tient que les rabbins établirent qu’elle seroit au-moins du soixantieme, & qu’elle n’excéderoit pas le quarantieme ; ce que Frapaolo dit avoir été imité chez les siens, ayant établi le quarantieme, qu’on appelle aujourd’hui le quart.

Dans un concile de Bordeaux tenu en 1255, on fixa les prémices depuis la trentieme jusqu’à la quarantieme.

Dans un autre concile tenu à Tours en 1282, il fut réglé que les prémices seroient estimées au-moins à la soixantieme partie.

Présentement l’obligation de donner les prémices outre la dixme, n’est point de droit commun ; cela dépend de l’usage, & le droit de les percevoir est prescriptible par 40 ans. Voyez d’Hericourt, Fuet, Duperray & Bouvot, tome I. verbo dixme, quest. 2. (A)

PREMIER, adj. (Gramm.) Ce mot s’applique dans un grand nombre de cas différens. On dit de celui qui se présente avant tous les autres dans un compte à faire, qu’il est le premier ; dans un lieu, qu’il occupe la premiere place : dans un ordre de choses distinguées par des attributs, qu’il est le premier ; dans le tems, &c. Voyez les articles suivans.

Premier, (Géom.) On appelle figures premieres, en Géométrie, celles qui ne peuvent être divisées en d’autres figures plus simples qu’elles. Voyez Figure. Tels sont le triangle parmi les figures planes, & la pyramide parmi les solides ; car toutes les figures planes sont composées de triangles, & toutes les solides sont composées de pyramides.

Les nombres premiers ou simples sont ceux qui n’ont point d’autres diviseurs qu’eux-mêmes, ou que l’unité ; ainsi 3 est un nombre premier, parce qu’il n’est divisible exactement que par lui-même, ou par 1. Le nombre 5 est aussi un nombre premier, &c.

Quand on compare un nombre à un autre, & que ces deux nombres n’ont aucun commun diviseur différent de l’unité, on les appelle nombres premiers entr’eux ; ainsi 4 & 9 sont des nombres premiers entr’eux, parce qu’il n’y a aucun diviseur de 9 qui le soit aussi de 4 ; par où vous voyez que des nombres premiers entr’eux peuvent fort bien n’être pas des nombres premiers, puisque 4 & 9 considérés séparément, ont des diviseurs différens de l’unité ; mais des nombres premiers sont nécessairement premiers entr’eux.

Pour trouver la suite des nombres premiers, il n’y a qu’à parcourir tous les nombres depuis 1 jusqu’à