Un des objets les plus importans, lorsqu’on entreprend un siege ; c’est de l’environner de maniere que l’ennemi ne puisse y faire entrer aucun secours. M. de Vendôme ayant assiégé Verue à la fin de l’année 1704, sans couper absolument la communication de cette place avec l’armée de M. le duc de Savoie ; la ville se défendit depuis le 14 Octobre de cette année jusqu’au 7 Avril de la suivante, & M. de Vendôme auroit été obligé d’en lever le siege, s’il n’étoit parvenu à couper la communication avec l’armée ennemi ; c’est ce qu’il fit la nuit du premier au second de Mars.
Ayant fait après cela sommer le gouverneur de se rendre, celui-ci lui répondit, qu’il comptoit n’être assiégé que du jour de l’interruption de la communication, quoiqu’il y eût déja près de cinq mois que M. de Vendôme fut devant la place.
Avant de former un siege, on doit évaluer à-peu-près la quantité de troupes & de munitions dont on aura besoin pour la prendre ; cette évaluation est assez difficile, & nous n’avons aucun livre où elle soit traitée avec précision.
Ciran, l’un de nos plus anciens ingénieurs, suppose que l’armée assaillante doit être dix fois plus nombreuse que la garnison, & qu’ainsi il faut une armée de dix mille hommes pour attaquer une place dans laquelle il y en a mille ; mais ce rapport qui peut être assez exact dans cette supposition, pourvû qu’il n’y ait point à craindre qu’il vienne une armée au secours de la place, ne seroit pas suffisant dans une ville où il y auroit deux mille hommes, sur-tout s’il falloit se circonveiller contre l’ennemi.
Ce rapport se trouvera donc trop petit dans plusieurs cas, mais il sera aussi trop grand dans d’autres. Par exemple, on n’a pas besoin d’une armée de deux cens mille hommes pour assiéger une place dans laquelle il y en a vingt mille ; c’est au général à déterminer par la grande connoissance qu’il doit avoir de la guerre, le nombre de troupes dont il a besoin pour faire un siege quelconque, relativement à la grandeur de la place, à l’excellence de ses ouvrages, au nombre & à la valeur de la garnison qui y est renfermée.
Pour l’amas de munitions qu’on peut consommer dans un siege, il faut regler d’abord quelle en sera à-peu-près la durée, quelles seront les différentes batteries qu’il faudra élever, ce qu’elles pourront consommer par jour, &c. on a des tables dans plusieurs livres, notamment dans les mémoires d’artillerie de Saint-Remy, qui contiennent le détail des munitions de guerre menées à différens sieges ; mais comme on n’y rend aucune raison de la quantité des choses qu’elles contiennent, elles ne peuvent être d’un grand secours aux généraux. Cependant au défaut des préceptes, on joint ici quelques-uns de ces états pour donner une idée de la quantité de ces munitions qui se consomment dans un siege.
Etat des pieces d’artillerie & munitions de guerre qui ont été menées devant Luxembourg, pour en faire le siege, en 1684. | Munitions consommées. | |||
Pieces de fonte, | ||||
de 33 | 7 | Il y en eut quelques-unes d’éventées. | ||
de 24 | 33 | |||
de 8 | 8 | |||
de 4 | 12 | |||
— 60 — |
||||
Affuts avec leurs avantrains | ||||
de 33 | 12 | 4 | ||
de 24 | 46 | 2 | ||
de 8 | 8 |
de 4 | 14 | |||
Paires d’armes. | 99 | Lanternes. | 16 | |
Lanternes de rechange | Refouloirs. | 18 | ||
20 | Ecouvillons. | 20 | ||
Chariots à porter canon. | 19 | |||
Charretes | 125 | 10 | ||
Boulets, | ||||
de 33 | 10620 | 6792 | ||
de 24 | 55274 | 30100 | ||
de 8 | 3800 | |||
de 4 | 5000 | 618 | ||
Mortiers | 15 | |||
Ce qui a été mené au siege de * * * |
Ce qui y a été consommé. | |||
Mortiers | 16 | |||
Chariots à porter affuts à mortiers | 16 | 2 | ||
Plusieurs susbandes d’affuts à mortiers, avec leurs boulons. | Quelques susbandes. | |||
Bombes | 7092 | 5501 | ||
Fusées à bombes | 7300 | 5600 | ||
Pierriers montés | 6 | |||
Grenades | 40304 | 20660 | ||
Fusées à grenades | 57000 | 40000 | ||
Poudre | 953000 | 835300 | ||
Plomb | 90800 | 59800 | ||
Meches | 133600 | 67900 | ||
Sacs à terre | 199049 | 109019 | ||
Mousquets | 2400 | 618 | ||
Hallebardes | 200 | 90 | ||
Fusils | 100 | 100 | ||
Paires d’armes à l’épreuve | 100 | 1 | ||
Pots à terre | 100 | 13 | ||
Salpetre | 534 | 384 | ||
Soufre | 240 | 104 | ||
Une tonne de poix-résine. | ||||
Une tonne de poix-noire. | ||||
Deux tonnes de gaudron. | ||||
Mortiers de fontes, avec leurs pilons | 2 | |||
Chaudieres de fer | 2 | |||
Outils à pionniers | 38809 | 18795 | ||
Haches | 2310 | 1076 | ||
Serpes | 6670 | 2120 | ||
Manches d’outils | 3300 | 1800 | ||
Hottes | 510 | 500 | ||
Brouetes | 260 | 110 | ||
Outils à mineur | 184 | |||
A charpentier & à charron | 210 | 74 | ||
Trois forges complettes, & un soufflet. | ||||
Criks | 6 | 3 | ||
Un équipage de pont de bateaux. | ||||
Trois cens tonnes de cordages. | 26 | |||
Et quelqu’autres cordages. | Et quelqu’autres cordages. | |||
Chevres | 5 | Equipag. de chevres. | 1 | |
Madriers | 750 | 567 | ||
Coins de mire | 138 | 88 | ||
Leviers | 41 | 41 | ||
Feuilles de fer noir | 573 | 573 | ||
Feuilles de fer blanc | 340 | 340 | ||
Essieu de bois | 24 | 22 | ||
Peaux de moutons | 115 | 115 | ||
Clous | 6430 | 6430 | ||
Clous de cuivre | 16 | 16 | ||
Fer en barre | 945 | 845 |