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diat ; quels autres sont dûs à des combinaisons nouvelles, &c. & que cette théorie très-transcendante, & qui jusqu’à présent n’a pas été publiée, est une de ces subtilités de pure spéculation, & de l’ordre des problèmes très-compliqués sur les objets scientifiques de tous les genres, qui n’ont d’autre mérite que celui de la difficulté vaincue. J’ai cité dans un mémoire sur l’analyse des végétaux, (Mémoires présentés à l’académie royale des Sciences, par divers savans, &c. vol. II.) comme un exemple de ces théories chimiques très-compliquées, celle de la préparation du sublimé corrosif à la maniere d’Hollande, & celle que Mender a donnée de la préparation du régule d’antimoine par les sels. La théorie dont il s’agit ici, est encore d’un ordre bien supérieur. Au reste, j’observerai sur ces trois théories si merveilleuses, qui demandent beaucoup de connoissances & de sagacité, qu’elles ont toutes les trois pour objet des opérations vicieuses, ou du-moins imparfaites & mal entendues ; d’où on est porté à inférer qu’en chimie, vraissemblablement comme par-tout ailleurs, les manœuvres les plus compliquées sont toujours les plus mauvaises, & cela tout aussi-bien quand on entend leur théorie, que quand on ne l’entend pas.

Mais il y a une question plus importante sur les principes chimiques : nous avons dit plus haut que l’analyse ou décomposition des corps parvenoit enfin quelquefois jusqu’à des principes inaltérables, du moins que l’art ne savoit point simplifier ultérieurement, & dont on n’observoit aucune altération dans la nature. Les Chimistes appellent ces corps premiers principes ou élémens : ces élémens de chimistes sont donc des substances indestructibles, incommutables, persistant constamment dans leur essence quelques mixtions qu’elles subissent, & par quelque moyen qu’on les dégage de ces mixtions.

Cette question importante roule sur ces premiers principes, savoir s’il y a plusieurs corps qui soient véritablement & essentiellement élémentaires, ou s’il n’y a qu’une matiere unique ou homogene qui constitue par ses diverses modifications tous les corps, même réputés les plus simples.

L’observation bien résumée, ou le système de tous les faits chimiques démontre qu’une pareille matiere est un pur concept, un être abstrait, que non-seulement on admet gratuitement & inutilement, mais même dont la supposition a jetté dans des erreurs manifestes tous les philosophes qui l’ont défendue, parce qu’ils ont attribué aux corps dépouillés de leurs qualités réelles par cette abstraction, des propriétés qu’ils ne peuvent avoir qu’à raison de ces qualités. C’est de cette source, par exemple, qu’a coulé l’erreur des Physiciens sur les prétendues lois de la cohésion observée entre les différens corps, c’est-à-dire, entre diverses portions de matiere déja spécifiée, les corps ou la matiere, ont-ils dit, sont cohérens en raison de la proximité de leurs parties : mais nul corps de la nature n’est de la matiere proprement dite, & par conséquent nul exercice des lois de la cohésion entre diverses portions de matiere ; les sujets soumis à ces lois sont toujours ou de l’eau ou de l’air, ou un métal, ou de l’huile, &c. Or la façon de l’être qui spécifie chacun de ces corps, diversifiant essentiellement & manifestement leur cohésibilité réciproque, il est clair que la contemplation des lois d’adhésion, qui devroient être absolument uniformes entre les portions d’une matiere homogene, ne peut être qu’abstraite, & que lorsque l’esprit l’applique à des sujets qui existent réellement & hors de lui, prend nécessairement sa chimere pour la réalité. Cette considération est vraiment essentielle & fondamentale dans la doctrine chimique, qui ne connoît d’abstractions que les vérités composées ou générales, & qui dans l’estimation des faits singuliers,

n’établit jamais ses dogmes que d’après l’observation.

Les chimistes modernes ont admis assez généralement pour leurs principes premiers & inaltérables, les quatre élémens des Péripatéticiens ; le feu qu’ils appellent phlogistique avec les Stahlliens, l’air, l’eau, & la terre. Mais cette énumération est incomplette & inexacte, en ce qu’il y a plusieurs especes de terre véritablement inaltérables & incommutables, & qui seront par conséquent pour eux autant de premiers principes, tant qu’ils n’auront pas su simplifier ces especes de terre jusqu’au point de parvenir à un principe terreux, unique & commun.

Il est très-vraissemblable pourtant que cette vraie terre primitive réellement simple existe, & que l’une des quatre terres connues, savoir, la vitrifiable, l’argileuse, la calcaire, & la gypseuse ; que l’une de ces quatre terres, dis-je, est la terre primitive, mais sans qu’on sache laquelle, & quoiqu’il puisse bien être aussi que pas une des quatre ne soit simple.

Si les deux métaux parfaits, l’or & l’argent, sont véritablement indestructibles, on n’est en droit de leur refuser la simplicité, que parce qu’il est très probable qu’ils sont formés des mêmes principes que les autres substances métalliques, dont ils ne different que par l’union plus intime de ces principes.

Bien loin que l’esprit se prête difficilement à concevoir plusieurs principes primitifs essentiellement divers & incommutables, ou, ce qui est la même chose, plusieurs matieres primitivement & essentiellement diverses ; il me semble au contraire qu’il s’accommode mieux de cette pluralité de matieres, & que la magnificence de la nature que cette opinion suppose, vaut bien la noble simplicité qui peut faire pencher vers le sentiment opposé. Je trouve même très-probable que les corps composés des autres mondes, & même des autres planetes de celui-ci, aient non-seulement des formes diverses, mais même qu’ils soient composés d’élémens divers ; qu’il n’y ait, par exemple, dans la lune ni terre argilleuse, ni terre vitrifiable, ni peut-être aucune matiere douée des propriétés très-communes de nos terres ; qu’il y ait au lieu de cela un élément qu’on peut appeller si l’on veut, lune, &c. ce n’est que le feu qui me paroît être très-vraissemblablement un élément universel.

Parmi les systèmes philosophiques, tant anciens que modernes, qui ont admis un principe unique & primitif de tous les êtres, le plus ancien & celui qui mérite le plus d’attention, est celui que Thalès a publié ou plûtôt renouvellé, que Vanhelmont a soutenu & prétendu prouver par des expériences, & qui admet l’eau pour ce principe premier & commun. Mais, malgré les expériences postérieures de Boyle & de M. Duhamel, rapportées au commencement de l’article Eau, Chimie, (voyez cet article.) les chimistes modernes ont appris à ne plus conclure de ces expériences, que l’eau se change en terre, en air, & autres principes éloignés des végétaux. (b)

PRIN-FILÉ, s. m. (Manufacture de tabac.) ce mot signifie le filage le plus fin qui se puisse faire avec des feuilles de tabac sans corde ; les deux autres sont le moyen-filé & le gros-filé. Dictionn. du Commerce.

PRINOS, s. m. (Botan.) genre de plante que Linnæus caractérise ainsi. Le calice de la fleur est très-petit, permanent & composé d’une seule feuille, qui est légerement découpée en six parties. La fleur est composée d’un seul pétale, & est de l’espece de celles qui sont formées en maniere de roue ; elle n’a point de tubes, mais elle a les bords divisés en six segmens ovales. Les étamines forment six filets tubuleux, droits & plus courts que la fleur. Leurs bossettes sont oblongues & obtuses. Le germe du pistil est ovale, & se termine en un stile plus court que