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trois sortes. 1°. Le kiriath-shéma ; 2°. la loi ; 3°. les prophetes.

Le kiriath-shéma ne consiste qu’en trois morceaux de l’Ecriture. Le premier est celui qui commence au v. 4. du vj. chap. du Deutéronome, & finit par le 9. Le second commence au v. 13 du chap. xj. du même livre, & finit par le 21. Et le troisieme est tiré du xv. chap. du livre des nombres, & commence au 37 v. jusqu’à la fin du chap. Comme en hébreu le premier mot du premier de ces passages est shema, qui signifieécoute ; ils donnent à ces trois passages le nom de shema ; & à sa lecture celui de kiriath-shema, la lecture du shema. La lecture de ce shema est accompagnée de plusieurs prieres & actions de graces, devant & après ; mais la lecture du shéma n’est pas aussi rigide que celle des prieres ; il n’y a que les hommes libres qui y soient obligés le matin & le soir : les femmes & les serviteurs en sont dispensés ; quant à la lecture de la loi & des prophetes, nous en parlerons tout-à-l’heure.

La troisieme partie du service de la synagogue, est l’explication de l’Ecriture, & la prédication. La premiere se faisoit en la lisant, & l’autre après la lecture de la loi & des prophetes. Il est clair que Jesus-Christ enseignoit les juifs de l’une & de l’autre de ces manieres, dans leurs synagogues. Quand il vint à Nazareth, Luc, xvj. 17. &c. la ville où il avoit son domicile, on lui fit lire comme membre de la synagogue, le haphterah, ou la section des prophetes, qui servoit de leçon pour ce jour-là ; & quand il se fut levé, & qu’il l’eût lue, il se rassit & l’expliqua, comme cela se pratiquoit parmi les Juifs ; car par respect pour la loi & les prophetes, on ne les lisoit que debout ; mais quand on les expliquoit, celui qui officioit étoit assis en qualité de maître. Mais dans les autres synagogues dont il n’étoit pas membre, quand il y alloit, ce qu’il faisoit toujours, Luc, iv. 16. le jour du sabat, en quelqu’endroit qu’il se trouvât, il enseignoit le peuple par sa prédication, après la lecture de la loi & des prophetes. C’est aussi ce qu’on voit pratiquer à S. Paul, act. XIII. xv. dans la synagogue d’Antioche, dans la Pisidie : car l’histoire des actes remarque expressément que la prédication se fit après la lecture de la loi & des prophetes.

III. Le tems des assemblées de la synagogue, pour le service divin, étoit trois jours par semaine, sans compter les jours de fêtes & de jeûne : & chacun de ces jours-là, on s’assembloit le matin, l’après midi, & le soir. Les trois jours de synagogue étoient le lundi, le jeudi, & sur-tout le samedi jour du sabbat.

On y faisoit la lecture de la loi, ou des cinq livres de Moïse, qu’on partageoit en autant de sections qu’il y a de semaines dans l’année.

IV. Pour ce qui est du ministere de la synagogue, il n’étoit pas borné à l’ordre sacerdotal. Cet ordre étoit consacré au service du temple, qui étoit d’une toute autre nature, & ne consistoit qu’en oblations, soit de sacrifices, soit d’autres choses. Il est vrai que pendant le sacrifice du matin & du soir, les lévites & les autres chantres, chantoient devant l’autel, des pseaumes de louange à Dieu ; & que pour conclure la cérémonie, les prêtres bénissoient le peuple ; ce qui ressemble un peu à ce qui se faisoit dans la synagogue ; mais dans tout le reste, ces deux services n’avoient rien de commun : cependant pour conserver l’ordre, il y avoit dans chaque synagogue un certain nombre d’officiers ou de ministres fixes, qui étoient chargés des exercices religieux qui s’y devoient faire : on les y admettoit par une imposition des mains, solemnelle.

