Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 14.djvu/592

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Ainsi le vrai samanéen, ou le sectateur de la doctrine intérieure, étant censé naître dans l’état le plus parfait, n’a plus besoin d’expier des fautes qui ont été lavées par les transmigrations antérieures ; il n’est plus obligé d’aller se prosterner dans un temple, ni d’adresser ses prieres aux dieux que le peuple adore, dieux qui ne sont que les ministres du grand Dieu de l’univers. Dégagé de toutes ses passions, exempt de tout crime, le samanéen ne meurt que pour aller rejoindre cette unique divinité dont son ame étoit une partie détachée ; car ils pensent que toutes les ames forment ensemble l’être suprème, qu’elles existent en lui de toute éternité, qu’elles émanent de lui ; mais qu’elles ne peuvent lui être réunies qu’après s’être rendues aussi pures qu’elles l’étoient lorsqu’elles en ont été séparées.

Suivant leurs principes, cet être suprème est de toute éternité ; il n’a aucune forme, il est invisible, incompréhensible ; tout tire son origine de lui ; il est la puissance, la sagesse, la science, la sainteté, la vérité même ; il est infiniment bon, juste & miséricordieux ; il a créé tous les êtres, & il les conserve tous : il ne peut être représenté par des idoles ; mais on peut dépeindre ses attributs, auxquels il ne desapprouve point que l’on rende un culte ; car pour lui il est au-dessus de toute adoration : c’est pour cela que le samanéen toujours occupé à le contempler dans ses méditations, ne donne aucunes marques extérieures de culte ; mais il n’est pas en même tems athée, comme le prétendent les missionnaires, puisqu’il ne cherche qu’à étouffer en lui toutes les passions pour être en état d’aller rejoindre son Dieu. Ainsi le vuide & le néant, principe des Samanéens, ne signifient point la destruction de l’ame, mais ils désignent que nous devons anéantir tous nos sens, nous anéantir nous-mêmes pour aller nous perdre en quelque façon dans le sein de la divinité, qui a tiré toutes choses du néant, & qui elle-même n’est point matiere.

Cet être suprème des philosophes de l’Inde est l’origine de tous les êtres, & il renferme en lui les principes de toutes choses : ainsi lorsqu’il a voulu créer la matiere, comme il est un pur esprit qui n’a aucun rapport avec un être corporel, par un effet de sa toute-puissance, il s’est donné à lui-même une forme matérielle, & a fait une séparation des vertus masculine & feminine, qui jusqu’alors avoient été concentrées en lui ; par la réunion de ces deux principes, la création de l’univers devient possible. Le lingam si respecté dans l’Inde, est le symbole de ce premier acte de la divinité ; & tous ensemble, c’est-à-dire ces cinq principes, composent l’être suprème, qui se sert de leur ministere pour gouverner le monde ; mais il viendra un tems qu’il les fera rentrer dans son sein.

Tels sont les principes des samanéens sur la Divinité. On passera sous silence tout ce qui regarde le culte que l’on rend à ces premieres émanations de l’être suprème, & le reste de la religion indienne, qui n’est plus celle des samanéens, mais celle du peuple, moins susceptible de ces grandes idées, & de méditations profondes qui font tout le culte des disciples de Budda. On n’entrera pas non plus dans le détail des différentes sectes qui ont peu s’élever parmi eux. On fera seulement remarquer qu’il se trouve une grande conformité entre la doctrine des samanéens & celle des Manichéens. (D. J.)

SAMANIDES, (Hist. orientale.) on appelle samanides, la dynastie des califes fondée par Saman, qui de conducteur de chameaux, devint chef d’Arabes ; son fils rendit ses enfans dignes des premiers emplois militaires de l’état des califes. Al-Mamon les avança, & Motamed donna à Nasser, petit-fils d’Assad-Ben-Saman, l’an 261 de l’hégire, le gouvernemen-de la province de Mawaralnahar, ou Transoxane.

