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qu’ils se sont déterminés sur le nombre & la qualité des vaisseaux, le conseil d’état en expédie l’ordre à tous ces colleges qui arment séparément à proportion de leur contingent. Celui d’Amsterdam fait toujours la troisieme partie de tous les armemens, & les autres une sixieme partie chacun.

La charge d’amiral-général a été ordinairement unie à celle de stathouder : mais depuis la mort de Guillaume III. prince d’Orange il n’y a point eu d’amiral-général, & aujourd’hui tous les colleges de l’amirauté ont leurs officiers particuliers, dont le premier a le titre de lieutenant-amiral. Cependant la province de Gueldres a conféré le titre d’amiral-général au prince de Nassau-Orange, avec la dignité de stathouder & de capitaine-général. Voyez Stathouder.

Les pays qui ont été conquis par les armes de la république, ou qui se sont soumis d’eux-mêmes à sa domination, font une partie considérable de l’état ; on les nomme les pays de la généralité, parce qu’ils dépendent immédiatement des états-généraux, & non d’aucune province particuliere. On les divise en quatre, qui sont le Brabant hollandois, le pays d’Outre-Meuse ou le Limbourg hollandois, la Flandre hollandoise, & le quartier de Venlo.

Malgré les grands avantages que le commerce procure à l’état, & les revenus considérables qu’il retire des droits, des taxes & des impositions, il est arrivé que la république des Provinces-Unies a contracté des dettes immenses par les longues & cruelles guerres qu’elle a eu à soutenir. Nous ne connoissons pas bien la situation des finances de chaque province en particulier, mais nous sommes mieux instruits de celles de la province de Hollande, qui contribue de 53 florins sur 100 dans les charges de la république. Or les dettes de cette province sont encore à-peu-près les mêmes qu’à la fin de la guerre terminée par le traité d’Utrecht, & les mêmes impôts subsistent, à l’exception d’un demi-centieme denier sur les maisons. Le total des revenus est de 22 millions 241 mille 309 florins. Les charges montent à 15 millions 863 mille 840 florins ; l’excédent des revenus est donc 6 millions 377 mille 499 florins ; mais il faut ajouter aux charges la lotterie de six millions de l’année 1750, & celle d’une semblable somme de l’année suivante, en prenant pour chaque billet de mille florins à discompter, 300 florins de vieilles obligations ; de sorte que les dettes ont augmenté de 8 millions & 200 florins à trois & demi pour cent.

Il est vrai que les particuliers à qui la Hollande doit sont des sujets de l’état, & qu’ils ne desirent point d’être remboursés, dans l’incertitude où ils sont de pouvoir mieux employer leur argent ; mais il n’en est pas moins vrai que l’unique source de l’opulence des Provinces-Unies décroît chaque année, & sans compter les causes intérieures de décadence de l’état, les progrès de toutes les nations dans le commerce doivent miner encore plus immédiatement ses forces & sa puissance.

Ce détail peut suffire sur le gouvernement des Provinces-Unies, le lecteur pourra s’instruire plus complettement dans le livre de Janiçon, qui forme quatre volumes in-12. & mieux encore pour l’histoire, dans les ouvrages de Basnage, de le Clerc, de Bizot, & autres écrits en latin & en flamand. (Le chevalier de Jaucourt.)

PROVINCIA, (Géog.) mot latin, dont les François & les Anglois ont fait leur mot province. On entend par ce mot une étendue considérable de pays, qui fait partie d’un grand état, & dans laquelle on comprend plusieurs villes, bourgs, villages, & autres lieux sous un même gouvernement. C’est ce que les Grecs, & particulierement Ptolomée, appellent ἐπαρχία : les Allemands ont le mot landschafft, qui veut dire la même chose, & les Italiens & les Espagnols

ont conservé sans aucune altération l’ancien nom provincia.

Originairement les Romains donnerent le nom de provinces aux contrées qu’ils avoient acquises hors de l’Italie, ou par les armes, ou par droit d’hérédité, ou par quelqu’autre voie ; ce qui a fait dire à Hégésipe, que les Romains, cum in jus suum vincendo redigerent procùl positas regiones, appellavisse provincias. Il dit procùl positas ; car d’abord aucune contrée d’Italie n’eut le nom de province. Aussi Dion Cassius, l. LIII. p. 103. en donnant la division de l’empire romain sous Auguste, ne met point l’Italie parmi les provinces de l’empire. Cependant, sous Hadrien, l’Italie paroît avoir été divisée en deux parties principales, dont l’une comprenoit le pays d’au-deçà & d’au-delà du Pô, qui, avec les contrées voisines, furent sous Constantin appellées du nom de province d’Italie, dont Milan étoit la métropole. Les autres pays d’Italie demeuroient pendant ce tems-là sous le vicaire de la ville.

Lorsque les Romains avoient gagné quelque contrée en province, ils y envoyoient ordinairement tous les ans un homme qui, s’il avoit étoit consul, faisoit prendre à cette province le nom de consulaire, & s’il avoit été préteur, lui faisoit prendre celui de prétorienne. La charge de cet homme consulaire ou préteur étoit de gouverner la province selon les lois romaines. Il établissoit son tribunal dans la principale ville, où il rendoit la justice aux peuples, ce qui avoit quelque rapport à ce qu’on appelle présentement en France gouvernement.

Onuphre nous apprend que sous Auguste les provinces de l’empire romain furent partagées en vingt-six diocèses, dont ce prince choisit quatorze où il se réserva d’envoyer des commandans sous le nom de recteurs ou de procureurs, & il laissa les autres à la disposition du sénat.

Sous les successeurs d’Auguste, le nombre des provinces accrut, & on les divisa en différentes manieres, comme on en divise encore quelques-unes de notre tems. On les distingue en grande & petite, en premiere, seconde & troisieme. Quelques-unes, à cause des eaux médicinales, furent nommées salutaires ; d’autres furent partagées en orientale & occidentale, en majeure & mineure, & quelques-unes prirent leur nom de leur capitale.

Les Grecs ont distingué quelques provinces, composées de montagnes & de plaines, en tracheia, en latin aspera, c’est-à-dire rude & raboteuse, & cæle, qui veut dire creuse ou plaine.

On a divisé encore les provinces en citérieure & ultérieure ; & cette distinction est quelquefois causée par la situation de quelque montagne qui se trouve entre deux. Le cours d’un fleuve a quelquefois le même effet. On trouve encore chez les anciens une division de provinces en intérieure & extérieure, par rapport à la situation d’une montagne, comme par rapport au cours d’un fleuve, on divise une province en province en-deçà & province au-delà. La domination met quelquefois aussi de la distinction dans une même province, comme on a dit, le Brabant espagnol & le Brabant hollandois.

Aujourd’hui la plus commune division d’une province est en haute & basse. Le cours des rivieres donne quelquefois ce nom ; mais il faut prendre garde que, quoique ces deux mots soient toujours relatifs, il y a cependant des pays qui sont appellés Pays-bas, sans que l’on en trouve qui ait le nom de haut. On trouve bien, par exemple, la basse Normandie, quoique l’autre soit appellée simplement Normandie ; on dit de même la basse Bretagne. Au contraire en Auvergne il y a seulement le mot de haute Auvergne, qui est la partie montagneuse, & l’autre partie n’est point ordinairement appellée basse. (D. J.)