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Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 13.djvu/620

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La lumiere & les ténebres, le froid & le chaud, le sec & l’humide sont en quantité égales dans le monde. Où le chaud prédomine, il y a été ; hiver, si c’est le froid ; printems, si c’est balance égale du froid & du chaud ; automne, si le froid prédomine. Le jour même a ses saisons ; le matin est le printems du jour ; le soir en est l’automne, il est moins salubre.

Le rayon s’élance du soleil, traverse l’æther froid & aride, pénetre les profondeurs & vivifie toutes choses entant qu’elles participent de sa chaleur ; mais non entant qu’animées. L’ame est un extrait de l’æther chaud & froid ; elle différe de la vie ; elle est immortelle, parce qu’elle émane d’un principe immortel.

Il ne s’engendre rien de la terre ; les animaux ont leurs semences, le moyen de leur propagation.

L’espece humaine a toujours été & ne cessera jamais.

L’ame est un nombre, elle se meut d’elle-même.

L’ame se divise en raisonnable & irraisonnable ; l’irraisonnable est irascible & concupiscible ; la partie raisonnable est émanée de l’ame du monde, les deux autres sont composées des élemens.

Tous les animaux ont une ame raisonnable ; si elle ne se manifeste pas dans les actions des brutes, c’est par défaut de conformation & de langue.

Le progrès de l’ame se fait du cœur au cerveau ; elle est la cause des sensations ; sa partie raisonnable est immortelle ; les autres parties périssent ; elle se nourrit de sang ; les esprits produisent ses facultés.

L’ame & ses puissances sont invisibles, & l’æther ne s’apperçoit pas ; les nerfs, les veines & les artères sont ses liens.

L’intelligence descend dans l’ame, c’est une particule divine qui lui vient du dehors, c’est la base de son immortalité.

L’ame renferme en elle le nombre quaternaire.

Si les veines sont les liens de l’ame, le corps est sa prison.

Il y a huit organes de la connoissance ; le sens, l’imagination, l’art, l’opinion, la prudence, la science, la sagesse, l’intelligence ; les quatre derniers sont communs à l’homme & aux dieux ; les deux précédens, à l’homme & aux bêtes ; l’opinion lui est propre.

L’ame jettée sur la terre est vagabonde dans l’air, elle est sous la figure d’un corps.

Aucune ame ne périt ; mais après un certain nombre de révolutions, elle anime de nouveaux corps, & de transmigrations en transmigrations, elle redevient ce qu’elle a été.

La doctrine de Pythagore sur la transmigration des ames, a été bien connue & bien exposée par Ovide qui introduit ce philosophe, liv. XV. de ses Métamorphoses, parlant ainsi :

Morte carent animoe, semperque priore relictâ
Sede, novis domibus habitant, vivuntque recepta.
Omnia mutantur ; nihil interit, errat & illinc,
Huc venit, huic illuc & quoslibet occupat artus
Spiritus, èque feris humana in corpora transit,
Neque feras noster, nec tempore deperit ullo,
Ut que novis fragilis signatur cera figuris,
Nec manet, ut fuerat, nec formas servat easdem,
Sed tamen ipsa eadem est ; animam sic semper eandem
Esse, sed in varias doceo migrare figuras.

Il n’y a qu’un certain nombre d’ames, elles ont été tirées de l’Esprit divin ; elles sont renfermées dans des corps qu’elles vivifient en certains tems ; le corps périt, & l’ame libre s’éleve aux régions supérieures ; c’est la région des manes, elle y séjourne, elle s’y purge ; delà, selon qu’elle est bonne, mauvaise ou

détestable, elle se rejoint à son origine, ou elle vient animer le corps d’un homme ou d’un animal. C’est ainsi qu’elle satis fait à la justice divine.

De la médecine de Pythagore. La conservation de la santé consiste dans une juste proportion du travail, du repos & de la diete.

Il faut s’interdire les alimens flateurs, préférer ceux qui resserrent & fortifient l’habitude du corps.

Il faut s’interdire les alimens abjects aux yeux des dieux parce qu’ils en sont alienés.

Il faut s’interdire les mets sacrés, parce que c’est une marque de respect qu’on doit aux êtres auxquels ils sont destinés, que de les soustraire à l’usage commun des hommes.

Il faut s’interdire les mets qui suspendent la divination, qui nuisent à la pureté de l’ame, à la chasteté, à la sobrieté, à l’habitude de la vertu, à la sainteté, & qui mettent le desordre dans les images qui nous sont offertes en songe.

Il faut s’interdire le vin & les viandes.

Il ne faut se nourrir ni du cœur, ni de la cervelle, ni de la mauve, de la mûre, de la fêve, &c.

Il ne faut point manger de poissons.

Le pain & le miel, le pain de millet avec le chou crud ou cuit, voila la nourriture du pythagoricien.

Il n’y a point de meilleur préservatif que le vinaigre.

On lui attribue l’observation des années climactériques & des jours critiques.

Il eut aussi sa pharmacie.

Il eut ses symboles. En voici quelques-uns.

Si tu vas adorer au temple, dans cet intervalle ne fais ni ne dis rien qui soit relatif à la vie.

Adore & sacrifie les piés nuds.

Laisse les grands chemins, sois les sentiers.

Adore l’haleine des vents.

Ne remue point le feu avec l’épée.

Ne fais point cuire le chevreau dans le lait de sa mere.

Prête l’épaule à celui qui est chargé.

Ne saute point par-dessus le joug.

Ne pisse point le visage tourné au soleil.

Nourris le coq, mais ne l’immole pas.

Ne coupe point de bois sur les chemins.

Ne reçois point d’hirondelles sous ton toît.

Plante la mauve dans ton jardin, mais ne la mange pas.

Touche la terre quand il tonne.

Prie à haute voix. &c.....

Il suit de ce qui précéde que Pythagore fut un des plus grand hommes de l’antiquité, & qu’il est difficille d’entendre sa définition de la musique, & de nier que les anciens n’aient connu le concert à plusieurs parties différentes.

Des disciples & des sectateurs de Pythagore. Aristée succéda dans l’école à Pythagore ; ce fut un homme très-versé dans les mathématiques, il professa trente-neuf ans & vêcut environ cent ans. Mnésarque, fils de Pythagore, succéda à Aristée ; Bulagoras à Mnésarque ; Tydas à Bulagoras ; Aresas à Tydas ; Diodore d’Aspende à Aresas ; Archytas à Diodore. Platon fut un des auditeurs d’Archytas. Outre ces pythagoriciens, il y en avoit d’autres dispersés dans la Sicile & l’Italie, entre lesquels on nomme Clinias, Philolaüs, Theorides, Euritus, Architas, Timée, & plusieurs femmes. On fait honneur à la même secte d’Hypodame, d’Euriphame, d’Hyparque, de Theages, de Métope, de Criton, de Diotogène, de Callicratidas, de Charondas, d’Empedocle, d’Epicarme, d’Ocellus, d’Ecphante, de Hypon, & autres.

Ecphante prétendit que l’homme ne pouvoit obtenir une vraie notion des choses ; que les vicissitudes