Enfin, l’an 279, Ismaël, frere de Nasser, se rendit le maître absolu de cette province, en conquit d’autres, & fonda un puissant empire, qui a porté le nom de Samanides. (D. J.)

SAMAR, (Géog. mod.) & Samal dans les lettres édifiantes ; île de l’Océan oriental, entre les Philippines, au sud-est de celle de Luçon, dont elle est séparée par le détroit de S. Bernardin. Son circuit est d’environ 130 lieues ; elle a dans cette enceinte plusieurs montagnes escarpées, & des plaines assez fertiles. Latit. septentrionale, 11. degrés jusqu’au 13. 30′. (D. J.)

SAMARA, (Géog. mod.) ville d’Asie, dans la Tartarie, au royaume de Cassan, & dans le duché de Bulgar, à la gauche, c’est-à-dire à l’orient du Wolga, sur le penchant & sur le haut d’un monticule, à 350 werstes de Casan. Ses maisons sont toutes de bois, & fort chetives.

Samara, la, (Géog. mod.) riviere d’Asie, en Tartarie, au duché de Bulgar, dans l’empire russien. Elle a son cours d’orient en occident, passe au midi de la ville Samara, & tombe dans le Wolga.

Samara, s. m. (Hist. de l’inquisit.) autrement dit sambenito, & samiretta, noms dignes de leur origine. Espece de scapulaire ou dalmatique que les inquisiteurs font porter à ceux qu’ils condamnent à être brûlés. Le fond du samara est gris, avec la représentation d’une figure d’homme, posé sur des tisons allumés avec des flammes qui s’élevent, & des démons qui l’environnent pleins de joie. Ce rafinement de barbarie, imaginé pour accoutumer le peuple à voir sans peine brûler des malheureux, est peut-être encore plus exécrable que le tribunal même de l’inquisition, tout odieux, tout horrible qu’il est dans son principe. (D. J.)

SAMARACAN, (Géog. mod.) ville d’Asie, dans la partie orientale de l’île de Java, à 7 lieues au sud-ouest de Japara, avec laquelle elle trafique.

Paul Lucas parle d’une autre Samaran, grande ville ruinée en Asie, assez près des frontieres de la Turquie & de la Perse, en allant d’Ispahan à Alep par Amadam. Tout ce que ce voyageur raconte de la magnificence des ruines de cette ville, ne doit passer que pour un roman de son invention. (D. J.)

SAMARATH, s. m. (Hist. mod.) nom d’une secte de Benjans dans les Indes, qui croyent que leur dieu qu’ils nomment Permiséer, gouverne le monde par trois lieutenans. Brama, c’est le premier, a le soin d’envoyer les ames dans les corps que Permiséer lui désigne. Le second, nommé Buffina, enseigne aux hommes à vivre selon les commandemens de Dieu, que ces benjans conservent écrits en quatre livres. Il a aussi le soin des vivres & de faire croître le blé, les arbres, les plantes, mais après que Brama les a animés. Le troisieme s’appelle Mais ; son pouvoir s’étend sur les morts, dont il examine les actions passées pour envoyer leurs ames dans d’autres corps, faire une pénitence plus ou moins rigoureuse, suivant les vertus qu’elles ont pratiquées, ou les crimes qu’elles ont commis dans leur premiere vie. Lorsque leur expiation est achevée, Maïs renvoie ces ames ainsi purifiées à Permiséer qui les reçoit au nombre de ses serviteurs. Les femmes de cette secte persuadées que dans l’autre monde elles vivent sept fois autant, & ont sept fois plus de plaisir qu’elles n’en ont goûté ici bas, pourvu qu’elles meurent avec leurs maris, ne manquent pas à leurs funérailles de se jetter gaiment dans le bucher. Dès que les femmes sont accouchées, ont met devant leur enfant une écritoire, du papier & des plumes, pour marquer que Buffina veut écrire dans l’entendement du nouveau né la loi de Permiséer. Si c’est un garçon, on y ajoute un arc & des flêches, comme un présage de sa