Les premiers étoient les anciens de la synagogue, qui y gouvernoient toutes les affaires, & régloient les exercices. Dans le nouveau Testament, ils se sont appellés les principaux de la synagogue ; il n’est mar-

qué en aucun endroit quel étoit leur nombre ; tout

ce qu’il y a de sûr, c’est qu’il y en avoit plus d’un dans une synagogue : car il en est parlé au pluriel dans quelques passages du n. Testament, où il ne s’agit que d’une ; & à Corinthe où vraissemblablement il n’y avoit pas deux synagogues : on en voit deux à qui ce titre est donné, Crispe & Sosthènes.

Après ceux-ci, il y avoit le ministre de la synagogue. On ne sait pas bien même si ce n’étoit pas un de ceux dont on vient de parler ; mais enfin, il y avoit une personne affectée au service de la synagogue, qui prononçoit les prieres au nom de toute l’assemblée ; & par cette raison, comme il les représentoit tous, & étoit leur messager, pour ainsi dire, auprès de Dieu, on l’appelloit en hébreu, scheliach zibbor, l’ange, ou le messager de l’église. De-là vient que dans l’apocalypse, les évêques des sept églises d’Asie, sont appellés d’un nom pris de la synagogue, les anges de ces églises : car comme le scheliach zibbor de la synagogue des Juifs, étoit le premier ministre qui offroit à Dieu les prieres du peuple, l’évêque étoit aussi dans l’église de Christ, le premier ministre qui offroit à Dieu celles des chrétiens de son église.

Il est vrai que ce n’étoit pas toujours l’évêque qui faisoit cette fonction, parce que dans chaque église il y avoit des prêtres sous lui, qui la faisoient souvent au-lieu de lui. Mais dans la synagogue, ce n’étoit pas non plus toujours le scheliach zibbor qui officioit en personne : c’étoit bien son emploi, & ordinairement il le faisoit ; mais il ne laissoit pas d’arriver assez souvent, qu’on le faisoit faire extraordinairement par quelqu’autre, pourvû que ce fût un sujet que l’âge, la bonne conduite, l’habileté, & la piété, en rendissent capables. Celui qu’on choisissoit ainsi, étoit pendant ce tems-là le scheliach zibbor, ou l’ange de l’assemblée : car comme un héraut, un messager envoyé de la part de Dieu à son peuple, est un ange de Dieu, puisque le terme d’ange en hébreu, signifie proprement un messager ; tout de même un messager de la part du peuple auprès de Dieu, pouvoit fort-bien s’appeller l’ange du peuple. Ce n’est qu’en ce dernier sens qu’on donnoit le nom d’ange à ce ministre de la synagogue ; mais il appartient aux ministres de l’église chrétienne, dans l’un & dans l’autre.

Après le scheliach zibbor, venoient les diacres, ou les ministres inférieurs de la synagogue, que l’on nommoit en hébreu chazanim, c’est-à-dire surintendans. C’étoient des ministres fixes, qui sous la direction des principaux de la synagogue, avoient le soin & l’intendance de tout ce qui s’y faisoit : c’étoient eux qui gardoient les livres sacrés de la loi & des prophetes, & du reste de l’Ecriture sainte ; les livres de leur liturgie, & les autres meubles de la synagogue ; & qui les donnoient quand il falloit s’en servir. Ils se tenoient auprès de celui qui lisoit les leçons de la loi ou des prophetes, & les corrigeoient, s’il leur arrivoit de se tromper ; enfin c’étoit à eux qu’on rendoit le livre quand la lecture étoit finie. Ainsi il est dit de notre Seigneur, quand il fut appellé à lire la leçon des prophetes dans la synagogue de Nazareth, dont il étoit membre, que quand il eut fini la lecture, il rendit le livre au ministre, c’est-à-dire au chazan, ou au diacre de la synagogue.

Autrefois il n’y avoit point de personne fixe établie pour lire les leçons dans la synagogue. Les principaux de la synagogue appelloient celui de l’assemblée qu’il leur plaisoit, & qu’ils en connoissoient capable, lorsque le tems de les lire étoit venu ; s’il y avoit des prêtres dans l’assemblée, on appelloit d’abord un prêtre ; ensuite un lévite, s’il y en avoit : au défaut de ceux-là, on prenoit quelque israëlite que ce fût ; & cela alloit jusqu’au nombre de sept. De-là vient qu’autrefois chaque section de la loi