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d’une bonne grandeur) onze pouces quelques lignes de long.

Les extrémités de cette piece sont coudées, pour donner naissance à deux branches de différente structure ; la branche antérieure a environ 4 pouces 8 lignes de long ; elle s’avance plus en avant, & son extrémité s’éloigne d’un pouce 8 lignes de la perpendiculaire qu’on tireroit du coude sur le feuillet. Elle représente deux segmens de cercle, lesquels s’unissent ensemble, forment en-dehors un angle aigu, & leur convexité regarde le dedans de la scie.

Le commencement du premier cercle forme avec la piece principale un angle qui est plus droit qu’obtus ; la fin du second cercle est fendue de la longueur d’un pouce 5 lignes pour loger le feuillet qui y est placé de biais, & qui forme avec ce cercle un angle aigu.

L’extrémité de ce second segment de cercle est encore percée par un écrou, comme nous allons le dire.

La branche postérieure a un pouce de moins que l’antérieure ; les deux segmens de cercle qu’elle forme sont moins alongés & plus circulaires. Le premier fait un angle droit avec la piece principale, & le second en fait de même avec le feuillet : ce second cercle se termine à une figure plate des deux côtés, arrondie à sa circonférence, & percée par un trou quarré. L’union de ces deux segmens de cercles ne forme pas en-dehors un angle aigu, comme à la branche antérieure, mais ils semblent se perdre dans une pomme assez grosse, terminée par une mitre taillée à pans, lesquelles pieces paroissent être la base de toute la machine.

Il sort du milieu de la mitre une soie de près de quatre pouces de long, qui passe dans toute la longueur du manche.

La seconde partie de la scie est le manche, il est sait de même que celui que nous avons fait remarquer au couteau d’amputation ; mais sa situation n’est pas la même, car au-lieu de suivre la ligne qui couperoit la scie en deux parties égales suivant sa longueur, il s’en éloigne d’un demi-pouce, & s’incline vers la ligne qui seroit prolongée de l’axe du feuillet ; méchanisme qui rend la scie fort adroite, & fait tout autant que si le manche étoit contigu au feuillet, sans pour cela la rendre plus pesante.

L’avance recourbée, ou le bec du manche de la scie est encore tourné du côté des dents du feuillet, afin de servir de borne à la main du chirurgien. Ce manche est percé dans le milieu de son corps suivant sa longueur, ce qui sert à passer la soie de l’arbre qui doit être rivée à son extrémité postérieure.

Le feuillet & les pieces qui en dépendent sont la troisieme partie de la scie.

Ce feuillet est un morceau d’acier battu à froid, quand il est presque entierement construit, afin qu’en resserrant par cette méchanique les pores de l’acier, il devienne plus élastique ; sa longueur est d’un bon pié sur treize ou quatorze lignes de large ; son épaisseur est au-moins d’une bonne ligne du côté des dents, mais le dos ne doit pas avoir plus d’un quart de ligne.

On pratique sur la côte la plus épaisse de ce feuillet de petites dents faites à la lime, & tournées de maniere qu’elles paroissent se jetter alternativement en-dehors, & former deux lignes paralleles ; ce qui donne beaucoup de voie à l’instrument, & fait qu’il passe avec beaucoup de facilité & sans s’arrêter.

La trempe des feuillets de scie doit être par paquets & même recuite, afin qu’elle soit plus douce, que la lime puisse mordre dessus, & qu’elle ne s’engrene point, comme nous l’avons démontré en parlant des couronnes du trépan.

Les extrémités du feuillet sont percées, afin de

l’assujettir sur l’arbre par des méchaniques différentes ; car son extrémité antérieure est placée dans la fente que nous avons fait observer à la fin du second segment de cercle de la branche antérieure, & elle y est assujettie par une vis qui la traverse en entrant dans le petit écrou que nous avons fait pratiquer à l’extrémité de cette branche.

L’autre extrémité du feuillet est plus artistement arrêtée sur la branche postérieure, elle y est tenue, pour ainsi dire, comme par une main, qui n’est autre chose qu’une avance plate, légerement convexe en-dehors, & fendue pour loger le feuillet qui y est fixé par une petite vis qui traverse les deux lames de cette main & le feuillet. Cette main qui couvre environ huit lignes du feuillet, paroît s’élever de la ligne diamétrale d’un base ronde, qui est comme la mitre du feuillet : cette mitre est adoucie, très-polie & légerement convexe du côté de la main, mais plane & moins artistement limée à sa surface postérieure, afin de s’appuyer juste sur le trou quarré de la branche postérieure.

On voit sortir du milieu de cette surface postérieure de la mitre une espece de cheville différemment composée, car sa base est une tige quarrée de quatre lignes de hauteur, & proportionnée au trou quarré de la branche postérieure : le reste de cette cheville a un pouce de longueur, il est rond & tourné en vis ; on peut le regarder comme la soie du feuillet.

Enfin la troisieme piece dépendante du feuillet est un écrou : son corps est un bouton, qui après de cinq lignes de hauteur, & six ou sept d’épaisseur : sa figure intérieure est une rainure en spirale qui forme l’écorce, & l’extérieur ressemble à deux poulies jointes l’une auprès de l’autre.

Il part de la surface postérieure de cet écrou deux aîles, qui ont environ neuf lignes de longueur, & qui laissent entr’elles un espace assez considérable pour laisser passer la soie du feuillet ou de sa mitre.

L’usage de cet écrou est de contenir la vis, afin qu’en tournant autour il puisse bander & détendre le feuillet de la scie.

La maniere de se servir de la scie dont nous venons de faire la description, est de la prendre par son manche, de façon que les quatre doigts de la main droite l’empoignent, pour ainsi dire, & que le pouce soit alongé sur son pan intérieur.

On porte ensuite l’extrémité inférieure du pouce de la main gauche ou le bout de l’ongle sur l’os qu’on veut scier & dans l’endroit où on veut le couper ; puis on approche la scie de cet endroit de l’os, & par conséquent auprès de l’ongle qui sert comme de guide à la scie, & l’empêche de glisser à droite ou à gauche, ce qui arriveroit immanquablement sans cette précaution, & pourroit causer des dilacérations aux chairs qui auroient des suites, dont le détail nous meneroit trop loin.

On pousse ensuite la scie légerement & doucement en avant, puis on la tire à soi avec la même légereté & la même douceur ; ce qu’on continue doucement & à petits coups, jusqu’à ce que sa voie & sa trace soit bien marquée.

Quand une fois la scie a bien marqué sa voie ou sa trace sur l’os, pour-lors on ôte le pouce de la main gauche de l’endroit où nous l’avions posé, & l’on empoigne, pour ainsi dire, le membre qu’on veut couper avec la main gauche ; ce qui sert comme de point d’appui au chirurgien. Il ne faut plus alors scier à petits coups, mais à grands coups de scie, observant toujours de scier légerement & de ne pas trop appuyer la scie ; car en appuyant, ses petites dents entrent dans l’os & l’arrêtent ; ce qui fait que les chirurgiens ne scient qu’avec peine & par secousses. Garengeot, traité d’instr. de Chirurgie.